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"La sidérurgie en Châtillonnais", une conférence de Paul Benoît, proposée par Les Amis du Musée
Dans le Châtillonnais et le Monbardois voisin, pays où le minerai de fer, le bois et l’eau abondaient, le Moyen Age et la Renaissance ont tenu une place toute particulière dans l’évolution de la sidérurgie.
Cette étude du fer dans le nord Côte d'Or au Moyen-Âge, c'était le thème de l'exposé que Paul Benoît a présenté au Musée du Châtillonnais-Trésor de Vix, devant de nombreux auditeurs
Robert Fries a présenté le conférencier.
Paul Benoît, professeur émérite au LAMOP, université de Paris I, est spécialiste de l’histoire et l’archéologie des Techniques du Moyen-Âge.
On voit sur cette carte du Centre Est de la France, que l'industrie de fer était fort présente au Moyen Âge, pour deux raisons : la présence de minerai de fer et l'abondance des forêts.
Les trois sites étudiés par Paul Benoît ont été Minot, Fontenay et La Chaume.
Du minerai de fer :
Les mineurs devaient aller extraire le minerai...en rampant !
Le combustible utilisé au MoyenÂge dans les "bas-fourneaux" puis plustard dans les "hauts-fourneaux" était du charbon de bois, Il fallait donc construire et calciner des meules.
Un bas fourneau reconstitué...
La combustion dans le bas fourneau :
Dans le bas du fourneau s'accumulait un solide spongieux, composé de métal et de scorie, que l'on appelle « loupe ».
La loupe devait être martelée sur une enclume pour en faire partir les scories.
La loupe était nettoyée puis ensuite corroyée, par martelage répété, afin de retirer la scorie et de rendre le métal homogène. Il restait quand même des inclusions de scories dans la matrice métallique.
Le bas fourneau nécessitait beaucoup d'énergie humaine pour l'épuration, le compactage, la mise en forme. Dans un village, comme ici à La Chaume, une grande partie des habitants était au service de l'industrie du fer.
En 1334, il y avait à La Chaume : 183 tenanciers de l'évêque et 117 autres chefs de famille. Le village comptait 1500 habitants, il en compte actuellement moins de 200.
La grande innovation suivante fut l'invention du marteau hydraulique.
Alors que les techniques de transformation du minerai en fer n'avaient guère changé depuis plus de deux millénaires, au XIIe siècle une innovation décisive apparaît, le marteau hydraulique qui permettait de transformer la loupe sortie du bas fourneau en barres de fer ou en tôles
L'apparition du marteau hydraulique favorisa la diffusion du fer dans toute l'Europe et en particulier dans les campagnes.
Principe de la forge hydraulique :
La forge hydraulique de Fontenay est mue par l'eau...
La roue à aube entraîne le marteau.
La force de la machine remplace celle de l'homme, on a la possibilité d'avoir un marteau très lourd (50 à 100 kg), la frappe est rapide, les pièces forgées sont volumineuses, le fer est de meilleure qualité et les quantités de produits sont augmentées.
(Henri Bles: paysage avec forge)
Saviez vous que les cathédrales construites au Moyen Âge , comprenaient des partes métalliques ? on voit ici des barres de fer soutenant les piliers de la cathédrale de Florence.
Des barres de fer soutenaient aussi les vitraux. On y voit les traces du martelage.
Cette barre de fer du XIIIème siècle mesure quatre mètres de long. Le fer produit par l'utilisation du charbon de bois était d'excellente qualité, il résistait mieux à l'oxydation, contrairement à celui produit à l'aide de coke, procédé que l'on utilisera à l'ère de la révolution industrielle..
Le fer produit servait à de multiples usages :
A la fin du Moyen Age se développe une seconde innovation, utilisant toujours la force de l’eau ; la mécanisation s’applique à la soufflerie donnant naissance à un nouveau type d’appareil, le haut fourneau. Il produit de la fonte, alliage de fer et de carbone qu’il faut ensuite affiner pour obtenir du fer.
La fonte produite contiendra de 2,1 à 6,67 %de carbone, l'acier 0,025 à 2,1% de carbone. En dessous de 0,025 % de carbone on parle de fers industriels.
Les forges étaient très nombreuses en Haute Côte d'Or au Moyen Âge, elles appartenaient très souvent au Clergé.
A La Chaume, seulement cinq hommes de l'évêque étaient tenanciers d'une mine, c'étaient toujours des paysans possédant d'autres pièces de terre.La redevance payée à l'évêque par ces tenanciers était de 3 deniers et une mesure d'avoine. Les revenus de la forge épiscopale se montaient à 15 livres ou 3600 deniers.
Hélas, la révolution industrielle, avec l'utilisation du charbon (coke) comme combustible à la place du charbon de bois, vit la mort de l'industrie du fer dans notre région.
On peut encore voir des témoins de cette industrie du fer dans le Châtillonnais et le Montbardois comme le haut fourneau de Marcenay, la forge d'Ampilly le Sec, les deux forges de Rochefort sur Brevon, la forge de Buffon et surtout celle de l'Abbaye de Fontenay, reconstituée et qui fonctionne à certaines périodes . Un magnifique spectacle à ne pas manquer !
Paul Benoît fut beaucoup applaudi pour son exposé passionnant, il répondit ensuite, fort affablement, aux questions des auditeurs.
(Des commentaires sur le thème de l'article seront les bienvenus, ils me montreront que ce blog vous intéresse et ils me donneront envie de continuer à l'alimenter .
Merci.)
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Commentaires
en Puisaye il y eut de nombreuses forges à fer installées sur des cours d'eau ou sur des digues d'étang; on ne trouvait plus de minerai(?) de sorte qu'on a utilisé du fer de récupération (vieux outils);plusieurs doc. d'archives écrites à ce sujet; on suit d'évolution depuis le XVIe jusqu'à la Révolution et au-delà; le travail du fer est très ancien si on en juge par l'abondance de scories accumulées dans les bois;