• "L'Europe de 1929 à 1939" , deuxième partie de la conférence de Robert Fries pour l'ACC.

     Robert Fries nous explique les origines du krach de 1929, et les tentatives des Etats pour surmonter cette crise.

    La crise de 1929 et les réponses qui lui ont été apportées.


    La crise de 1929 s’est d’abord manifestée aux Etats-Unis, puis s’est répandue en Europe.

    La crise aux USA.

    Le jeudi 24 octobre 1929, le DOW Jones – l’équivalent de notre CAC 40 – baisse de 22%. 

    La situation se rétablit la semaine suivante car les banques interviennent, mais pour un temps seulement.

      Le 28 octobre, nouvel effondrement.

      Entre le 24 octobre et le 13 novembre le Dow Jones passe de 326 à 198. 

    Les actions ont perdu en moyenne 30% de leur valeur. 

    La descente aux enfers se poursuit : le 8 juillet 1932, le Dow Jones est à 41, soit 12% de sa valeur avant la crise.

    L'Europe de 1929 à 1939 , deuxième partie

    La crise boursière entraine une crise financière – les banques – qui entraine une crise économique générale.

    Très schématiquement, le mécanisme de tout cela :

    •    Aux Etats-Unis comme en Europe l’économie est florissante à la fin des années 1920. 

    La valeur réelle des entreprises augmente.

      La valeur en bourse de leurs actions également, mais plus vite.

      Alors qu’entre 1920 et 1929 la production industrielle augmente de 50%, le cours des actions augmente de 300%. 

    On achète des actions à crédit pour les revendre peu après avec une bonne plus-value.

    En d’autres termes, les spéculateurs empruntent pour acheter des actions .

    Entre le 18 et le 23 octobre, de gros opérateurs enchainent les « prises de bénéfice  ».

      C’est le début du mouvement de baisse.

      Les spéculateurs qui avaient emprunté doivent revendre à perte leur capital pour rembourser leurs emprunts.


    •    Les banques qui avaient prêté aux spéculateurs ne sont pas remboursées.  Elles ne peuvent pas rembourser les déposants. 

    Elles font faillite entrainant leurs clients, entreprises ou particuliers.

    L'Europe de 1929 à 1939 , deuxième partie

      Celles qui ne disparaissent pas ne prêtent plus et n’investissent plus.

     
    •    L’économie ralentit.  Les entreprises licencient et baissent les salaires, ce qui réduit la demande. 

    En 1929, il y avait 1,5 million de chômeurs ; en 1933, 12,5 millions.


    Les premières mesures prises par l’administration républicaine du président Hoover consistent à augmenter les droits de douane pour protéger les entreprises locales. 

    Pour 3200 articles ils passent de 38% à 59%. 

    Ces mesures ont pour effet de réduire considérablement (66% environ) les échanges avec l’Europe, donc de propager la crise.

    La crise en Europe.

    La crise est née aux Etats-Unis mais se propage en Europe.

    Les particuliers américains comme les banques rapatrient leurs avoirs et mettent fin à leurs investissements ou à leurs prêts. 

    Les banques européennes sont mises en difficulté. 

    Dès juillet 1931 deux banques de Vienne font faillite entrainant dans leur chute une partie du système bancaire autrichien puis allemand ainsi que toute une série d’entreprises.

      Les pays les plus touchés sont ceux dont l’économie dépend soit de leurs exportations vers les Etats-Unis – c’est le cas de la Grande-Bretagne – soit de prêts accordés par les banques américaines – c’est le cas de l’Allemagne qui a besoin des prêts américains pour payer les Réparations.

     
    Pour juguler la crise financière tous les pays industrialisés ont commencé par utiliser l’arsenal de l’économie libérale classique, notamment :


    •    L’Etat
    o    Réduit les dépenses publiques en diminuant le traitement des fonctionnaires


    o    Protège les productions nationales par des droits de douane


    o    Cherche à attirer des capitaux en veillant au maintien d’un taux de change élevé de la monnaie nationale et en relevant le taux d’escompte.


    •    Les entreprises cherchent à améliorer leur compétitivité en réduisant le coût de la main d’œuvre.

     
    En règle générale ces mesures ont un effet contreproductif.


    •    Le commerce international baisse de deux tiers de sa valeur entre 1929 et 1932.


    •    En Allemagne, la production charbon tombe de 160 à 100 millions de tonnes et celle du fer de 16 à 5,7 millions de tonnes entre 1929 et 1932. 

    Le chômage explose :de 600.000 en 1928, les chômeurs passent à 6.000.000 en 1932 sans compter les 8 millions de chômeurs partiels.

      1 actif sur deux est au chômage en 1933. 

    A Berlin en hiver des milliers de SDF trouvent refuge dans de grandes salles improvisées.  « Les gens vivent dans un enfer de dénuement, de maladie et d’oppression ».


    •    En Grande-Bretagne la production baisse de 30% entre 1929 et 1932.

    La population ouvrière est durement touchée.  En 1935, on a estimé que 20% de la population britannique ne mangeait pas à sa faim.

      Les hunger-marches d’octobre 1932 et février 1934 en sont le reflet. 

    L'Europe de 1929 à 1939 , deuxième partie

    Le chômage touche 2,7 millions de personnes en 1931.


    •    La France est touchée plus tard et de façon moins intense dans la mesure où son économie est moins tournée vers le grand-large.

    L'Europe de 1929 à 1939 , deuxième partie

      La dévaluation de la livre en 1931 qui rend les produits français moins compétitifs est en fait la cause principale d’une baisse de 20% de la production industrielle entre 1929 et 1933.

    En 1933 le nombre de chômeurs n’est que de 350.000 et 500.000 en 1935.  

    En revanche, l’économie française mettra plus de temps à se relever.

      Plutôt qu’une crise, la France est plongée des années durant dans un marasme économique .

    La sortie de crise

    Aux Etats-Unis comme en Europe, le dogme de la main invisible du marché qui, sans intervention de l’Etat, régule avec bienveillance les échanges économiques est sérieusement remis en cause. 

       A la suite de Keynes, on accepte que l’Etat ne doit pas se contenter d’un rôle d’arbitre ; il doit devenir acteur de la vie économique. 

    Par ailleurs le principe de lier la valeur d’une monnaie à l’or est contesté, ce qui justifie la dévaluation. 

    Ces nouveaux principes de dirigisme vont inspirer les politiques économiques tout au long de la décennie. 

    Ce dirigisme varie en fonction des régimes politiques.


    •    Aux Etats-Unis, la solution viendra en 1933 sous Roosevelt et son New Deal avec ses trois volets : assistance (relief) aux agriculteurs notamment ; remise à flot des entreprises (recovery) par des crédits bon marché et des investissements d’intérêt général ; réformes (reform) dans le secteur bancaire notamment.


    •    En Allemagne aux mains des nazis, et en Italie aux mains des fascistes, le dirigisme est intense. 

    L’économie de marché perdure, mais est dirigée par l’Etat qui impose ses choix aux acteurs économiques. 

    C’est la période de grands travaux d’intérêt général (réseaux d’autoroutes, assèchement de marais) ;ensuite l’industrie d’armement mobilisera tous les efforts. Les productions locales de substitution sont aussi développées (ersatz) ainsi que le troc entre pays.

     
    •    En Grande-Bretagne et, à un moindre niveau, en France avec Laval et Flandrin, les politiques économiques s’inspirent de Keynes : stimulation de la consommation par des investissements publics (routes, électrification, logements), meilleure distribution des revenus par une politique fiscale adaptée, inflation modérée et contrôlée (régulation de la masse monétaire et du taux d’escompte). 

    Les monnaies doivent alors être dévaluées.

      C’est ce qui arrive à la livre en 1931, au $ en 1933 et au franc en …. 1936 (franc Auriol, Front populaire), 1937 (franc Bonnet), mai 1938 (franc Marchandeau), novembre 1938 (franc Reynaud).

    Les conséquences sociales et politiques de la crise.

     La crise permet aux syndicats de se renforcer, à tout le moins dans les pays démocratiques.

      Les syndicats sont autorisés à négocier des accords de branche avec le patronat sur les conditions et les règles de travail. 

    De plus des dispositions sociales sont adoptées en vue de réduire la précarité de la vie des ouvriers : assurance chômage, allocations familiales , congés payés.


    Au plan politique, la crise dite de 1929 adeux conséquences importantes:


    •    Le corps électoral évolue vers la droite.

      Ce phénomène parait paradoxal à un moment où le capitalisme libéral semble avoir échoué.

    La lutte des classes qui sépare attire moins que le nationalisme qui unit ; la peur de perdre son emploi incite plus le travailleur à rester chez lui que la promesse de lendemains qui chantent à descendre dans la rue.


    •    La radicalisation des extrêmes, qu’il s’agisse de la droite ou de la gauche.


    Partout la droite a le dernier mot, la crainte du bolchévisme réunissant souvent droite et extrême droite. 

    Seuls le Royaume-Uni, la France, la Belgique, les Pays-Bas, la Suisse, les pays-scandinaves  et la Tchécoslovaquie parviennent à éviter l’arrivée de régimes autoritaires inspirés par une idéologie nationaliste et d’extrême droite.


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