• L'Histoire de l'Hôtel de Ville de Châtillon sur Seine (deuxième partie) racontée par Dominique Masson

    Dominique Masson, historien passionné du Châtillonnais, a profité de la réfection de l'Hôtel de Ville de Châtillon sur Seine pour voir s'il y restait des traces de l'ancien couvent des Bénédictines.

    Ces traces il les a déjà évoquées dans ce premier article :

     http://www.christaldesaintmarc.com/l-histoire-de-l-hotel-de-ville-de-chatillon-sur-seine-racontee-par-dom-a159792216

    Voici la suite de son étude que je qualifierai de géniale, puisque personne avant lui n'avait pensé à rechercher ce qui restait du passé du bâtiment.

    Notule d’histoire

    L’hôtel de Ville de Châtillon sur Seine (2)

     

    A la Révolution, le 12 messidor an V, la maison conventuelle des Bénédictines fut acquise par Etienne Ligerot. Ce dernier revendit très vite cette propriété à Louis-Toussaint Estienne, négociant drapier. En 1819, celui-ci la revendit à Robert Royère, de Dijon.

    A cette époque, le rez-de-chaussée était divisé en 8 ou 9 pièces, le premier en 9 pièces et le second en 20 pièces. C’est à ce moment que la municipalité, mal installée dans l’ancienne abbaye des Carmélites, songea à l’acheter pour s’y installer avec, en plus, la sous-préfecture, le tribunal de première instance et ceux de commerce et de justice de paix, ainsi que la gendarmerie ; on pouvait même y établir, dans tout le rez-de-chaussée, une maison de détention. Cet achat fut approuvé par le roi Louis XVIII. Mais le conseil d’arrondissement changea d’avis, ne souhaitant y mettre que la mairie et la sous-préfecture.

    Finalement, après un nouveau projet et des échanges de bâtiments, l’ancien couvent fut acheté  le 13 mars 1820, mais Robert Royère eut du mal à se faire payer ; le préfet décida alors que les communes de l’arrondissement de Châtillon aideraient la ville de Châtillon à rembourser l’achat (certaines communes attendront jusqu’à 1846 pour être remboursées).

    L'Histoire de l'Hôtel de Ville de Châtillon sur Seine (deuxième partie) racontée par Dominique Masson

    L'Histoire de l'Hôtel de Ville de Châtillon sur Seine (deuxième partie) racontée par Dominique Masson

    L'Histoire de l'Hôtel de Ville de Châtillon sur Seine (deuxième partie) racontée par Dominique Masson

    Lors de l’achat, en 1821, un mur longeait la façade est, séparant la cour d’honneur devant l’abbaye du potager, le long de la Seine.

    Entre celle-ci et le bâtiment de l’abbaye se trouvait un vivier. La rue des Bénédictines, au nord, était étroite et bordée par les remises et dépendances.                               

    Hôtel de Ville et sous-préfecture s’installèrent dans ces bâtiments, mais la répartition des locaux fut quelque peu difficile. Si le sous-préfet eut un appartement en 1822, il dut attendre 1823 pour avoir une salle à manger, car celle-ci faisait partie du lot de la ville et le maire lui en refusait la location, car elle était louée à un maître de dessin.

    La place devant la mairie/sous-préfecture était assez restreinte, une allée avec des rangées d’arbres faisait partie de l’ancienne abbaye.

    De 1809 à 1823, la Ville réussit à acheter des terrains pour agrandir cette place.

    Mais la coexistence entre mairie et sous-préfecture continuait à être un peu compliquée, ils avaient par exemple le même perron comme entrée. Sur le plan de 1825, on voit un petit perron au bout de l’aile ouest, peut-être pour desservir uniquement la mairie.

    Le maréchal Marmont forma alors le projet de diviser le champ qui lui appartient, près la promenade du Cours- l’Abbé, en diverses portions, sur lesquelles des maisons doivent être construites…Pour favoriser l’exécution de ce projet, dont l’utilité est généralement sentie, il importait d’établir une communication facile entre la Place publique, sise au centre de la Ville, et au devant des Hôtels de la Mairie et de la Sous- Préfecture, et le terrain où l’on commence de bâtir, lequel doit former le nouveau quartier…Cette communication ne pouvait se réaliser, qu’en coupant une partie des remises et écuries, qui dépendent de l’Hôtel de Ville et de celui de la Sous- Préfecture, ce qui occasionnerait des frais assez considérables,  pour ne présenter encore, après la reconstruction, qu’un aspect tout à fait difforme…

    L'Histoire de l'Hôtel de Ville de Châtillon sur Seine (deuxième partie) racontée par Dominique Masson

    Sur un plan, non daté, on voit que la sous-préfecture possède, selon le partage de 1822,  écurie et basse-cour (entre les lettres E, G, H et J), ainsi qu’une partie de jardin derrière le bâtiment principal (entre B, C, D, E et F) diminuant largement le jardin public.

    Aussi, en 1826, le conseil municipal fut d’avis de proposer d’échanger cette parcelle, contenant10 ares 70 centiares, contre le terrain le long de la Seine, contenant 11 ares 20 centiares.  

    En outre, la mairie s’engageait à clore de murs cette partie de jardin et construire  à l’extrémité bordant la rivière, un remise percée de deux arcades ; une écurie pour y placer quatre chevaux et un petit escalier pour la desserte du fenil, éclairé par trois fenêtres, qui régnera sur les remise et écurie ; ensuite, dans le même prolongement et en contigüité… une petite basse cour avec un tect à porc et poulailler au dessus. La partie entre le bâtiment de l’abbaye et la Seine devint le jardin privé de la sous-préfecture, séparé de la cour d’honneur par un mur. 

    L'Histoire de l'Hôtel de Ville de Châtillon sur Seine (deuxième partie) racontée par Dominique Masson

    L'Histoire de l'Hôtel de Ville de Châtillon sur Seine (deuxième partie) racontée par Dominique Masson

    L'Histoire de l'Hôtel de Ville de Châtillon sur Seine (deuxième partie) racontée par Dominique Masson

    En même temps, en 1826, dans le cadre de l’aménagement du nouveau quartier décidé  par le maréchal Marmont, l’étroite rue des Bénédictines fut remplacée par une large voie (actuelle rue Président Carnot).

    Le conseil municipal décida alors de modifier la façade de l’Hôtel de Ville qui donnait sur la rue élargie en y ajoutant, le long de celle-ci,  une galerie qui conduisait à une nouvelle porte d’entrée, encadrée de colonnes.

    Sous-préfecture et mairie eurent ainsi chacune leur entrée séparée. La place fut également agrandie par le déplacement des grilles ; un muret surmonté de grilles fut construit au raz du bâtiment de l’hôtel de ville.

    L'Histoire de l'Hôtel de Ville de Châtillon sur Seine (deuxième partie) racontée par Dominique Masson

    L'Histoire de l'Hôtel de Ville de Châtillon sur Seine (deuxième partie) racontée par Dominique Masson

    Cette galerie est faite avec de grosses dalles en pierre, reposant, côté bâtiment, sur le boudin recreusé et, de l’autre, sur un entablement en pierre,  soutenu par des colonnes doriques

    L'Histoire de l'Hôtel de Ville de Châtillon sur Seine (deuxième partie) racontée par Dominique Masson

    L'Histoire de l'Hôtel de Ville de Châtillon sur Seine (deuxième partie) racontée par Dominique Masson

    Pour soutenir le poids de ces colonnes encadrant la nouvelle entrée, deux corbeaux en pierre furent installés dans le mur, sous les dalles,  mais invisibles extérieurement.

    L'Histoire de l'Hôtel de Ville de Châtillon sur Seine (deuxième partie) racontée par Dominique Masson

    L'Histoire de l'Hôtel de Ville de Châtillon sur Seine (deuxième partie) racontée par Dominique Masson

    Quatre bornes en pierre ont été placées, deux au bas de l’escalier et deux sous la galerie ; ces dernières entaillent un peu le socle en pierre et elles sont tronquées à l’arrière car, à la fin du XIXe  et au début du XXe siècle, le dessous du perron était fermé par des panneaux.

    Auparavant, selon Jean Lagorgette (le Châtillonnais et l’Auxois du 27 février 1937), il aurait existé une auberge au moins jusqu’à 1835 et Alexandre Dumas y aurait fait faire une halte à la diligence (Les Compagnons de Jéhu ?), avant d’être attaquée au goulet de la Gloire-Dieu.

    Plus tard, dans le réduit situé à gauche du perron, l’appariteur Choucroute Maréchaux (célèbre par son apostrophe : Madame, vous sentez la betterave !) tint son office de barbier-coiffeur.

    L'Histoire de l'Hôtel de Ville de Châtillon sur Seine (deuxième partie) racontée par Dominique Masson

    L'Histoire de l'Hôtel de Ville de Châtillon sur Seine (deuxième partie) racontée par Dominique Masson

    L'Histoire de l'Hôtel de Ville de Châtillon sur Seine (deuxième partie) racontée par Dominique Masson

    L'Histoire de l'Hôtel de Ville de Châtillon sur Seine (deuxième partie) racontée par Dominique Masson

    Le rez-de-chaussée du bâtiment, en partie enterré, a été en partie masqué par cette galerie, et les ouvertures largement modifiées.

    Tout le rez-de-chaussée de l’abbaye, côté extérieur comme côté intérieur, présente un fruit, c’est-à-dire une diminution de l’épaisseur qu’on donne à un mur au fur et à mesure que l’on s’élève, ceci pour pouvoir supporter le poids des étages supérieurs.

    En outre, les pierres sont en général choisies en calcaire plus dur. Selon certains écrits, une boutique aurait existé sous cette galerie, au XIXe siècle.

    L'Histoire de l'Hôtel de Ville de Châtillon sur Seine (deuxième partie) racontée par Dominique Masson

    Deux chaînages  horizontaux courent sous les onze fenêtres du premier étage, mais il y a eu ouverture de portes (deux aux extrémités et la porte centrale) et certaines irrégularités.

    Au nord, après la porte, un chaînage vertical descend sous la fenêtre ; à l’étage inférieur, le boudin manque. Sous la fenêtre suivante, le chaînage vertical descend lui aussi à l’étage inférieur et l’encadrement est encore visible dans le soubassement. A l’ouest, existe également un chaînage vertical, mais le boudin en dessous court tout le long du mur.

    L'Histoire de l'Hôtel de Ville de Châtillon sur Seine (deuxième partie) racontée par Dominique Masson

    L'Histoire de l'Hôtel de Ville de Châtillon sur Seine (deuxième partie) racontée par Dominique Masson

    L'Histoire de l'Hôtel de Ville de Châtillon sur Seine (deuxième partie) racontée par Dominique Masson

    Aux onze fenêtres du premier étage correspondent onze autres fenêtres au second étage, avec un chaînage entre le premier et le second étage et dessous et dessus  les fenêtres du second étage. Enfin, au niveau des combles existent cinq lucarnes, avec des frontons triangulaires aux deux extrémités et au centre, encadrant deux lucarnes aux frontons en demi-cercles.

    Comme pour toutes les lucarnes, les moulures entrant dans le toit sont en bois.

    La mairie voulut avoir une salle de spectacle.

    Elle fut prévue en 1826 le long de la Seine, contre le jardin de la sous-préfecture. Puis, finalement, on décida d’en créer une à l’intérieur même de la mairie.

    Alors que la grande salle de l’hôtel de ville se trouvait à droite en entrant, la nouvelle salle sera à la place du bureau de la mairie, du cabinet du maire et d’un escalier.

    Ceci fut réalisé en 1832-1833, sur les plans de l’architecte voyer S. Tridon, modifiés par Roze, architecte à Châtillon.

    L'Histoire de l'Hôtel de Ville de Châtillon sur Seine (deuxième partie) racontée par Dominique Masson

    La municipalité avait contacté Etienne Bouhot pour exécuter la décoration de la salle de spectacle en construction. Dans une lettre datée du 26 août 1832, son fils Auguste lui écrivait : Il faudrait d’abord que cela ne nuisit en rien aux travaux du panorama[1] qui seraient peut-être plus avantageux et ensuite maman me suggère une réflexion qui me semble parfaitement juste. C’est que pour faire une pareille entreprise, il faut beaucoup de fonds pour les avances… Il paraît que les Châtillonnais aiment mieux la quantité que la qualité et qu’il leur faudrait pour 20 pistoles des tableaux de 15 pieds carrés. Amateurs !...   

    Finalement, c’est l’architecte Roze qui fera les peintures décoratives de la salle de spectacle.                

    A la place prévue avant pour la salle de spectacle, furent construites des halles neuves, les anciennes étant de l’autre côté de la Seine (halles au blé).

     [1] Il doit s’agir du panorama  d’Alger, alors fermé pour travaux, et sur lequel Bouhot effectue alors des réparations ; à la même époque, la municipalité lui refusa l’achat de deux tableaux, destinés à la bibliothèque, car jugés trop petits ; « Etienne Bouhot, 1780-1862 » ; catalogue d’exposition à Semur ; Marmagne, 2001

    L'Histoire de l'Hôtel de Ville de Châtillon sur Seine (deuxième partie) racontée par Dominique Masson

    On trouve également quelque dissymétrie sur la façade nord-est, côté jardin.

    Au rez-de-chaussée, le sous-bassement en grosses pierres est percé de huit ouvertures, avec un puits sous l’une des fenêtres.

    Un chaînage court sous les dix fenêtres du premier étage, mais les ouvertures ne sont pas espacées régulièrement. Ceci se retrouve à l’étage supérieur, avec aussi dix ouvertures, au dessus de celles du premier étage. Les chaînages existant côté rue Carnot se continuent sur cette façade.

    L'Histoire de l'Hôtel de Ville de Châtillon sur Seine (deuxième partie) racontée par Dominique Masson

    L'Histoire de l'Hôtel de Ville de Châtillon sur Seine (deuxième partie) racontée par Dominique Masson

    Afin de consolider l’édifice, des tiges métalliques, des tirants, ont été installées, aussi bien côté sud que côté nord, afin de mieux assurer les efforts de traction ; chaque bout est lié à une ancre, qui peut avoir plusieurs formes. 

    Au niveau des combles, on retrouve cinq lucarnes, possédant alternativement des frontons triangulaires et des demi-cercles, mais la dernière ouverture, près de l’angle nord, est particulière ; plus imposante, elle a dans sa partie supérieure un crochet, auquel on devait pouvoir mettre une poulie, afin de monter autrefois des objets et sa partie inférieure était plus basse, coupant le chaînage.

    L'Histoire de l'Hôtel de Ville de Châtillon sur Seine (deuxième partie) racontée par Dominique Masson

    L'Histoire de l'Hôtel de Ville de Châtillon sur Seine (deuxième partie) racontée par Dominique Masson

    A l’autre extrémité, à l’est, se voit encore un œil de bœuf, éclairant autrefois la cage d’escalier.

    L'Histoire de l'Hôtel de Ville de Châtillon sur Seine (deuxième partie) racontée par Dominique Masson

    A l’époque de l’abbaye, il n’y avait aucune construction entre les bâtiments et la Seine, mais seulement un vivier.

    Puis, au milieu du XIXe siècle, il n’y eut que le jardin de la sous-préfecture, avec une petite remise construite le long de la Seine ; une porte faisait communiquer les deux endroits.

    L'Histoire de l'Hôtel de Ville de Châtillon sur Seine (deuxième partie) racontée par Dominique Masson

    L'Histoire de l'Hôtel de Ville de Châtillon sur Seine (deuxième partie) racontée par Dominique Masson

    Puis, sur une carte postale, apparaît un petit bâtiment, sans étage, non accolé à la sous-préfecture.

    Ensuite, sur d’autres, c’est un bâtiment à étage, un chaînage soulignant le passage entre le rez-de-chaussée et le premier étage.

    Côté jardin de la mairie, un espace construit (avec une porte et une petite ouverture), relie les deux bâtiments.

    Ultérieurement, un étage fut rajouté, harmonisé avec ce qui avait déjà été construit (mêmes ouvertures, continuation du chaînage), mais il y a un petit décalage vertical entre les deux, de quelques dizaines de centimètres (à cause du fruit).  

    Après la suppression de la sous-préfecture, ce petit bâtiment dut être loué à des particuliers. Il y eut alors un portail percé dans le mur, pour communiquer directement avec la place.

    L'Histoire de l'Hôtel de Ville de Châtillon sur Seine (deuxième partie) racontée par Dominique Masson

    L'Histoire de l'Hôtel de Ville de Châtillon sur Seine (deuxième partie) racontée par Dominique Masson

    L'Histoire de l'Hôtel de Ville de Châtillon sur Seine (deuxième partie) racontée par Dominique Masson

    L'Histoire de l'Hôtel de Ville de Châtillon sur Seine (deuxième partie) racontée par Dominique Masson

    L'Histoire de l'Hôtel de Ville de Châtillon sur Seine (deuxième partie) racontée par Dominique Masson

    Aujourd’hui les deux bâtiments ont été réunis pour les services de la mairie, mais il y a  quelques marches assez raides à l’intérieur pour passer d’un bâtiment à l’autre.

    L'Histoire de l'Hôtel de Ville de Châtillon sur Seine (deuxième partie) racontée par Dominique Masson

    A l’extrémité est de ce bâtiment, existaient une porte et un petit œil de bœuf, mais aucune ouverture au dessus du chaînage.

    L'Histoire de l'Hôtel de Ville de Châtillon sur Seine (deuxième partie) racontée par Dominique Masson

    L'Histoire de l'Hôtel de Ville de Châtillon sur Seine (deuxième partie) racontée par Dominique Masson

    L'Histoire de l'Hôtel de Ville de Châtillon sur Seine (deuxième partie) racontée par Dominique Masson

     Encore merci à Dominique Masson qui me permet de publier ses études passionnantes sur la ville de  Châtillon sur Seine, et sur le Châtillonnais, c'est un grand honneur pour ce blog.


  • Commentaires

    2
    NG 21/52
    Samedi 13 Juillet 2019 à 20:48

    Merci Monsieur pour toutes ces explications. Merci également de nous transmettre votre savoir. Ainsi qu'à vous Madame la blogueuse. Bien cordialement

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    1
    mages
    Samedi 13 Juillet 2019 à 10:29

    Beau travail de recherche;Belles photos prisent pendant les travaux

    Merci Dominique pour votre travail

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