• Jean Ponsignon a fait don de plusieurs documents aux Archives de la Ville de Châtillon sur Seine

    Jean Ponsignon a fait don de plusieurs documents  aux Archives de la Ville de Châtillon sur Seine

    D’où viennent ces documents ?

    Ces documents originaux se composent de :

    • 35 lettres de correspondance privée
    • 35 correspondances officielles
    • 12 documents de service militaire
    • 10 documents successoraux.
    • Quelques documents divers

    Pourquoi un (et même 4 livres) ?

    Un bref exposé en 3 parties :

    • Quelques extraits de lettres choisies (non censurées)
    • Lettres d’amour
    • Un curieux rapport helvète

    Contenu des 3 autres livres

     

    Carrière militaire de Laurent Jourdain

    Né en 1771 et mort en 1849

    • 1791 - Soldat au 48ème régiment d’infanterie actuellement 62ème à Rennes
    • 1792 – départ pour l’Allemagne : Landau – Spire – Worms – Mayence – Weissemburg – Strasbourg – le Palatinat
    • 1793 - caporal fourrier le 6 janvier
    • Fait les campagnes de 1792, 1793, an 2, - sergent le 26 brumaire
    • An 4 (1795), an5 (1796), sous-lieutenant au 25 germinal an6 (1797), an7 (1798) aux armées du Rhin et d’Helvétie (Lucerne) puis au camp de Montreuil
    • En 1800 il est à l’Armée d’Italie
    • An 10 (1801) le 19 vendémiaire lieutenant aide de camp du général de Ste Suzanne
    • An 12 (1803) 29 Messidor capitaine adjoint à l’Etat Major du camp de Montreuil (lors de la nomination du Gal de Ste Suzanne au Sénat)
    • Puis Jourdain est affecté pendant 3 mois au service du général Bruneteau de Ste Suzanne devenu sénateur
    • A la Grande Armée en 1806 – nommé chevalier de la Légion d’honneur
    • 1807 en Prusse et en Pologne - Capitaine aide de camp de Monsieur le général divisionnaire Villate- premier corps de la Grande armée.
    • En 1809 nommé provisoirement à une compagnie dans le 60ème de ligne en Espagne
    • En 1811 en Allemagne adjoint à l’Etat Major à la 3ème division de l’ Armée d’Allemagne et le 20 juillet - Chef de Bataillon au 15ème régiment d’infanterie légère
    • En 1812 en Russie blessé d’un coup de feu au pied à la bataille de la Moskova le 7 septembre
    • 1813 le 6 avril nommé Major au même régiment et officier de la Légion d’honneur
    • 1814 1er octobre radié avec demi solde

    Il a été aimé de la soeur d’un général allemand  qui après l’occupation lui demandera de l’épouser ; ce qu’il refusera. Il meurt à 78 ans à Versailles en 1849.

     

    Rennes le 8 octobre 1791

    Lettre à Monsieur Fourquet , bourgeois

    Rue des Vieilles Thuileries

    N° 52 Faubourg St. Germain A Paris

     Monsieur,

    Quoique votre lettre demande peut-être une longue réponse, cependant comme vous m’assurez que ma mère et vous avez tout oublié, je n’entreprendrai pas encore une fois ma justification. Vous vous efforcez de prouver que j’ai moi-même provoqué les mauvais traitements de ma mère. Je vous proteste que je ne me croirai jamais coupable que de ne les pas avoir supportés avec modération.

    Je me contenterais de relever quelques inexactitudes . Vous dites que j’ai emporté en partant trois culottes neuves. Il était cependant vrai que l’une était peu propre,  l’autre très mauvaise et la troisième, je l’avais achetée. Vous dites que j’ai écrit à mon papa Bertout que vous m’aviez frappé. Cela n’est pas encore très conforme à la vérité. Faites-vous représenter ma lettre et vous y lirez que je ne me plains que de menaces de votre part.

    Quoi qu’il en soit, je suis charmé de l’assurance que vous me donnez des sentiments de ma mère. Le retour de son amitié est pour moi la chose la plus satisfaisante.

    J’avais demandé quelques affaires à Maman, telles que des bas et surtout ma paire de gants dont j’ai un extrême besoin dans ce moment où nous faisons l’exercice par un froid assez rigoureux.

    J’ai l’honneur d’être Monsieur avec la plus parfaite considération,

    Votre très humble et très obéissant serviteur

    Jourdain soldat

    Au 48ème régiment d’infanterie ci-devant Artois

    Compagnie de Sermiselles en garnison à Rennes

    P.S. Il y a en ces jours à Rennes une émeute considérable. Le peuple de cette ville ne ressemble pas à celui de Paris qui renverse les autels des non conformistes. Il veut au contraire qu’on leur ouvre les églises et menace les administrateurs de les forcer. Nous sommes sur pied depuis quelques jours pour réprimer les désordres. Car la Garde Nationale n’est pas assez forte.

    Lettre à la citoyenne Fourquet

    Rue des Vieilles Thuileries

    N° 52 de la rue du petit bacq - Faubourg St. Germain - A Paris

    Au Fort Louis le 14 septembre 1792

    L’an 1er de la République

    Ma chère mère

    Nous partons dans ce moment pour Landau où nous devons attendre des ordres pour rejoindre l’armée de Custines. Malgré la rigueur de la saison qui commence à se faire sentir ici, nous comptons entrer en campagne attendu que l’armée n’entrera pas en quartier d’hyver. Cela est un peu dur mais un républicain n’est pas égoïste ; vous concevez que j’aurai plus besoin que jamais de quelques douceurs, et comme les assignats n’ont pas de cours en Empire, je vous prie de m’envoyer de l’argent que vous imputerez sur mon compte au prix courant. Embrassez pour moi ma sœur s’il vous plait ; je n’ai pas le temps de lui écrire, car déjà les tambours se font entendre. Mes respects à toute la famille. Je suis votre affectionné fils.

    Mayence le 23 septembre 1792

    L’an premier de la République Française

    Ma Chère Mère,

    Ce que j’avais prévu est arrivé. Nous ne sommes restés qu’un jour à Landau et avons  pris sur le champ la route de Spire, Worms et sommes arrivés à Mayence le 21 sans savoir encore si nous y resterons quelque temps. Nous sommes fort mal logés, et pendant que le général Custines repose mollement sur les coussins de l’électeur, nous sommes couchés sur la paille, sans couvertures. Cependant le soldat endure ce désagrément sans murmurer et n’en aime pas moins le général qui est aussi chéri des habitants parcequ’il a pour eux des ménagements excessifs. Cette ville est suberbe, très commerçante, on ne peux mieux batie. Les appartements de Versailles n’approchent pas de la richesse de ceux de l’électeur ; les fortifications sont immenses et il est inconcevable que les habitantsaient ouvert leur porte à une armée de vingt-deux mille hommes. Cela ne peut s’expliquer que par l’amour qu’ils portent aux français, et par leur propention à la liberté.

    Kostheim sous Mayence le 8 février 1793 l’an 2 de la République Française

    Ma Chère Mère

    Nous avons eu le 6 janvier une affaire malheureuse qui nous a coûté 10 hommes, dont 2 caporeaux et j’ai été choisi pour en remplacer un, et je suis maintenant caporal fourier dans la compagnie de Skopetz. Nous continuons à faire un service extrêmement dur, puisque malgré la rigueur de la saison nous bivouaquons et travaillons aux fortifications fort souvent.

    Au camp de Kreutznach, sur les hauteurs de Hunguerichwolf le 25 mars 1793 an 2 de la République

    Ma chère mère

    Nous avons quitté Mayence. Nous en sommes partis le 18 mars à 8 heures du soir, nous avons marché toute la nuit et tout le jour qui l’a suivi par un temps et des chemins abominables. L’ennemi étonné de cette marche précipitée s’est retiré à une certaine distance, mais bientôt revenu  de sa stupeur, il nous a forcé nous-même à faire quelques pas en arrière  et nous sommes campés aujourd’hui près de Kreutznach, petite ville à 10 lieues de Mayence.

    Depuis quelque temps nous ne recevons plus les nouvelles de Paris de manière directe ; il se répand ici des nouvelles assez fâcheuses sur la situation de l’armée de la Belgique ; on dit Liège et Aix la Chapelle au pouvoir de l’ennemi. Je crois qu’il n’en sera pas de même de Mayence et que cette place lui coutera bien cher àacquérir.

    Au camp devant Weissembourg le 5 avril 1793 – an 2 de la République

    Ma Chère Mère

    Ce que j’avais prévu dans ma dernière lettre est malheureusement arrivé. Nous avons été forcés de céder à des forces supérieures, nous avons fait retraite de 30 lieues  ayant toujours l’ennemi sur nos talons ; cependant nous nous sommes retirés avec ordre, et nous avons eu l’avantage dans deux affaires qui se sont engagées entre notre arrière-garde et l’avant-garde ennemie. Les fatigues que j’ai éprouvées dans cette occasion surpassent toutes celles que j’avais endurées jusqu’ici ; nous avons marché trois jours et trois nuits, ne nous arrêtant que le temps de faire la soupe dans la plaine ; enfin nous sommes arrivés au camp devant Weissembourg où il semble que nous devrions avoir quelque repos, si l’ennemi ne continue pas à nous harceler. Mayence que nous avons laissé à 28 lieues derrière nous est bloqué de toutes parts et défendu par une garnison nombreuse ; il faut espérer qu’elle fera une résistance courageuse et qu’elle, obtiendra une capitulation honorable. Nous avons appris en même temps la retraite précipitée du général Dumouriez  et les troubles de quelques départements ; quelqu’affligeantes que soient ces nouvelles, il ne faut pas perdre courage et sans doute l’ennemi se repentira de sa témérité s’il ose encore mettre le pied sur notre territoire.

    Chai- Nideroterbach le 1er juillet 1793 deuxième année de la république.

    Ma chère mère

    Malgré le tumulte des armes et les dangers de la guerre nous jouissons ici d’une apparente tranquillité qui est loin d’exister à Paris ; car si nous en croyons les gazettes, cette ville est continuellement agitée par ces mouvements révolutionnaires et l’insurrection de jour en fait craindre une pour le lendemain. Il serait souhaitable que les parisiens suivissent l’exemple des braves troupes qui défendent leurs frontières, et qui, sans s’immiscer aucunement dans les affaires intérieures, n’ont en vue que l’ennemi et d’autre désir que de le combattre. S’il régnait dans l’intérieur le même esprit que dans les armées nous aurions bientôt une Constitution sage et une paix avantageuse.

    caporal fourrier au 48e régiment d’infanterie compagnie de Skopetz – Armée du Rhin

    Flobsheim le 19 août 1793, l’an 2 de la République

    Ma chère sœur (Marie Barbe Laurence), il s’est passé depuis ma dernière lettre des événements malheureux qui nous ont fait abandonné 15 lieues de terrain. Les lignes de Vissembourg et de Lauterbourg sont tombées au pouvoir de l’ennemi qui, outre cela, nous a pris beaucoup d’artillerie. Landau et le Port-Louis sont bloqués ; il est impossible de faire passer le moindre secours dans le moment où je vous écris ; l’armée est retirée sous le canon de Strasbourg et notre régiment vient de recevoir l’ordre d’aller garder un poste important sur le Rhin. Ces différents échecs sont dûs autant à l’ineptie de nos généraux qu’à la faute de certains corps de l’armée qui sont mal organisés et qui n’ont pas fait dans cette occasion tout ce qu’ils devaient faire. Je me suis trouvé à toutes ces affaires et j’ai eu le bonheur de revenir sain et sauf ; peut-être le même avantage me suivra-t-il dans d’autres occasions ; au reste un militaire qui a de l’honneur compte les dangers pour rien, les fatigues seules sont pénibles et sont plus décourageantes que le péril lui-même.

    Au bivouac sur les hauteurs de Steinfels le 26 août 1793, l’an deux de la République

    Ma chère mère

    Le 20 nous avons été attaqués sur tous les points par des forces supérieures. L’ennemi s’est emparé d’une assez grande quantité de villages et il a commis des horreurs que l’on a de la peine à concevoir dans un siècle policé ; à Rorbach, village où nous étions cantonnés il y a un mois, il a crevé les yeux à un maître d’école ami de la liberté ; il a prostitué les filles du mari et assassiné une femme enceinte de six mois dans les bras de son mari ; on attribue ces atrocités et beaucoup d’autres encore principalement aux Autrichiens et aux émigrés. Le récit de ces événements a beaucoup contribué à armer contre eux les habitants de ces pays dont on vient de former plusieurs Corps ; il est vrai mal armé mais plein de courage et de bonne volonté.

    Nous souffrons dans la position où nous sommes démunis de tout, ayant toutes les peines possibles à nous procurer du mauvais vin qu’on nous vend quatre livres la bouteille. Il nous faut faire trois quarts de lieue pour avoir de l’eau.

    Jourdain

    Alobsheim 15 nivose – an 2 de la République Française une et indivisible

    4 janvier 1794

    Ma Chère mère,

    Nous venons de remporter les avantages les plus brillants, nous avons chassé l’ennemi d’Haguenau et de Vissembourg. Landau est débloqué etnotre quartier général y est établi. Si les autres armées de la République obtiennent  des succès aussi heureux, peut-être que nos ennemis seront forcés de demander la paix. Combien je soupire après cette époque heureuse où, après tant d’orages et de dangers, nous pourrons rentrer dans le sein de nos familles et trouver dans les embrassements  de nos parents les plus doux dédommagements de nos travaux. Alors, après avoir rempli mes devoirs de citoyen en défendant ma patrie, je pourrai rentrer dans l’état civil, et embrasser un état fixe, alors tu me connaitras peut-être mieux,

    Ton affectionné et respectueux fils Jourdain

    Fourier au 48ème Regt d-Inf. à Olobsheim

    Division du moyen Rhin

    A M. FourquetIl vient de m’arriver un événement assez malheureux mais qui cependant peut se réparer : un officier du régiment m’avait prêté son cheval pour aller à quelques lieues du cantonnement. Pour rentrer avant l’appel, un de mes camarades voulut monter en croupe et comme il commençait à être tard nous poussâmes un peu vivement le cheval qui creva le lendemain. Ce cheval a été estimé 300 livrespar un expert, et comme j’étais responsable je n’ai pas hésité à faire ce que d’ailleurs l’honneur me commandait, j’ai fait un billet de la même somme à l’officier qui me l’avait prêté. Je vais écrire à ma mère à ce sujet pour être en état de remplir mon engagement.

    Fourier au 48ème régiment d’infanterie cantonné à Chenaw, Division du Moyen Rhin à 3 lieues de Schelestatt

     Sobloch le premier thermidor de l’an deux de la République une et indivisible

    19 juillet 1794

    Ma chère mère

    Après huit jours de fatigue et de danger je mets la main à la plume pour vous faire part de nos travaux. Le 25 messidor, à une heure du matin, notre demie brigade composée de trois bataillons a  attaqué l’ennemi retranché dans des gorges et sur des montagnes escarpées défendues par trois étages de redoutes. Nous ne pouvions y parvenir que par des vignes et des chemins impraticables, cependant nous les avons attaqués dans une position extrêmement difficile ; pendant 20 heures nous avons fait un feu de mousqueterie continu et essuyé la mitraille et les obus de 20 bouches à feu. Nous n’avons pas d’artillerie, attendu que nos pièces n’avaient pu nous suivre dans les vignes. Aussi nous avons perdu beaucoup de monde sans compter 160 blessés.Efin à huit heures du soir l’ennemi a été tourné dans sa position par 6 autres bataillons qui avaient fait un circuit considérable. Son camp a été pris ;100 prisonniers ont été faits ; nous nous sommes emparé de neuf pièces de canon et les prussiens ont abandonné leur redoute qui nous avait tant incommodés.

    il serait à désirer que ces succès ne fussent pas troublés par la conduite infâme de quelques individus qui se sont permis les exercices les plus coupables dans les villages envahis. Edesheim, village de plus de 900 feux a été totalement brûlé ;  tous les autres ont été pillés et dévastés ; les malheureux habitants ont été épargnés de la vue de ces malheurs,  ils avaient fuit à notre approche, il ne restait que 10 individus dans un village peuplé de 1500.

    Les représentants du peuple ont pris des mesures sévères pour réprimer ses brigandages. La fusillade fait désormais justice des pillards mais le mal est fait et le Palatinat se repentira longtemps de cette invasion.

    Votre affectionné fils Jourdain

    Caporal fourrier de la première compagnie du premier bataillon de la 95e demi-brigade à Lobloch- Armées du Rhin

    Mutterstat le premier brumaire de l’an trois de la république

    22 octobre 1794 – à sa mère

    Vous avez sans doute eu connaissance d’un échec qu’a eu l’armée du Rhin pendant les sans-culottes, le deuxième bataillon de notre brigade a beaucoup souffert de cette affaire ; il a été enveloppé par la cavalerie ennemie et a eu 204 hommes faits prisonniers dont 10 officiers. Depuis ce temps nous nous sommes trouvés à plusieurs affaires peu conséquentes. Nous venons enfin de faire de nouveaux progrès dans le pays ennemi. L’armée est en possession de Worms

    J’ai vu avec le plus grand plaisir par la lecture des journaux que la Convention Nationale s’occupe sérieusement à anéantir les restes de la faction Robespierre et qu’elle a enfin imposé silence à tous les désorganisateurs. Il est temps enfin que l’ordre et la justice ne soit plus de vains mots. Il est temps de réparer les pertes innombrables qu’on fait essuyer au commerce le système des égorgeurs. Quant à moi je vous l’avoue je gémissais en voyant les sacrifices incroyables que font les armées rendus inutiles ; tant de sang versé tous les jours, tant de mots et de souffrances devenir infructueux par les criailleries et les fanfaronnades de quelques factieux qui ne font pas la guerre et qui semblent avoir juré de l’éterniser. Ces sentiments sont communs à toute l’armée et son courage admirable peut seul lui faire supporter le spectacle affreux de l’intérieur divisé tandis que l’ennemi est battu de toutes parts.

    Votre affectionné fils Jourdain

    Devant Manheim ce 4 frimaire de l’an 3 de la République – 24 novembre 1794

    Ma chère mère,

    J’ai reçu la lettre du citoyen Fourquet avec les 100 livres qu’elle renfermait. L’assurance qu’il me donne que toute la famille se porte bien m’aurait fait encore plus de plaisir s’il y avait joint quelques détails sur la situation actuelle de nos parents et amis et celle des affaires de la capitale.

    Nous venons d’apprendre la clôture des Jacobins et cette nouvelle fait aux vrais amis de la chose politique autant de plaisir qu’une bataille gagnée. Nous n’entendrons donc plus ces éternelles déclamations contre les riches, les négociants, et tous les propriétaires. Ils ne pourront donc plus prêcher l’éternité de la guerre ; ces hommes hardis à la tribune et tremblant devant une trentaine d’individus qui, disaient-ils ridiculement, étaient venus les assiéger et les bombarder. La révolution aura donc un terme et notre sang ne coulera plus en vain ; heureux changement ? C’est à compter de ce jour qu’il n’est plus permis de douter de la stabilité du gouvernement républicain. Vive la Convention. Il ne fallait rien moins que des nouvelles aussi satisfaisantes pour mêler quelques douceurs aux fatigues excessives que nous supportons dans le moment.

    Jean Ponsignon a fait don de plusieurs documents  aux Archives de la Ville de Châtillon sur Seine

    Je viens d’être nommé sergent pour ma compagnie. Quoique cette place nouvelle semble devoir m’éloigner du chef de brigade auprès duquel je travaille toujours, je l’ai acceptée parce que le refus eut put être interprété d’une manière désavantageuse. Cependant je suis loin de désirer de l’avancement, attendu que je ne me consacre pas à l’état militaire et que d’ailleurs le mode actuel d’avancement est une pure loterie.

    Landau le 23 Pluviôse, troisième année de la république française une et indivisible – 12 février 1795

    Au citoyen Fourquet

    Depuis que nous sommes en garnison, la moitié de nos effectifs est entrée à l’hôpital. Les maladies sont excessivement fréquentes. Les chirurgiens l’attribuent au changement de position. Le siège de Mayence est toujours dans le même état, la ligne de circonvallation est achevée et rien de plus. Les rigueurs de la saison ont singulièrement ralenti les opérations de part et d’autre.

    Voici le témoignage d'un des Allemands favorables à l'arrivée des Français : « Enfin, notre peuple commence à rejeter ses chaines et à acquérir une dignité humaine. Bientôt nous serons libres. Quelques jours avant que les Français n’assiègent notre ville, j’éprouvais déjà une grande joie. La liberté et l’égalité gagnaient enfin Mayence ! Les Français faisaient enfin rendre gorge à nos despotes, et au premier d’entre eux, notre prince-évêque, qui avait pris la fuite quelques jours plus tôt. J’avoue que j’avais grand plaisir à la vue de l’immense désespoir qui saisissait nos nobles seigneurs. Ils étaient pris de panique à l’approche des Français et entassaient tout ce qu’ils pouvaient emporter avant de fuir la ville. 

    Landau le 24 ventôse de la troisième année de la République Française une et indivisible – 14 mars 1795

    Ma chère mère

    Nous nous attendons à rentrer bientôt en campagne malgré les apparences de cette paix qu’on nous annonçait ; on nous avait mit l’eau à la bouche, mais il paraît que nous bivouaquerons canonnerons et fusilleront encore. Le général Pichegru vient commander l’armée du Rhin ; nous en sommes enchantés.

                                                                         Jourdain

    Je désirerais bien savoir savoir quelques détails sur la situation de nos affaires, particulièrement les miennes. Telles que les maisons de Poissy, Vaugirard. Quant à ce qui me regarde, que sont devenus les capitaux placés chez Laborde qui a été guillotiné ?

    Au citoyen Fourquet

    Yokrim sur le Rhin le 28 germinal, troisième année de la république

    Le directoire du département du Bas-Rhin vient de communiquer à l’armée l’agréable nouvelle que la paix venait d’être conclue entre notre ministre plénipotentiaire et celui de la Prusse. Reste maintenant la ratification de la Convention nationale qui sans doute ne refusera pas. Les prisonniers de part et d’autre doivent dit-on être rendu en masse ; cet heureux événement répand de la joie et de l’espérance dans le cœur des braves soldats épuisés des fatigues et des bivouacs de l’hiver. Il faut espérer que ce sera la dernière campagne et que ceux qui auront le bonheur de survivre reverront leur famille et leur patrie. Puis-je être de ce nombre.

                                                                         Jourdain

     Donnez-moi je vous prie des nouvelles du citoyen Jarminquer

    A Yokrim par Lautesbourg le 9 floréal, troisième année de la République – 28 avril 1795

    Ma chère mère, je profite d’un moment de relâche que me donne la fièvre pour vous faire part de ma situation. Il y a huit jours une fièvre double tierce (c’est ainsi que le nomment les chirurgiens) m’a attaqué, toujours aux mêmes heures, en laissant cependant un jour d’intervalle ; mes forces sont considérablement affaiblies et la maigreur a été en proportion. Cette maladie est de nature à durer fort longtemps et le changement d’air est son remède le plus efficace.

     J’espère assez des bontés de notre chef de brigade pour croire qu’il vous qu’il voudra bien transmettre ma demande auprès des représentants du peuple près de l’armée du Rhin et Moselle. Restera les moyens de pourvoir aux dépenses de la route. J’aurais d’abord les vivres de campagne et 10 sols par jour, ce qui n’est pas bien régalant pour un fiévreux. Il est vrai que je pourrais entrer dans les hôpitaux de la route si la fièvre me prenait trop fort. Cependant il est indispensable que j’aie quelques avances pour y subvenir. Notre chef de brigade ou quelqu’un pourrait bien avancer quelque chose, ou si vous l’aimez mieux, et que cela ne vous gêne pas pour le moment, je vous prie de m’envoyer le plus promptement possible 200 livres qui ne seront pas de trop pour la route de 20 jours au prix actuel des denrées

     Jourdain

    Drufsenheim le 10 thermidor troisième année – 28 juillet 1795

    Ma chère mère,

    Enfin nous en sommes venus au point de regarder comme rien la paye que nous recevons de la nation ;  elle ne sert pas à nous procurer la moindre chose. Il faut avoir des tonnes d’ assignats pour se procurer quelque denrée. Encoreles paysans les refusent-ils très souvent. Si l’on n’apporte de prompt remède à la situation vraiment malheureuse où se trouvent les militaires, on mettra leur patience à de bien rudes épreuves.

    S’il vous était possible de m’envoyer un peu de numéraire j’en tirerai sbeaucoup plus de profit que des assignats ; et j’en ai d’autant plus besoin aujourd’hui  que je suis rentré à ma compagnie, vu que le chef de brigade auprès duquel je travaillais est tombé malade et est allé au dépôt. Je vous prie de mettre dans cet envoi toute la célérité que les circonstances vous permettront.

    votre affectionné fils Jourdain

    Au Premier Consul Buonaparte

    Général Consul,

    Compris dans la réforme prononcée par l’arrèté du 9 fructidor, je me trouve à 30 ans dans un désoeuvrement qui ne convient ni à mon âge, nià mon caractère.J’ai été pendant quatre ans attaché à l’inspection générale de l’Infanterie de l’Armée du Rhin et le général qui la dirigeait a bien voulu me donner un témoignage avantageux tant de ma conduite auprès de lui  que des connaissances que je puis avoir acquises dans xxxx militaire.

    C’est sous ce dernier rapport, Citoyen Consul que je vous demande de l’emploi, soit dans les bureaux, soit dans toute autre administration publique où je crois pouvoir porter quelque xxx et surtout beaucoup de zèle. J’attends avec confiance cette marque de la bienveillance quotidienne pour ceux qui ont consacré leur jeunesse au service de la République.

                                                                         Salut et respect

    Jourdain est nommé sous-lieutenant 18 avril 1798.

    Jean Ponsignon a fait don de plusieurs documents  aux Archives de la Ville de Châtillon sur Seine

    Après plus de 9 ans de service, alors à l‘Armée d’Italie Jourdain bénéficie d’un congé de réforme le 23 octobre 1800.

    Jean Ponsignon a fait don de plusieurs documents  aux Archives de la Ville de Châtillon sur Seine

    Jourdain est affecté pendant 3 mois au service du général Bruneteau de Ste Suzanne devenu  sénateur

    1804

    Nomination de Jourdain au grade de capitaine le 11 pluviose an 12 à 33 ans

    1908

    Jean Ponsignon a fait don de plusieurs documents  aux Archives de la Ville de Châtillon sur Seine

    Nomination à l’Etat-Major de l’Armée d’Espagne – décembre 1808

    1809

    Santiago le 23 Mars 1809Armée d’Espagne 6ème corps1ère division69ème Régiment d’Infanterie

    Mémoire de proposition pour l’admission au Régiment d’un capitaine adjoint à l’Etat-Major, armée d’Espagne Proposition

    Jourdain, capitaine adjoint à l’Etat-Major de l’Armée d’Espagne ayant témoigné du désir de reprendre du service dans un régiment d’Infanterie, le colonel du 69ème saisit avec empressement de procurer au Corps qu’il commandait un officier aussi distingué par ses talents, sa bravoure et sa bonne conduite.

    Le colonel supplie en conséquence son Excellence le Ministre de la Guerre de vouloir bien nommer M. Jourdain capitaine à la xxxx du 69ème régiment pour prendre rang dans son grade à la première place vacante.

    Berlin le 20 janvier 1810

    Vous voyez mon cher Ortillon par le lieu d’où je date ma lettre que j’ai déjà fait une centaine de lieues pour me rapprocher de vous depuis la dernière que je vous ai écrite de Thorn. Cette lettre devait se ressentir du désordre où se trouvait alors mes facultés physiques et morales. Car immédiatement après l’avoir écrite j’ai été attaqué d’une fièvre violente avec délire. Cet état a duré cinq à six jours au bout duquel j’ai eu quelque relâche. Mais j’étais considérablement affaibli et peu en état d’entreprendre une nouvelle route ; il a cependant bien fallu s’y déterminer car les circonstances étaient trop impérieuses pour différer.

    Je ne vous ai pas parlé je crois dans ma dernière de ma blessure ; elle est très heureusement cicatrisée depuis la maladie que j’ai essuyée, mais je suis pour longtemps je crois au nombre des claudiquants.

    En Russie il est blessé d’un coup de feu au pied à la bataille de la Moskova le 7 septembre ainsi que le précise son dossier aux archives de la Légion d’Honneur

    J’ai l’honneur de supplier votre excellence de vouloir bien demander pour moi à Sa Majesté la décoration de l’ordre royal et militaire de Saint-Louis.

    24 années de service irréprochable, 15 campagnes,  deux blessures en Russie, tels sont les titres que je vais présenter pour obtenir cette faveur que je m’efforcerai d’ailleurs de justifier par une fidélité inviolable et un dévouement sans bornes

    Jourdain est nommé Lieutenant Colonel le 6 avril 1813

    Jean Ponsignon a fait don de plusieurs documents  aux Archives de la Ville de Châtillon sur Seine

    Jean Ponsignon a fait don de plusieurs documents  aux Archives de la Ville de Châtillon sur Seine

    1849

    décès de Laurent Jourdain le 23 avril 1849

     Courrier du Coeur

    Lettre adressée à Laurent(lieutenant de 31 ans) par Sophie, sœur d’un général allemand– l’orthographe a été parfois rétablie, mais dans la haute société on maîtrisait admirablement le français

    Premier frimaire an 11 – 22 novembre 1802

    Elle est enfin arrivée chère ami cette charmante lettre, aimable souvenir de ta tendresse, faible dédommagement de ton absence ; si tu avais été témoin mon ami de la joie que j’ai eue en prenant le papier que tes mains avaient touché ; je l’ai baisé mille fois et relu autant ; j’ai dévoré chaque lettre, il me semblait que chacune d’elles me disait : ton ami t’aime, il pense à toi, il pense à faire le bonheur de sa chère amie.  Arroser ta lettre de mes larmes, la serrer contre mon cœur était toute ma réponse.

    Que tu sais bien cher ami calmer les tourments de l’absence par cette charmante phrase de ta lettre ; espérons donc que l’espoir me donne le courage et la patience ; elle m’a rendu à moi-même à mes amis et à la société. L’état où m’avait jeté notre cruelle séparation m’avait mis dans un état de léthargie dont rien ne pouvait me faire sortir que ta lettre. Je m’ennuyais partout excepté dans la société où tout nommait le nom,  l’objet de toute ma tendresse. Alors mon cœur battait de joie, d’amour et je disais plus de tristesse causée par la contrainte où il était de ne pouvoir pas dire à la personne qui parlait de toi : « c’est mon ami, c’est celui qui doit permettre mon bonheur ».  Sans le dire cher ami tout le monde le lisait dans mes yeux, tant il est vrai que l’amour a bien de la peine à se déguiser.  Quelle jouissance pour un cœur d’être aimé de l’homme le plus vertueux, le plus aimable de tout ce qui existe, mais aussi quels tourments d’être séparé de ce tendre ami. Il faut espérer que cette absence sera l’accomplissement de nos vœux.

    Je suis bien aise cher ami que ton voyage ait été heureux et que tu sois arrivé en bonne santé au milieu de ta famille qui aura eu autant de plaisir à te revoir que moi de peine et de chagrin à te quitter

    Donne-moi de suite de tes chères nouvelles. Je suis comme une folle à toujours regarder quand on sonne pour voir si on n’apporte pas une lettre de mon ami. Nous savons bien à quoi s’en tenir ; ma sœur m’a dit, j’ai demandé dix fois ce que je pouvais te manquer, je lui ai dit que je te désirais, que je préfère la bonté à l’éloquence, que je disais que je t’aimais, que c’est une chose que j’aime tant à te répéter, que je ne me lasse pas de te le dire, tu le vois, cher ami chacun cherche à me tourmenter. Je viens me réfugier près de toi cher ami pour te répéter que je t’aime, et que je t’aime éternellement que toi seul seras l’objet de ma tendresse.

    Sophie

    Brouillon de la lettre de réponse de Jourdain du 28 ventôse an 11 - 19 mars 1803 (soit 4 mois plus tard)

    Mademoiselle,

    Par l’effet d’une circonstance, nous avons été instruits l’un et l’autre d’une estime particulière réciproquement accordée. Ce sentiment, qui ne dépendait peut-être pas de nous de régler les mouvements prend chaque jour de nouvelles formes. Enfin le moment est venu pour moi de m’expliquer avec franchise. Répondant loyalement à la confiance que vous m’avez témoignée, l’honneur devant lequel toute autre considération se tait m’en fait un devoir et j’ai mieux aimé le faire par écrit parce que la raison n’est pas aussi bien écoutée dans un entretien avec une personne qui nous touche.

    Vous avez eu la bonté de me faire entrevoir comme possible le don de votre main. Je sens comme je le dois tout le prix d’une offre aussi précieuse. Les avantages de votre personne, ses qualités de l’esprit et du cœur, qui votre sens famille semble un caractère distinctif, tout cela a fait sur moi une impression. Mais je dois à cette même famille et à vous surtout et à moi-même de vous mettre à portée de juger si cette union vous convient réellement et si elle peut obtenir l’approbation des personnes qui vous touchent le plus près.

    Né de parents honnêtes mais dont l’État a été bien au-dessous du vôtre le peu de fortune que je pouvais espérer a été presque entièrement détruit par des circonstances malheureuses. Un second mariage contracté par ma mère, des malheurs survenus à mon beau-frère, ont fourni des motifs ou des prétextes pour ne pas me rendre des comptes auxquels j’avais droit de prétendre. J’ai embrassé l’état militaire pour m’éloigner de parents dont je pouvais accuser l’injustice et lancé sans appui dans une carrière pour laquelle je n’avais pas d’abord un goût décidé, j’ai dû la parcourir bien lentement. J’y ai trouvé à la vérité des personnes qui m’ont accordé leur estime et leur intérêt. Il en est un surtout dans cette ville dont je n’oublierai jamais les services dont le plus grand à mes yeux est de m’avoir fait connaître le général votre frère. Quelques améliorations légères sont cependant survenues dans ma situation. J’ai fait, conjointement avec ma sœur, un petit héritage dont je lui laisse l’entière jouissance qui suffit à peine à son existence et à celle de sa fille ; je suis aujourd’hui l’unique soutien de cet enfant à laquelle j’ai pris le plus tendre attachement et promis de lui assurer un état honnête autant que cela dépendrait de moi. Une grande disproportion d’âge, une parenté aussi intime ne permettrait guère de songer à la possibilité de m’unir un jour à vous. Cependant je trahirais la vérité si je ne n’avouais pas que cette idée s’est quelquefois présentée de loin à mon imagination et que j’y trouvais même quelques douceurs.

    . Je suis trop honoré, trop pénétré Mademoiselle de l’estime que vous avez bien voulue me témoigner pour entreprendre d’altérer ces idées qui ne sont aux yeux de beaucoup de personnes qu’une belle illusion. Si vous avez déposé votre secret dans le sein d’une amie, vous en recevrez j’en suis sûr des conseils salutaires.

    Je désire Mademoiselle que vous ne voyez dans la communication que je prends la liberté de vous faire que l’expression d’une âme honnête et la preuve de mon profond respect

    Jourdain N

    Lettre adressée par une autre femme qui signe Wali – du 9 mars de la même année

    Le français, parfois approximatif a été laissé inchangé.

    Je ne sais pas où j’en suis, si tu as reçu ma lettre écrite du 5 mars ;  si ta lettre est perdue on peut lire dedans qu’une fille allemande a donné son amitié un bond et estimable français, et son départ fait tant de regrets dans mon âme. je pense toujours à toi mon cher ami pour savoir bientôt de tes nouvelles pour te faire aussitôt la réponse. Et je compte tout le jour quand la poste arrive pour recevoir de tes nouvelles que j’attends avec impatience car mon cœur me dit et je sens aussi comme j’aime et comme j’étais chéri par toi, mon cher ami, je te prie infiniment de ne pas me laisser attendre plus longtemps et je pense tu ne manqueras pas à me répondre tout de suite, pour me tirer de l’inquiétude qui est grande dans mon cœur. Aujourd’hui huit jours j’étais bien heureuse encore que je t’embrassais tant, mon cœur, mon ami Jourdain. Tu peux penser depuis ton départ de Lausson que j’ai de chagrin et tu regretteras ta Wali. Elle pleure et gémit toute la journée pour son cher ami Jourdain

     Et pour pas oublier à jamais j’ai gravé ton nom et mon amour pour toi un sur un carreau de fenêtre, et ton nom c’est avec un diamant de mon anneau.  Pense aussi comme moi à ta Wali. Je te prie, je te prie mon cher cœur. J’ai donné mon cœur et mon amour et pour Jourdain pour jamais. Je finis en embrassant de tout mon cœur, cher ami Jourdain, ton abandonnée t’embrasse et je suis pour la vie ta fidèle

    Wali

    Un curieux rapport Helvète(Extraits)

    Au quartier de Lucerne le 28 fructidor an 6 – août 1798

    Citoyen Directeur,

    Le Directoire helvétique m’avait fait part dans les premiers jours de ce mois des mouvements séditieux qui se manifestaient dans le canton de Wallstellen ci-devant Schwitz, Uri, Zug et Unterwald , à l’occasion du serment de fidélité à la constitution, dont le corps législatif

    Les reitres s’efforçant d’aigrir les esprits crédules de ces montagnards et de les xxx en leur rappelant les traits héroïques de leurs ancêtres et en leur faisant envisager des secours assurés dans les troupes autrichiennes qui se renforçaient sur les frontières du Tyrol. La marche des nôtres dans le pays limitrophe des Grisons ne fit que hâter l’explosion de l’orage qui se préparait.

    Le préfet du canton de Walstetter fut insulté, la chambre administrative forcée de se réfugier à xxx, l’arbre de la liberté renversé, l’assemblée générale du peuple, fut tenue en xxx et des grandes gardes furent établies vis-à-vis de nos troupes réparties dans le canton de Lucerne, et des postes d’Einsiedel.

    Deux parties se présentaient pour soumettre les rebelles,  celui des armes des n’était pas incertains mais il devait coûter beaucoup de sang et le Directoire helvétique me proposait avant d’y recourir d’un d’épuiser tous les moyens de demander une conciliation ; j’adopté cette proposition, autant pour l’horreur que m’inspirait une guerre civile que pour l’avantage que je pouvais tirer d’un délai pour prendre les dispositions telles que les insurgés fussent enveloppés de tous côtés, privés de tout moyen de communication et réduits à leurs propres forces.

     Je fis en conséquence une proclamation aux habitants des ci-devant petits cantons pour leur rappeler les engagements qu’ils avaient contractés et leur déclarer que j’étais déterminé à prévenir les suites funestes de l’anarchie à laquelle ils couraient aveuglément. Le Directoire prit ensuite un arrêté par lequel il enjoignait aux habitants de Schwitz de respecter les autorités constitutionnelles et de livrer dans trois jours pour gage de leur soumission différent personnages qui furent désignés comme les meneurs et principaux chefs de la sédition.

    De retour à Berne,.Le 17 je donnai l’ordre au chaf de la brigade Mainsony de partir du camp de Berne avec cette dernière demi-brigade, 2 pièces d’artillerie légère et 100 chevaux du 7ème hussard. Je dirigeai sa marche. Je lui donnai pour instruction de ménager autant que possible les communes bien disposées et de faire en sorte d’être arrivé le 21 à Sarney chef-lieu de l’Obdenwald où il se trouvait un petit arsenal dont les habitants bien intentionnés n’étaient armés que pour se mettre à l’abri des incursions de leurs voisins

    Je pris mes dispositions pour arriver le même jour à Lucerne afin de diriger l’attaque je fixai au 22.

    Je reçu à mon arrivée dans cette ville la nouvelle que le chef de brigade Mainsuy avait passé heureusement le Bruning qu’il s’était de suite établie dans un village situé à l’entrée du défilé qui conduit à Arau. Les 100 hussard du septième régiment avaient passé difficilement en menant les chevaux par la bride. Le Citoyen Mainsuy m’informe en outre que le matin du 21 les insurgés avaient eu l’audace d’attaquer toute la ligne et de s’y poster, mais qu’ils avaient été vigoureusement repoussés.

     J’appris dans la nuit qu’une partie du district de Schwitz cédant aux sollicitations d’un père capucin (le même qui en floréal dernier portant un crucifix d’une main et un poignard de l’autre avait commandé l’occupation de Lucerne) venait de se joindre aux insurgés d’Unterwald

    le retard de l’attaque de la veille avaient augmenté l’audace des rebelles. L’exaltation était à son comble. Les femmes et les enfants tout était armé jusqu’aux dents ; les prêtres prêchaient de l’exemple et de la parole débitant les fables les plus absurdes pour fortifier la confiance des insurgés. Leur force totale ne montait guère qu’à 3500 hommes mais si l’on considère leur enthousiasme religieux, leur habilité à se servir de leur carabine, leur position dans des montagnes couvertes de bois et de rochers, et la facilité qu’ils avaient d’y détacher des pierres énormes, la route étroite et marécageuse du défilé de Stans, enfin les retranchements et abattis dont ils l’avaient obstrué on aura une grande idée des obstacles que nos hommes avaient à vaincre dans la nuit du 22 aux 23.

    à 4h30 du matin trois coups de canon donnèrent le signal de l’attaque ; le feu vif et bien soutenu de l’artillerie abattit bientôt une partie des retranchements. Les grenadiers y sautèrent aussitôt et taillèrent en pièce tout ce qui s’y trouva. Les colonnes de droite et de gauches donnèrent alors à la fois et le combat s’engagea partout. Celle de gauche culbuta facilement tout ce qu’elle rencontra mais la droite et le centre éprouvèrent une

    Le chef de brigade Delpierre reçu dans ce moment une balle qui lui traversa le bras droit et ce brave officier n’abandonna le lieu du combat qu’après avoir ensuite transmis ses ordres à d’autres officiers.

    Dix pièces de canon, toutes les munitions des rebelles ont été le fruit de cette action. La perte de ces derniers est énorme, nous n’avons pas fait de prisonniers. Au nombre des morts sont trouvés des capucins et des prêtres, des femmes mêmes qui pendant le combat avaient porté des munitions ou étaient armées de massues.

    Notre perte consiste en 2 officiers tués, 10 blessés parmi lesquels le chef de brigade Delpierre, 63 sous-officiers et soldats tués, 195 blessés.

     Il a été impossible de maîtriser la furie des soldats. Un grand nombre des maisons d’où les rebelles s’étaient défendus ont été la proie des flammes et d’autres appartenant à des patriotes réfugiés ont été brûlées par les rebelles eux-mêmes.

    Depuis le 24, je m’occupe je vous l’ai déjà marqué à réparer autant qu’il est possible les malheurs de la guerre qu’ils ont provoqués. Je fais fournir aux uns et aux autres des subsistances des magasins de l’armée et je suis puissamment secondé dans le soulagement dont ils ont besoin par le Directoire helvétique qui a déjà destiné une somme assez considérable à cet objet.

    Cette conspiration, citoyen directeur, avait des ramifications très étendues. Les papiers que nous y avons trouvés à Stans le prouvent suffisamment. Il n’est pas possible de douter que des émissaires étrangers n’aient attisé et entretenu le feu de la sédition.

    Il n’est pas nécessaire de vous dire Citoyen Directeur que nos troupes se sont conduites partout avec leur valeur ordinaire. Je vous ferai connaître par un rapport particulier les corps et les divisions qui se sont distingués dans les diverses actions et je ne tarderai pas à remplir envers eux un devoir qui m’est infiniment cher


  • Commentaires

    Aucun commentaire pour le moment

    Suivre le flux RSS des commentaires


    Ajouter un commentaire

    Nom / Pseudo :

    E-mail (facultatif) :

    Site Web (facultatif) :

    Commentaire :