• Les applications cryogéniques de l'hydrogène et de l'hélium dans la recherche et l'industrie contemporaines, par Christian Gianese

    Christian Gianese est responsable du centre de liquéfaction hélium au CNRS de Grenoble. A l'invitation des Amis du Châtillonnais et de la famille de Louis Cailletet, il est venu nous parler des applications cryogéniques de l'hydrogène et de l'hélium dans la recherche et l'industrie contemporaine.

    Les applications cryogéniques de l'hydrogène et de l'hélium dans la recherche et l'industrie contemporaines, par M.Gianese

    Monsieur Gianese a commencé son exposé par l'évocation de la notion de température qui a été très longtemps aléatoire. Le premier thermomètre fut inventé par Galilée, utilisé par Santorio de Padoue, puis amélioré par Ferdinand II de Sicile qui utilisa l'alcool dans un réservoir.

    Fahrenheit décida de définir une échelle au moyen de deux températures de référence: une température basse, qui fut la plus basse qu’il ait mesurée durant le rude hiver de 1708 à 1709 dans sa ville natale de Danzig. Plus tard, en laboratoire, il atteignit cette température lors de la solidification d’un mélange d’un volume égal de chlorure d’ammonium et d’eau. Pour la  température haute, il utilisa celle du sang du cheval "sain"..

    Celsius pensa utiliser  un seul point fixe de 0 °C, température de fusion de l’eau au niveau de la mer. Pour la température la plus haute, il utilisa celle de l'ébullition de l’eau à 100 degrés.

    Les applications cryogéniques de l'hydrogène et de l'hélium dans la recherche et l'industrie contemporaines, par M.Gianese

    Plus la température est élevée, plus l'agitation des molécules ou des ions est importante.

    A force de refroidir la matière, on peut arriver à l'immobilité presque totale des atomes, des ions et des molécules, c'est ce qu'on appelle le zéro absolu, qui, sur l'échelle de Celsius, équivaut à -273,15°.

    Paradoxalement, au dessous du zéro absolu, il peut exister des températures négatives plus chaudes que n'importe quelle température positive !

    Les applications cryogéniques de l'hydrogène et de l'hélium dans la recherche et l'industrie contemporaines, par M.Gianese

    Christian Gianese est responsable au CNRS du centre de liquéfaction de l'hélium. Il a donc poursuivi son exposé  en évoquant ce gaz. (Le texte qui suit est tiré du site de l'Institut Néel de Grenoble)

    D’ou provient l’hélium ?

    Après l’hydrogène, l’hélium 4 est l’élément le plus abondant dans l’univers.
    La grande majorité de l’hélium a été formé dans les minutes qui ont suivi le Big Bang. Lors des premiers instants de l’univers, grâce à la chaleur de l’ordre du milliard de degrés, des atomes légers dont l’hélium, se seraient formés par les interactions de particules élémentaires.
    La mesure de son abondance contribue d’ailleurs à fixer certains paramètres des modèles cosmologiques. Dans la majeure partie de l’existence des étoiles, il est formé par la fusion nucléaire de l’hydrogène.
    Mais, paradoxalement, dans notre atmosphère terrestre, l’hélium est très rare. Sa concentration n’est que de 5,2×10-6 en volume. Presque tout l’hélium sur Terre provient de la désintégration de minéraux radioactifs composés d’uranium et de thorium, comme la pechblende (le minerai qui permit à Marie Curie de découvrir le polonium et le radium).
    L’hélium est extrait des gisements de gaz naturel où il est emprisonné par des couches de roche imperméable. On extrait l’hélium à partir de ces nappes "riches" en hélium. Sa concentration en volume par rapport au gaz naturel varie de quelques parties par million à une concentration de quelques pourcents.
    Les plus grands producteurs d’hélium sont donc les pays exploitant le gaz naturel comme les États-Unis, l’Algérie, le Qatar, la Russie, la Pologne….

    Un peu d’histoire

    Le 16 août 1868, c’est lors d’une éclipse totale, à Guntur, en Inde, que Jules Janssen, astronome français qui étudie le rayonnement solaire, observe une raie jaune brillante dans le spectre de la chromosphère du soleil. On pense alors que cette raie est celle du sodium. Mais le 20 octobre de la même année, l’astronome anglais Norman Lockyer qui observe également cette raie jaune, en conclut qu’elle est provoquée par un élément inconnu sur Terre. Il nomme alors cet élément hélium, d’après le terme grec hélios qui désigne le soleil.
    Ce n’est que près de 30 ans plus tard, en 1895, que le chimiste britannique William Ramsay isole l’hélium dans la clévéite, un minerai à base d’uranium. En observant au spectroscope le spectre émis par ce gaz inconnu, il réalise qu’il vient de découvrir le même élément que celui produit par le Soleil.
    En 1903, après un forage pétrolier à Dexter, dans le Kansas, stupeur … le jet de gaz est incombustible ! Erasmus Haworth, géologue de l’Etat du Kansas constate que ce jet de gaz contient seulement 16 % de méthane mais, il repère surtout, un gaz non identifiable. En procédant à une analyse plus poussée, il montre que près de 2% de l’échantillon de ce gaz est de l’hélium. Cette « découverte » démontre pour la première fois que l’hélium est disponible pour la production, comme sous produit de l’exploitation du gaz naturel.

    Les applications cryogéniques de l'hydrogène et de l'hélium dans la recherche et l'industrie contemporaines, par M.Gianese

    Pour utiliser l'hélium, il faut le liquéfier, suit donc une petite histoire de la liquéfaction des gaz :

    La liquéfaction de l’air:

    Louis Paul Cailletet réussit, le 2 décembre 1877 à condenser quelques gouttes d’oxygène, à l’aide d’une machine de son invention.

    (Compression, refroidissement du gaz et enfin détente brusque : détente de Joule Thomson).

    Le 31 décembre, il annonce la condensation de l’azote, par le même procédé.

    Pratiquement au même moment, le physicien Suisse, Raoul Pictet, obtient, le 22 décembre de la même année, de l’oxygène liquide en employant une autre méthode. Il réussit à provoquer une condensation en utilisant des étages de refroidissement progressifs à l’aide de différents gaz liquéfiés ou solidifiés et après avoir comprimé puis refroidit et enfin détendu son oxygène.

     Le fait important c’est que Pictet a atteint le même but que Cailletet mais par une méthode différente qui, par la suite, a été appelée méthode de liquéfaction en cascade et a longtemps été utilisée pour l’obtention d’hydrogène et d’hélium liquide jusqu’au début des années 1970.

     La liquéfaction de l’’hydrogène:

    James Dewar, qui vient de mettre au point un récipient qui permet de conserver les fluides cryogéniques, tente dés 1885 la liquéfaction de l’hydrogène.

    Aprés plusieurs essais infructueux, il réussit enfin, le 10 mai 1898 à liquéfier 20 centimètres cubes d’hydrogène.

    L’année suivante, il obtint la solidification de l’hydrogène à 15 K par abaissement de la pression au-dessus d’un bain de liquide.

    Dewar s’attaque bientôt au dernier stade de l’obtention des très basses températures : la liquéfaction de l’hélium.

     La liquéfaction de l’hélium:

    Dewar s’attaqua au problème dès 1901 mais n’a jamais réussi à liquéfier l’hélium.

    C’est le 10 juillet 1908. que Kamerlingh Onnes réussit à obtenir 60 centimètre cube d’hélium liquide, grace à son installation au Laboratoire de Leyde, au Pays Bas.

    Il écrit à ce sujet :

    " Cet essai effleurait les limites du possible. Il a commencé à 6heures du matin et était terminé à 9heures 30 du soir. A 6h30 du soir, quand nous avons vu pour la première fois l’hélium liquéfié, chacun de nous était à bout de forces .... Quand ce liquide presque immatériel s’est montré, ce fut un spectale merveilleux. Nous ne nous en sommes pas aperçu dès le début ; nous n’avons constaté sa présence qu’au moment où le verre se remplissait. Sa surface se détachait du verre comme un couteau".

     

    Les applications cryogéniques de l'hydrogène et de l'hélium dans la recherche et l'industrie contemporaines, par M.Gianese

    L'hélium est un gaz incolore, inodore et non toxique

    Presque tout l'hélium sur Terre provient de la radioactivité.

    On le trouve principalement dans les composés d'uranium et de thorium.

    Comme l'hélium est piégé, comme le gaz naturel, par les couches de roches imperméables, on trouve les plus hautes concentrations d'hélium dans les gisements de gaz naturel, d'où l'on extrait la plupart de l'hélium commercial.

    En 2005, environ 160 millions de m3 d'hélium ont été extraits du gaz naturel, ou puisés dans les réserves, avec environ 83 % des États-Unis, 11 % d'Algérie et le reste principalement de Russie et de Pologne. Aux États-Unis, la plupart de l'hélium est extrait du gaz naturel de Hugoton et des gisements voisins du Kansas, de l'Oklahoma et du Texas.

    Les applications cryogéniques de l'hydrogène et de l'hélium dans la recherche et l'industrie contemporaines, par M.Gianese

    L'hélium, du fait de sa rareté est un gaz très cher, et c'est le gaz le plus difficile à liquéfier, il se liquéfie à -269° Celsius.

    Utilisations industrielles et scientifiques

    L'hélium est utilisé comme atmosphère protectrice lors de la croissance du silicium monocristallin destiné à la fabrication de circuits intégrés et des fibres optiques, pour la production de titane et de zirconium, et en chromatographie en phase gazeuse, parce qu'il est inerte. Vu son inertie chimique, ses propriétés thermodynamiques et calorifiques idéales, sa vitesse du son élevée et un grand coefficient de Laplace, il est également utile dans les souffleries supersoniques ou pour les installations d'étude de phénomènes transitoires.

    Grâce à sa très faible température d'ébullition (-269 °C ), proche du zéro absolu (273,15 °C), l'hélium est utilisé pour refroidir les aimants supraconducteurs, et est utilisé comme fluide cryogènique pour les aimants des appareils de IRM, de RMN ou de RPE.

    L'hélium en mélange avec un gaz plus lourd, comme le xénon, est utile pour la réfrigération thermoacoustique, en raison du grand rapport des capacités thermiques et du faible nombre de Prandtl. L'inertie chimique de l'hélium a des avantages environnementaux sur d'autres systèmes de réfrigération, qui contribuent au trou d'ozone ou au réchauffement climatique.

    Comme il diffuse à travers les solides trois fois plus vite que l'air, l'hélium est utilisé pour détecter les fuites dans les équipements à ultravide ou les réservoirs à haute pression.

    En raison de son caractère inerte, sa grande conductivité thermique, sa transparence aux neutrons et parce qu'il ne forme pas d'isotope radioactifs au sein des réacteurs, on utilise l'hélium comme fluide de transfert de chaleur dans certains réacteurs nucléaires refroidis au gaz.

    Il est utilisé dans les lasers hélium-néon.

    Utilisations alimentaires et médicales :

    Il est utilisé avec des produits alimentaires (additif alimentaire autorisé par l'Union européenne sous la référence E939) pour permettre une vérification de l'étanchéité de l'emballage.

    Utilisation thérapeutique: l'hélium est administré dans des mélanges contenant un minimum de 20 % de dioxygène, à des patients aux prises avec une obstruction des voies respiratoires supérieures ou inférieures. La faible viscosité de l'hélium permet ainsi de diminuer le travail respiratoire.

    En raison de sa faible solubilité dans le tissu nerveux, on utilise des mélanges d'hélium tels que le trimix, l'héliox et l'héliair pour la plongée profonde, afin de réduire les effets de la narcose à l'azote. Aux profondeurs supérieures à 150 m, de petites quantités d'hydrogène sont ajoutées au mélange hélium-dioxygène pour contrebalancer le syndrome nerveux des hautes pressions. À ces profondeurs, la faible densité de l'hélium diminue considérablement l'effort respiratoire.

    Autres utilisations :

    Comme l'hélium est plus léger que l'air, il peut être utilisé pour gonfler des dirigeables et des ballons libres ou captifs. Bien que l'hydrogène ait une force portante approximativement 7 % supérieure, l'hélium a l'avantage d'être incombustible (et même ignifuge).
    Le réservoir d'oxygène de la nouvelle génération de lanceurs Ariane 5 est pressurisé par un sous-système d'hélium liquide.

    (source pravarini.free.fr)

    Pour clôre les deux conférences, Jean-Yves Thonnelier et Christian Gianese ont ensuite répondu aux questions du public.

    Les applications cryogéniques de l'hydrogène et de l'hélium dans la recherche et l'industrie contemporaines, par M.Gianese

    Les applications cryogéniques de l'hydrogène et de l'hélium dans la recherche et l'industrie contemporaines, par M.Gianese

    François Darbois a félicité Jean-Yves Thonnelier et Christian Gianese pour leurs si intéressants exposés, il a remercié les Amis du Châtillonnais et la ville de Châtillon sur Seine, d'avoir si bien organisé les manifestations du centenaire de la mort de Louis Cailletet Il a émis le vœu de voir la Communauté de Communes, le musée et les enseignants du lycée, sensibiliser la jeunesse à la science, à la recherche et à l'esprit d'entreprise.

    Les applications cryogéniques de l'hydrogène et de l'hélium dans la recherche et l'industrie contemporaines, par M.Gianese

    Voici les panneaux de l'Institut Néel de Grenoble, qui se trouvaient dans l'exposition salle des Bénédictines :

    Les applications cryogéniques de l'hydrogène et de l'hélium dans la recherche et l'industrie contemporaines, par M.Gianese

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  • Commentaires

    1
    hitch
    Vendredi 25 Octobre 2013 à 10:50

    bonjour, je suis étudiant en cryogénie  j'aimerai bien que vous m'orienter vers un sujet de recherche dans ce domaine , qu'il soit de préférence d'actualité , a vrai dire je suis titulaire d'un master cryogénie j'aimerai faire une thèse , jai fais un projet intitulé : production d'hydrogène et purification avec le PSA (pressure swing Adsorption) et ca me passionte tellement les sujet sur l'hydrogène...... j'aimerai bien que vous m'orienter vers un sujet parce que je manque de motivations en ce moments. 

    merci.

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