•  Dominique Masson continue ses recherches sur la guerre de 1870 dans notre région.

    Après la "surprise de Châtillon" :

    http://www.christaldesaintmarc.com/la-surprise-de-chatillon-garibaldi-un-notule-d-histoire-de-dominique-m-a204217938

    L'exécution de Léon Vigneron" :

    http://www.christaldesaintmarc.com/l-execution-de-leon-vigneron-le-19-decembre-1870-un-notule-d-histoire--a204964668

    Voici "la bataille de Baigneux-les Juifs", où nous apprenons, avec étonnement, des pans de notre histoire régionale, complètement oubliés par la plupart d'entre nous...

    Merci mille fois à Dominique Masson de nous rappeler, si bien, le passé du Châtillonnais !

    Notule d’histoire :

     

    La bataille de Baigneux-les-Juifs, le 11 janvier 1871

     

    Le 20 décembre 1870, la quatrième brigade, commandée par Ricciotti Garibaldi, qui s’était déjà illustrée lors de la « surprise » de Châtillon, le 19 novembre 1870,  reçut l’ordre de se tenir prêt et de tout préparer pour une longue expédition.

    La météorologie était terrible, la température tombant souvent à 18° au-dessous de zéro et il y avait alternative de neige et de tempêtes ; les hommes avaient de la neige jusqu’à la ceinture et on ne voyait pas à dix mètres.

    Aussi il devenait presque impossible de prendre les mesures de sécurité les plus élémentaires et il était impossible de se servir des armes, l’huile gelant dans le mécanisme délicat des fusils à culasse et le métal, à une si basse température, devenait si fragile qu’il y avait toujours danger d’éclatement.

    Le temps ne permettait aucun mouvement tactique et contrariait sérieusement le service d’informations.

    Aussi le quartier-général de Garibaldi était préoccupé des mouvements des troupes ennemies qui se faisaient sur sa gauche, dans la direction de Tonnerre, Auxerre et Orléans.

    Il fut donc décidé de faire une pointe dans cette direction et ce fut la quatrième brigade qui fut choisie pour ce service.         

    "La bataille de Baigneux-les-Juifs, le 11 janvier 1871", un notule d'histoire de Dominique Masson

     Partie le 23 décembre, dans des conditions climatiques difficiles, la brigade arriva à Château-Chinon.

    Repartie le 26 décembre, elle est à Clamecy, puis à Courson, se replie ensuite à Coulanges, puis arrive à Vermenton, le 30 décembre.

    Ces mouvements inquiètent les prussiens qui ordonnent au général von Zastrow, commandant le VIIe corps allemand, lequel avait ses positions entre Flavigny, Semur et Montbard, de marcher sur Auxerre.  

    Ayant appris que de fortes masses prussiennes se mouvaient sur les routes conduisant à Montbard et à Châtillon, c’est-à-dire vers le sud-est, Ricciotti Garibaldi décida de retourner à Avallon, où il resta du premier au 3 janvier 1871, puis repartit vers Précy-sur-Thil.

    Selon les informations reçues, il y avait une forte concentration de troupes prussiennes entre Châtillon et Montbard, cette ville étant occupée par 5 000 prussiens avec de la cavalerie et de l’artillerie.

    Les uhlans couraient la campagne pour fourrager et prélever des vivres dans tous les villages environnants.

    Ricciotti Garibaldi fit avancer sa brigade jusqu’à Semur, dans l’idée de leur donner la chasse.

    Les commandants Michard  et Bailly, bien qu’inférieurs en nombre, les attaquèrent et les mirent en fuite.   

    Le 8 janvier, Ricciotti Garibaldi, apprenant qu’une colonne prussienne était sortie de Montbard et se dirigeait vers Semur, résolut d’attaquer Montbard, dont la garnison devait être affaiblie.

    Les bagages furent expédiés sur la route de Flavigny et la brigade prit la route de Montbard.

    Ayant passé Montfort, la brigade trouva les prussiens qui avaient pris leurs positions à travers de la route et sur la pente de droite.

    La brigade utilisa alors un petit chemin  sur la pente gauche.

    L’ennemi se retira rapidement et les garibaldiens voulurent couper ce corps de celui qui occupait Crépand.

    Après un combat, les garibaldiens se retirèrent, menacés d’être encerclés et, par la vallée de la Brenne, gagnèrent Flavigny, où ils arrivèrent à 4 heures du matin.

    Le capitaine Tarelli-Cox réussit même à sauver toutes les voitures de munitions, ce qui permit à la brigade de recharger ses armes [i].     

     [i] Dans cette affaire, Ricciotti eut trois hommes tués et une vingtaine de blessés

     

    "La bataille de Baigneux-les-Juifs, le 11 janvier 1871", un notule d'histoire de Dominique Masson

    Figure 2 : monument élevé à Crépand en mémoire des francs-tireurs tués lors du combat du 8 janvier 1871

    Ricciotti donna un jour de repos à ses troupes et il fut rejoint à Flavigny par la deuxième brigade de Lobbia.

    La situation de Ricciotti n’était pas formidable, se trouvant au milieu des avant-gardes des IIe et VIIe corps prussiens de l’armée de Manteuffel, qui occupaient Villaines, Saint-Marc, Baigneux, Aignay-le-Duc, Montmoyen et Recey

    .On crut même que la quatrième brigade était perdue, le sous-préfet de Semur ayant télégraphié, le 9 janvier :

    « Ricciotti, après s’être battu toute la journée, est entouré de forces considérables. Ses bagages et ses munitions sont déjà entre les mains de l’ennemi ».

    Giuseppe Garibaldi lui-même craignit un temps que son fils ne soit perdu ; il avait dit alors à son chef d’état-major :

    « … Nous sommes exposés, vous comme moi, à apprendre d’un moment à l’autre la mort d’un fils, mais nous avions, n’est-ce pas, en venant ici, fait le sacrifice de notre vie et de celle de nos enfants. Dites-moi la vérité, Ricciotti est-il mort ou prisonnier ? [i] » . 

    Ricciotti demanda des instructions à son père mais, celui-ci lui laissant toute liberté pour la poursuite de la guerre, ce dernier estima que le plus utile était de continuer à observer les corps prussiens de la région.

    La IIe brigade de Cristiano Lobbia et la IVe de Ricciotti allaient chercher à freiner la marche des troupes prussiennes envahissant la Bourgogne depuis le nord-ouest.                                                                                                                                                           Nous avons plusieurs récits sur la bataille de Baigneux : celui de Ricciotti Garibaldi, celui du général Bordone, chef d’état-major de l’armée des Vosges, celui d’Edmond Thiébault, officier d’ordonnance de Ricciotti et enfin, celui, récent, d’un historien, Robert Molis.                             

    Voici d’abord ce que dit Ricciotti [ii]                                                            

    « Dans ce but, je décidai l’exécution d’un mouvement vers le Nord, c’est-à-dire sur le front des avant-gardes ennemies.

    Le 11 janvier, la quatrième brigade prend la route de Darcey.

    Dans cette localité nous recevons la nouvelle qu’une colonne fourragère est en train de prélever des vivres à Baigneux-les-Juifs.

    Tout de suite, je fais accélérer la marche et, en arrivant près de Villeneuve, deux compagnies, sous les ordres de Michard, sont poussées jusqu’à Villaines, avec l’ordre de prendre la route qui, de cet endroit, conduisait à Baigneux et de tailler ainsi la retraite aux Prussiens.

    En attendant, la brigade continuait sa route vers Baigneux.

    Arrivés à moins d’un kilomètre de cette localité, nous rencontrons une patrouille de cavalerie qui, attaquée par nos guides, est aussitôt obligée de tourner bride.

    La route, passant au milieu d’une bande de terrain ouvert, avec des bois à droite et à gauche, coupait à angle droit la crête de la colline et descendait ensuite de l’autre côté sur le  village.

    Cette crête était fortement occupée par les Prussiens qui reçurent nos tirailleurs par une très vive fusillade.

    Je fis avancer deux compagnies par l’extrémité du bois à droite, de manière à tourner la position de l’ennemi et pour l’obliger à se retirer par la route de Villaines.

    La manœuvre réussit parfaitement.

    L’ennemi, chassé de l’arête de la colline, se retira sur le village.

    Mais après un bref combat, il fut obligé d’abandonner aussi celui-ci et il recula dans la direction de Villaines en grand désordre, laissant entre nos mains douze prisonniers et trois voitures de subsistances.

    Le malheur voulut que Michard, retardé dans sa marche, ne fût pas encore arrivé à ce village, sinon les Prussiens, pris entre deux feux, seraient  probablement tous restés prisonniers.

    Ayant suspendu toute poursuite, nous sommes retournés à Baigneux, où nous avons trouvé un hôtel plutôt convenable.

    A notre demande s’il y avait quelque chose à manger, l’hôte répondit en souriant que le repas était prêt.

    Tant de chance nous surprenait.

    Nous étions si peu accoutumés à trouver les repas tout prêts !

    Mais l’hôte nous avoua que celui-ci avait été commandé par les officiers prussiens que nous avions chassés de là.

    Nous nous arrêtâmes dans ce village pour le restant de la journée, mais en prenant la précaution de bien nous couvrir par des postes avancés.

    Cependant, l’arrivée de quelque gros corps ennemi était probable et, dès le lendemain matin, à une heure après minuit, nous nous mettions en marche pour Aignay-le-Duc.

    Nos prévisions étaient justes : à six heures du matin, dans le village que nous venions d’abandonner, arrivaient deux mille Prussiens avec de la cavalerie et de l’artillerie, et selon leur habitude, ils mirent le pays sens dessus-dessous »[iii].

    Voici ensuite le récit d’Edmond Thiébault, franc-tireur de la quatrième brigade [iv] :                      

    « La journée du 10 janvier est consacrée à des reconnaissances, on observe l’ennemi.

    A Châtillon-sur-Seine, les forces prussiennes augmentent chaque jour dans d’inquiétantes proportions.

    Deux colonnes, fortes de plusieurs milliers d’hommes, occupent : l’une Villaines, l’autre Saint-Marc.

    Elles s’étendent jusqu’à Baigneux, Aignay-le-Duc, Montmoyen, Recey ; partout de fortes réquisitions.

    La nuit dernière, un fort détachement a fait une démonstration vers Sainte-Reine, où nos éclaireurs l’ont rencontré.

    Dans l’après-midi, le colonel Lobbia vient se mettre en communication avec nous, il nous apporte enfin quelques renseignements ; une marche est décidée pour le lendemain.

    Le 11 dans la matinée, la brigade, abandonnant la grande route, s’engage par des chemins impossibles dans la direction de Darcey.

    Le froid est devenu excessif, nous éprouvons les plus grandes difficultés à faire avancer nos voitures, les cavaliers eux-mêmes marchent avec peine sur les voies glacées.

    Quand nous arrivons à Darcey, nous rencontrons les éclaireurs de la 2e brigade qui nous signalent la présence de l’ennemi à Baigneux-les-Juifs.

    Un peu plus loin, les francs-tireurs Basques nous confirment ces renseignements ; les Prussiens viennent prendre possession des réquisitions qu’ils ont exigées la veille par un ordre de la municipalité.

    La colonne a repris sa marche dans la direction signalée.

    Quand elle arrive près du bois, au-dessus de Villeneuve, le colonel Ricciotti détache les deux compagnies de Savoie et les lance sur la gauche.

    Elles ont l’ordre de s’avancer jusqu’à la route qui conduit à Villaines et marcher ensuite sur Baigneux.

    Pendant ce temps, le reste de la brigade continue son mouvement.

     A peine arrivés en vue du village, nous distinguons les éclaireurs prussiens qui, faisant volte-face à notre vue, s’élancent au galop donner l’alarme ; on peut voir bientôt l’infanterie ennemie rangée en bataille sur la droite de Baigneux.

    Les compagnies sont immédiatement déployées dans la plaine couverte de neige.

    Les tirailleurs s’avancent sur deux lignes ; leur vaste développement permet d’envelopper tout le village.

    La fusillade commence par la droite dont le rapide mouvement doit rejeter les Prussiens sur les deux compagnies envoyées du côté de Villaines, leur arrivée est imminente.

    Cette manœuvre tournante devait pleinement réussir sans la promptitude obligée de l’attaque de la gauche qui, venant malheureusement couper la route à l’ennemi, le force à abandonner la position.

    Il se rejette alors derrière le village, se ménageant ainsi une retraite vers le bois qu’on aperçoit au bas de la route.

    Nos francs-tireurs avancent rapidement sous une vive fusillade, ils occupent successivement les maisons et les jardins que les Allemands sont impuissants à défendre ; ils sont bientôt maîtres du coteau qui domine le pays, dernière position que l’ennemi abandonne pour se retirer dans le plus grand désordre dans la direction d’Ampilly-le-Haut [v].

     La lutte avait duré une heure à peine.

    Les Prussiens laissaient entre nos mains 12 prisonniers et 3 voitures de vivres ; leurs pertes sont restées inconnues, elles devaient être sérieuses.

    De notre côté, nous avions 1 mort et 4 blessés.

    La brigade passe à Baigneux le reste de la journée sous la protection de grand’gardes sérieuses [vi].

    Les prisonniers sont immédiatement conduits au colonel Lobbia qui doit occuper Billy-les-Chanceaux et Poiseul-la-Grande ; il devra les faire accompagner au quartier-général [vii].

    Le 12 janvier à 3 heures du matin, nous reprenons notre marche vers Aignay-le-Duc ».

    Enfin, selon Robert Molis [viii] :                                                                                       « Selon le capitaine des Francs-Tireurs de l’Aveyron, c’est vers 2 heures après-midi que la Brigade trouva 200 ou 300 Prussiens au village de Baigneux.

    On commence à investir le village ; les Francs-Tireurs de « La Croix » (de Nice) appuient, à gauche, les Compagnies réunies de l’Aveyron et de l’Allier, tandis que la « Compagnie des Vosges » s’avance par la droite.

    Malheureusement, trois Uhlans, « faisant preuve d’une audace extraordinaire », se dirigent, au petit pas, vers le Colonel, lequel, croyant qu’ils venaient dire que la troupe se rendait, donne ordre de cesser la progression et de ne pas tirer.

    Quand Ricciotti revint de son erreur, il en commit une seconde en faisant courir sus aux Prussiens en formation de tirailleurs et non pas en colonne, « ce qui aurait permis d’arriver beaucoup plus vite »[ix].

    Bilan de la prise de Baigneux-les-Juifs : « quelques pertes », une voiture de réquisition prise, ainsi que, capturés par les Francs-Tireurs de l’Aveyron, 12 prisonniers dont un chirurgien. La plupart de ces Prussiens furent capturés par le Franc-Tireur Fabre et par le caporal Labro.

    Selon les Béarnais, ils n’étaient que 40 Francs-Tireurs, partis pour intercepter 80 cavaliers, qui virent déboucher 20 cavaliers et 200 fantassins.

    Ils firent le coup de feu eux-aussi, la colonne des Francs-Tireurs les ayant « débloqués ». Selon eux, les Prussiens eurent 2 tués, 9 blessés et 11 prisonniers ». 

    Mais, toujours selon Robert Molis, il y eut un désaccord entre les Francs-Tireurs :

    « le 11 janvier, ayant appris qu’une colonne réquisitionnaire venant de Jours et de Baigneux doit passer par là, les francs-tireurs du Béarn vont se poster sur la route entre La-Villeneuve-les-Convers et Baigneux-les-Juifs.

    Le renseignement était bon : 120 ou 150 Allemands se présentent en effet… aux yeux des Francs-Tireurs en même temps que débouche Ricciotti Garibaldi avec un millier d’hommes, venant de Flavigny et Darcey.

    Qui aura l’honneur d’ouvrir le feu ?

    Les Francs-Tireurs du Béarn, dit leur capitaine, prièrent Ricciotti de suspendre sa marche pour laisser les Prussiens arriver sur leur embuscade.

    Ricciotti refuse et le capitaine Grison note qu’il « juge plus utile de marcher sur Baigneux qu’il enlève, mais l’ennemi a le temps de fuir ».

     

    [i] Bordone (général) : « Garibaldi et l’armée des Vosges ; récit officiel de la campagne » ; Paris, 1871

    [ii] Ricciotti Garibaldi : « souvenirs de la campagne de 1870-71 », traduction de Philippe Casimir ; Nice, 1899

    [iii] Selon l’instituteur Pierre Genevoix ; il écrivit, en 1888, que « le 11 janvier1871, un petit détachement prussien escortant une voiture de réquisition fut attaqué à Baigneux par les francs-tireurs garibaldiens. Ce détachement put prendre la fuite… ;  « Cahiers du Châtillonnais ; monographie de la commune de Baigneux-les-Juifs », n° 2

    [iv] Thiébault Edmond : « Ricciotti Garibaldi et la 4eme brigade, récits de la campagne de 1870-71 » ; Paris, 1872

    [v] « Les tirailleurs, sous un feu de mousqueterie très vif, continuèrent à avancer ; ils occupèrent d’abord le village, puis un petit château qui est sur la lisière du bois » ; Bordone, op. cit.

    [vi] Même signification qu’avant-poste

    [vii] Le 12, les prisonniers arrivèrent à Dijon et entrèrent dans la cour de la préfecture ; Thiébault, op. cit.

    [viii] Molis Robert : « les Francs-Tireurs et les Garibaldi » ; Editions Tirésias, 1995

    [ix] Selon Léon Rodat, capitaine des francs-tireurs de l’Aveyron, cité par Robert Molis, op. cit.

     

    "La bataille de Baigneux-les-Juifs, le 11 janvier 1871", un notule d'histoire de Dominique Masson

    Figure 3 : acte de décès de Claude Carteau état-civil de Baigneux

    Deux francs-tireurs furent blessés et soignés par les sœurs pendant plusieurs semaines ;  le caporal Lacan, franc-tireur de l’Aveyron, « eut les deux cuisses traversées par une balle », mais il put par la suite repartir chez lui [i] ; par contre, Claude Carteau, franc-tireur du Doubs, lui aussi blessé, s’éteindra le 30 janvier 1871et sera inhumé au cimetière de Baigneux.

    Le lendemain, 12 janvier, les prussiens revenaient en force à Baigneux et ce fut le pillage.

    Pendant deux heures, les soldats allemands, pénétrant dans les maisons, se faisaient ouvrir les armoires et les caves et emportaient tout ce qui était à leur convenance.

    Aucune résistance ne se produisit de la part des habitants ; les objets pillés furent surtout des denrées de consommation et du linge.

    Le maire, M. Lombard, assez malmené, fut un certain temps gardé àvue à cent mètres du village et menacé de mort.

    Des canons, braqués sur les hauteurs, lancèrent quelques boulets dans la direction de Poiseul-la-Ville, afin d’attirer les francs-tireurs qui occupaient cette localité, pendant que des masses prussiennes importantes étaient cachées dans les bois voisins ; heureusement les francs-tireurs ne donnèrent pas dans le piège et Baigneux fut sauvé [ii].

    Pendant ce temps, Les Francs-Tireurs de la IIe brigade de Lobbia se sont mis en marche pour arrêter l’ennemi ; les Francs-Tireurs Républicains de Bigorre sont envoyés se poster, avec les Éclaireurs, à Courceaux, tandis que les Chasseurs d’Orient et les Francs-Tireurs Marins vont occuper Poiseul-la-Ville, et, en arrière, à Chanceaux, sont postés le Bataillon de l’Égalité et la Compagnie du Génie.

    Quant à Ricciotti, il arrivait à Aignay :                                                            

    « La route conduisant à Aignay était tout simplement infâme ; cette marche pénible sur une route impraticable, coupée encore de fréquents arrêts occasionnés par des alarmes, firent que notre arrivée à Aignay n’eut lieu que le soir à 9 heures ».   

     C’est le maire d’Aignay, M. Misset, qui les accueillit [iii]:

    « Les Francs-Tireurs sont arrivés à Aignay le 12 janvier 1871 à 6 h du matin.

    Ils étaient au nombre de 1 200, commandés par Ricciotti ; ils avaient 104 chevaux et venaient du canton de Baigneux.

    Leurs bagages étaient conduits par quelques cultivateurs des environs de Tonnerre, absents de leur pays depuis une douzaine de jours.

    Ils furent remplacés par 6 voitures et 18 chevaux d’Aignay chargés de conduire à Dijon les munitions de la Brigade.

    Nos hommes ont été absents six jours, sans toucher de rétribution.

    Ce corps a été bien accueilli par les habitants chez lesquels les soldats se logèrent à leur fantaisie.

    La plupart des compagnies étaient composées d’hommes assez convenables, mais il y en avait parmi eux un certain nombre, 30 ou 40 , mauvais sujets, indisciplinés, insolents même pour leurs chefs, et dont le Chef d’état-major désirait vivement être débarrassé.

    Nous n’avons remarqué dans cette troupe que 50 ou 60 Italiens portant la chemise rouge ; la plupart étaient des ivrognes.

    J’avais chez moi, avec Ricciotti, ses Officiers intimes ; son secrétaire, faisant fonction de Chef d’état-major, était un M. Thiébault, connu à Dijon, homme de bonnes façons, maintenant le plus possible l’ordre et la discipline… »                     

       Ricciotti poursuit :

    « Ce village est situé au fond d‘un trou, c’est donc une très mauvaise position à tenir, et qui nécessite des lignes très étendues d’avant-postes et de nombreuses patrouilles.

    Pendant la nuit j’organisai, au moyen d’habitants qui m’avaient offert leurs services, un bon service d’informations avec les localités voisines

    (voici ce qu’en dit Edmond Thiébault :

    « Dans la nuit, nos éclaireurs se sont mis en communication avec les maires des villages qui nous entourent au loin.

    Ces fonctionnaires ont eux-mêmes envoyé d’autres éclaireurs plus en avant, et nous transmettent des notes qui nous confirment les différentes positions de l’ennemi et ses mouvements »).

    Ainsi j’appris qu’une forte colonne prussienne occupait Villaines ; une autre, Saint-Marc et une troisième, Saint-Broing-les-Roches.

    Un détachement fort de 5 000 hommes occupait Grancey ; un autre, plus fort, marchait sur Auberive.

    De sorte que notre position était des plus précaires…                                             

    Arrivés à Aignay… au soir, je voulus moi-même placer nos avant-postes, ce qui n’était point facile en pleine obscurité.

    Puis, retourné au quartier-général, je reçus les rapports ; je donnai des instructions aux commandants de compagnies ; j’organisai avec lesautorités locales le service d’informations civiles, enfin je pris un peu de nourriture ; tout cela nous mena jusqu’à minuit…

    Je m’endormis et, à 3 heures, l’officier de service me réveilla pour faire la ronde habituelle aux avant-postes-opération nécessaire, parce que c’est généralement à l’aube que se produisent les surprises, et à ce moment surtout il faut être bien sûr que tout est en ordre.

    A ma très grande surprise, je constatai que tout mon système d’avant-postes, que j’avais organisé avec tant de soins dans la soirée, était radicalement changé.

    Avec la rigide discipline qu’il fallait, surtout en service, cela me préoccupait.

    Aussi, dès le retour au quartier-général, fis-je appeler quelques commandants de compagnie pour leur demander la raison deces changements.

    Ils se montrèrent, eux, plus surpris encore que moi.

    L’un d’eux, Rostaing, me dit que, pendant la nuit, des patrouilles ennemies s’étaient approchées, ils vinrent pour me demander ce qu’il fallait faire, et que j’avais alors consulté ma carte, puis donné des ordres précis à ce propos.

    Je restai stupéfait à cette nouvelle complication, lorsque Arnaud, des savoyards, me dit, en riant :

    « Je m’en doutais déjà, commandant, mais maintenant j’en suis certain ; nous sommes venus effectivement vous faire nos rapports et vous nous avez donné les ordres nécessaires, mais, tout cela, vous l’avez fait en dormant ».

    Par cette pointe jusqu’à Aignay, nous avions traversé tout le front de l’armée de Manteuffel.

    Maintenant, il s’agissait de se retirer en maintenant toujours le contact avec cette armée.

    Dans ce but, le lendemain, nous nous repliâmes vers le Sud et, le soir, nous arrivions à Avot-le-Grand [iv].

    Une autre étape nous amenait à Is-sur-Tille ».

     

    [i] Selon Robert Molis, il fut laissé dans une maison de Baigneux

    [ii] Genevoix Pierre ; op. cit.

    [iii] Lettre de M. Misset, du 15 juin 1872, à la « Commission d’Enquête » ; cité par Robert Molis, op. cit.

    [iv] En passant par Etalante, Salives et Barjon ; Bordone, op. cit.

     

    "La bataille de Baigneux-les-Juifs, le 11 janvier 1871", un notule d'histoire de Dominique Masson

    Figure 4 :première ligne d'avancée des garibaldiens, du 10 au 16 janvier, au nord-ouest de Château-Chinon à Langres; deuxième ligne autour de Dijon, le 20 janvier (Bordone, opus cité)

    Le 16,  Ricciotti et la quatrième brigade se repliaient à Dijon, où Giuseppe Garibaldi se trouvait depuis le 7 janvier, ayant quitté Autun par chemin de fer [i].

    Pendant cette même période, à Châtillon, le 12 janvier au soir, arrivait le général Manteuffel, qui avait pris le 11, à Versailles, ses instructions auprès du grand état-major.

    Là, il opéra sa jonction avec les généraux von Zastrow et Fransecki [ii], pour se porter au secours du général von Werder, qui était autour de Dijon et essayait de couper la retraite au général Bourbaki [iii].

    Si le point de concentration choisi par von Moltke fut Châtillon, c’est parce qu’il en connaissait l’importance stratégique ; Châtillon avait en effet le double avantage de se relier par des voies ferrées à Chaumont, à Troyes, à Nuits-sous-Ravières, sur la ligne de Paris à Lyon, et d’être comme une position centrale en avant des défilés de la Côte d’Or.

    C’est là que les forces de l’armée du sud se réunirent, à l’entrée des vallées profondes de l’Aujon, de l’Aube, de l’Ource et de la Seine, dans les sinuosités desquelles s’enfoncent, à des intervalles de 10 à 15 kilomètres, quatre routes montueuses qui, par des rampes escarpées, conduisent aux hauts plateaux entre Langres et Dijon [iv]. Ces généraux repartirent le 14.                                                                                                                                                Le 21 janvier commençait la troisième bataille de Dijon.

    [i] Le général von Moltke, conscient du danger que représente l’armée de l’Est, avait fait évacuer Dijon le 27 décembre pour organiser une ligne de défense à l’ouest de Belfort

    [ii]Selon Léon Legey (« Châtillon-sur-Seine pendant la guerre de 1870-71 ; souvenirs d’un enfant de Châtillon » ; Châtillon, 1899), Manteuffel trouva à Châtillon von Zastrow et von Hosten-Iaken  ; selon P.A Dormoy, Manteuffel trouva à Châtillon le 7e corps d’armée de Zastrow et le 2e corps d’armée, de Fransecki ; celui-ci passa par Nuits, Montbard, Chanceaux et Is-sur-Tille, tandis que Zastrow partit en direction de Langres, par Recey, Auberive et Prauthoy (« Guerre de 1870-71 ; les trois batailles de Dijon, 30 octobre, 26 novembre, 21 janvier » ; Paris, 1894)

    [iii] Les Prussiens s’attendaient à être attaqués le lendemain et avaient averti le maire de Châtillon de prendre ses précautions ; dans les jours suivants, des barricades furent élevées ; le général von Moltke avait créé une armée du sud, confiée au général von Manteuffel, pour contrer l’armée du général Bourbaki

    [iv] Revue des Deux Mondes ; 1872, tome 102, p. 786

     

    "La bataille de Baigneux-les-Juifs, le 11 janvier 1871", un notule d'histoire de Dominique Masson

    Figure 5 : les mouvements des troupes françaises et prussiennes autour de Dijon; "La guerre de  70" François Roth, Paris

    (Dominique Masson)

     

     


    2 commentaires
  • Voici un notule d’histoire de Dominique Masson, historien du Châtillonnais , sur un épisode peu connu qui s'est passé à Châtillon sur Seine en décembre 1870.

    Merci à lui de nous éclairer avec tant de précision sur cette exécution de Léon Vigneron par les Prussiens, exaspérés par l'attaque contre eux, des francs-tireurs de Riciotti Garibaldi.


    L’exécution de Léon Vigneron, le 19 décembre 1870

    Le 19 juillet 1870, l’empire français, dirigé par Napoléon III, entrait en guerre contre la Prusse de Guillaume Ier et ses alliés allemands.

    Après la défaite française à Sedan et l’abdication de l’empereur français, la troisième République fut proclamée deux jours après, le 4 septembre, mais la guerre va continuer.

    Giuseppe Garibaldi, avec ses fils, vint se mettre au service de la jeune République et rejoignit Tours, siège de la délégation gouvernementale hors de Paris assiégé.

    Gambetta lui confie alors le commandement de tous les corps francs de la zone des Vosges, de Strasbourg à Paris. Ces francs-tireurs sont des corps de volontaires, plus ou moins organisés et plus ou moins importants, qui se lèvent contre les troupes prussiennes et qui combattent parallèlement à l’armée régulière.

    Le 31 juillet 1870, une circulaire ministérielle française admit le principe de compagnies de francs-tireurs, engagées pour la durée de la guerre.

    Mais, du côté prussien, on juge qu’ils font une guerre déloyale, organisant des embuscades, des surprises ou des coups de main, et ces attaques inquiètent l’état-major.

    Aussi le commandement prussien leur refusera toujours la qualité de belligérant : Tout franc-tireur sera assimilé à un malfaiteur ; il sera passible du conseil de guerre immédiat qui peut prononcer la peine de mort.

    S’il est établi que dans un village un tireur non identifié a attaqué des soldats, celui-ci sera déclaré responsable et subira des représailles

    .
    Le 19 novembre 1870, Ricciotti Garibaldi, avec les francs-tireurs de Dôle, des Vosges et du Dauphiné, ainsi que les chasseurs du Havre et de Savoie et le bataillon Nicolaï, opéraient une surprise à Châtillon, tuant neuf prussiens, et surtout récupéraient des armes, la caisse du régiment et des chevaux .

    Mais les francs-tireurs n’étaient pas assez nombreux pour occuper la ville et l’évacuèrent le soir.

    Les prussiens prirent une quarantaine d’otages et les emmenèrent sur la route de Langres, où ils passèrent la nuit, avant d’être peu à peu libérés.

    Mais six otages, dont le maire, furent emmenés à Châteauvillain.

    Le 22, les prussiens revinrent en force à Châtillon, pillèrent la ville et imposèrent une contribution financière.

    C’est dans ce contexte qu’arriva l’exécution de Léon Vigneron.

    On a beaucoup dit sur lui, mais certains points sont à corriger.


    Edme Vigneron est né le 13 avril 1834, à Marac, en Haute-Marne, fils de Pierre Vigneron, pâtre, et de  Nicole Garnier ; son acte de naissance ne porte qu’un seul prénom, celui d’Edme, et on ne sait pourquoi il fut appelé par la suite Léon.

    Il se maria le 22 février 1857 avec Eugénie Gachet, à Neuilly-sur-Suize ; il est à ce moment déclaré habiter à Neuilly et est déclaré «  domestique » et il signe : Léon Vigneron.

    Achille Maitre écrira, en 1870, qu’il « n’était marié que depuis quelques jours » .    

    Il revint habiter à Marac ensuite, mais on ne sait quand, et il ne semble pas avoir eu de descendance.

     

    "L'execution de Leon Vigneron

    Figure 1 : signature de "Léon"Vigneron sur son acte de mariage en 1857 et de sa femme

    "L'execution de Leon Vigneron

    Figure 2 :Acte de naissance d'"Edme" Vigneron, état-civil de Marac (52)

    Suivons maintenant le récit fait par Gaudelette [i] 

    Le jeudi 11 décembre 1870, des troupes de la garnison de Langres étaient sorties pour essayer de surprendre un fort détachement de Prussiens qui se trouvait à Châteauvillain, mais l’ennemi ayant été averti, la tentative échoua, et les troupes rentraient deux jours après à Langres, laissant deux compagnies à Marac et deux autres compagnies dans un village voisin.

    Le dimanche 14, on signala les Prussiens, au nombre de 3 à 4 000, à peu de distance du village.

    Aussitôt les deux compagnies, auxquelles s’étaient joints quelques gardes nationaux de la localité, se déploient en tirailleurs dans les jardins, font une vigoureuse résistance ; mais, n’étant pas en nombre, ils durent se replier sur Langres.                                                             

    Louis Vigneron ne se trouvait pas en ce moment au village ; il était dans un moulin situé à un kilomètre de là, où il s’occupait tranquillement des soins du moulin où il était simple domestique.

    Il apprend tout à coup que l’ennemi est à Marac, qu’on lui oppose de la résistance ; alors, n’écoutant que son ardent patriotisme, faisant taire ses sentiments de père et d’époux, il n’hésite pas un instant ; il prend un fusil de chasse chez son maître, court à Marac, se met en embuscade derrière un mur de jardin et, sans s’occuper de ce qui peut advenir, décharge ses deux coups de fusil sur des Prussiens qui passaient à distance.

    Aussitôt il est poursuivi par les uhlans qui, après quelques minutes, s’en emparent.

    Dans sa fureur, l’ennemi pille les premières maisons du village et s’empare des notables qui sont emmenés à Arc-en-Barrois.                                                                                         

    Quant à Louis Vigneron, il fut emmené à Châtillon avec d’autres prisonniers.

    Accusé d’avoir protégé les francs-tireurs et d’avoir agi de complot avec eux, quoique cela n’ait pas été prouvé, il fut condamné sommairement à être fusillé.

                                                                        Gaudelette l’appelle Louis, alors que son prénom est Edme, et, plus tard, il sera gravé qu’il se prénommait Léon.

    Par contre, Gaudelette dit bien qu’il n’était que domestique au moulin de Marac.

    Mais, comme il fut pris au moulin, le commandant en chef prussien le qualifia de « meunier », et c’est aussi ce qui sera gravé par la suite.        

     

    [i] Gaudelette Michel : histoire de la guerre de 1870 en Bourgogne ; Paris, 1895

    "L'execution de Leon Vigneron

    Figure 3 : condamnation de Vigneron par Von Delitz (archives Municipales Châtillon sur Seine)

    Léon Vigneron fut emmené à Châtillon et enfermé dans la même prison que les dix habitants de Thoires arrêtés le 14 décembre ; ce sont eux qui eurent la douleur de lui donner la dernière accolade[i].

     On possède deux récits concernant ses derniers moments, à la maison d’arrêt.

    Voici celui relaté par son directeur, M. Jamet :

    J’avais arboré le drapeau de la convention de Genève pour protéger et faire respecter la maison ; cela fut inutile.

    Les prussiens au nombre de 180 envahirent et prirent possession de l’établissement sans autre préoccupation…..

    Quelques jours après cette prise de possession les allemands amenèrent maire et notables des environ pris en otages et m’enjoignirent de les nourrir … j’ai répondu au chef que n’avais pas assez de provision.

    Il me répondit par un effroyable coup de poing qui me renversa et au même moment ma femme qui faisait la même réflexion fut frappée violemment d’un coup de la crosse de fusil sur la poitrine…

    Le 21 décembre[ii]à 7 heures du matin on m’intima l’ordre d’aller chercher un nommé Léon Vigneron qui avait été arrêté le 30 novembre[iii]

    Le malheureux avait été accusé d’avoir tiré sur eux.

    J’allai le chercher dans la salle des passagers ou il couchait et l’emmenai chez moi où on lui lut sa sentence de mort et un quart d’heure plus tard il n’était plus…[iv] .

    En 1872, Emile Montégut [v] recueillit le témoignage de la femme du directeur :

    Les Prussiens l’accusaient d’avoir protégé les francs-tireurs et d’avoir agi de complot avec eux, quoique cela n’ait pas été prouvé.

    C’est celui-là qu’ils choisirent pour se venger.

    J’entends encore, j’entendrai toujours, je crois, le cri que poussa ce malheureux lorsqu’on lui annonça qu’il allait être fusillé.

    Il demanda qu’on lui laissa le temps d’écrire au moins à sa femme, ce qui lui fut accordé avec beaucoup de difficulté.

    Il écrivait tout en tremblant, comme vous pouvez le croire, en sorte que cela ne marchait pas bien vite ; alors un officier s’avança et lui dit brusquement :

    « Un mot, rien qu’un mot, vous m’entendez bien, et dépêchons-nous, nous avons autre chose à faire qu’à vous expédier ».

    Puis ils l’ont amené contre le mur du cimetière et ils l’ont fusillé.

    Gaudelette ajoute :

    Puis il écouta les exhortations de l’abbé Lecœur, aumônier de l’hospice, fut aussitôt amené contre le mur du cimetière et fusillé.

    Il se trouva dans le peloton d’exécution des soldats qui ne voulurent pas prêter les mains à cet acte odieux ; leurs balles furent ramassées le lendemain au pied du mur, contre lequel elles s’étaient aplaties, dans un rayon assez éloigné. 

    Et madame Jamet poursuit :

    Il a été enterré à cette place même où il est tombé, avec les habits qu’il portait, sans qu’on ait pu le mettre dans une bière.

    En fait, selon Gaudelette :

    le corps de Vigneron fut ensuite littéralement traîné dans la neige jusqu’à l’entrée du cimetière.

    Comme aucune fosse n’avait été préparée, on le recouvrit seulement de quelques pelletées de terre, avec défense expresse de toucher au corps.

    Quelques jours après, en raison de la mauvaise odeur répandue par le cadavre, la municipalité obtint l’autorisation de le faire disparaître sous un monticule de terre

     Il dut être enterré au cimetière Saint-Vorles mais, le 23 novembre 1876, il fut exhumé et ses restes transférés au cimetière Saint-Jean pour y être enterrés avec ceux des francs-tireurs tués lors de l’attaque garibaldienne [vi].                                                                                                                       A l’endroit où Léon Vigneron fut fusillé, M. des Etangs, membre du conseil municipal et président du tribunal civil de première instance, fit ériger une croix en pierre, sur laquelle on peut lire une inscription qu’il rédigea lui-même :

                A Léon Vigneron/sa/veuve                                                                                                                                                                                                                   Garde Nata lpris à Marac le 11 /  X bre 1870 fusillé ici / le 19 par les prussiens il est /mort en chrétien et pour la /patrie                                                                                                                                                      

     Que Dieu / préserve / à jamais / la France / de frapper /le vaincu / désarmé et / de punir le / patriotisme comme un / crime[vii]

     En 1915, lors d’une manifestation patriotique organisée par le Souvenir Français et les blessés valides des hôpitaux, des palmes furent posées sur cette croix. Ce n’est que par la suite qu’une balustrade fut ajoutée, lui donnant l’apparence d’une tombe.

     [i] Lors de l’attaque de Châtillon par les Garibaldiens, plusieurs prussiens affolés s’enfuirent au hasard dans la campagne ; trois se laissèrent capturer par les habitants de Thoires ; le 14 décembre, le village fut cerné par un détachement prussien qui les récupéra et emmena en retour dix habitants de Thoires comme prisonniers, à Châtillon ; Diey Michel : 1870-1871, la guerre oubliée dans le Châtillonnais, Cahiers du Châtillonnais, n° 151

    [ii] Erreur de date ; de même pour l’horaire

    [iii] Von Delitz, dans sa pancarte, indique 6h 1/2 ; Achille Maitre écrit : « Le 19 décembre, à 6 heures ½ du matin, on entendait un feu de peloton du côté du cimetière de Saint-Vorles ».

    [iv] M le préfet, 1er Août : « M. le gardien chef de la maison d’arrêt de Châtillon sur Seine vient de m’adresser, que j’ai l’honneur de vous transmettre, son rapport au sujet des faits qui se sont passés dans son établissement sous l’occupation prussienne, des dégâts de toute nature qui y ont été commis et des exactions….dont il a été témoin personnellement ainsi que sa famille. M. l’architecte du département a visité l’établissement depuis son évacuation…. J’ai eu l’honneur de vous adresser ainsi qu’à M. le ministre de l’intérieur des propositions pour qu’il fût alloué au directeur de la maison d’arrêt une indemnité de 200 francs en raison des pertes et mauvais traitements qu’il a subis…. Je vous prie d’agréer monsieur le préfet l’assurance de mon respect » ; signé le directeur.

    [v] Montégut Emile : Impressions de voyage et d’art, souvenirs de Bourgogne ; in « Revue des deux mondes », premier mars 1872

    [vi] Diey Michel : chronique : à propos de la tombe de Léon Vigneron, Cahiers du Châtillonnais, 2004, n°189 

    [vii] «… sa veuve… » : ces mots sont souvent oubliés dans les livres rapportant cette inscription

    "L'execution de Leon Vigneron

    Figure 4 : le "monument" de Léon Vigneron, carte postale Parisot

    "L'execution de Leon Vigneron

    Figure 5 : le "monument" de Léon Vigneron, cliché Dominique Masson

    Le peintre Victor Didier, en 1882, raviva le souvenir de cette exécution en faisant une peinture représentant l’exécution de Vigneron [i].

    Sur ce tableau, les soldats prussiens attendent un peu plus loin que la sentence soit lue et on distingue au loin un mur.

     [i] Victor Didier (1837-1889), est un peintre châtillonnais ; il fut professeur de dessin au lycée de Châtillon

    "L'execution de Leon Vigneron

    Figure 6 : Reproduction du tableau de Victor Didier, photo-carte

    Mais il semble que, la même année,  ce même peintre fit un deuxième tableau, avec des variantes par rapport au premier ; il rajouta l’abbé Lecœur, à genoux, et disposa différemment le peloton d’exécution ; celui-ci est face à Vigneron et un officier se tient devant, prêt à sortir son sabre pour commander le feu [i].

    C’est cette version que reprit, en carte postale, l’éditeur châtillonnais H.Bogureau.

     [i] Ces deux tableaux semblent avoir disparu

    "L'execution de Leon Vigneron

    Figure 7 : Dessin de L.Breuil dans l'ouvrage de Gaudelette

    Ceci permit également, par l’intermédiaire des cartes postales, d’entretenir un certain patriotisme.

    "L'execution de Leon Vigneron

    Ce tableau de l’exécution de Vigneron fut repris dans le livre de Gaudelette, paru en 1895 ; L.Breuil en fit un dessin,à partir du tableau de Victor Didier, en modifiant un peu l’arbre derrière Vigneron et en ajoutant au fond un hangar.

    "L'execution de Leon Vigneron

    Figure 8 : L'exécution de Léon Vigneron, carte postale , H.Bogureau

    Si Vigneron avait été fusillé à Châtillon, son décès ne fut pas porté sur les registres de l’état-civil.

    Le maire de la commune de Marac, au nom de la veuve de Vigneron, intervint, tendant à obtenir un jugement auprès du tribunal de Châtillon, pour suppléer à l’acte de décès de son mari qui n’a pas été rédigé.

    Après audition des témoins, le tribunal, le 25 avril 1871, constata qu’il fallait réparer cette omission ; le jugement rendu indiqua qu’il tenait lieu de l’acte de décès qui n’a pu être dressé en raison des circonstances, et qu’il serait transcrit dans les registres de l’état-civil de l’année courante ; le maire s’exécuta le 4 mai 1871 ; l’acte porte le numéro 93.

    "L'execution de Leon Vigneron

    Figure 10 : jugement inséré dans les actes de l'état-civil de la Commune de Châtillon sur Seine (1871)

    Dominique Masson

    (remerciements à MM. Massé et Millot)

     


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  •   Günter Wiesendahl, l'historien de la ville de Hamm en Westphalie, qui m'a envoyé son passionnant article sur la "surprise de Châtillon" du côté prussien, que vous pouvez relire ici :

     

    http://www.christaldesaintmarc.com/la-surprise-de-chatillon-vue-du-cote-prussien-a204230112

     

    m'a aussi fait des révélations extraordinaires : des soldats français, qui ont été emmenés par les allemands, en tant que prisonniers, durant cette guerre de 1870, et qui sont morts là-bas, reposent dans le cimetière de sa ville !

    Ecoutons monsieur Wiesendahl :

     

      Je me suis intéressé à la guerre en 1870/71 lorsque j'ai remarqué les tombes des soldats dans le cimetière Est de Hamm. Au début, je n'avais aucune explication. Pourquoi des tombes de soldats à Hamm, également avec des noms français, puisque la guerre n'avait eu lieu qu'à partir du sol français?


    Au début, mon enquête était très imparfaite, mais ensuite les sources ont bouillonné. J'ai ensuite résumé mes résultats de recherche dans un essai que je vous ai déjà envoyé. "L'attaque de Châtillon" du 19 novembre 1870 a occupé pendant des semaines une large zone de notre quotidien ("Westfälischer Anzeiger").


     Hamm était déjà une importante jonction ferroviaire en 1870 à travers laquelle de nombreux soldats blessés et malades ont été transportés pendant la guerre.

     

    Un grand nombre de ces soldats allemands et français sont restés à Hamm et ont été placés dans des hôpitaux de fortune.

     

    Les femmes Hammer s'occupaient des soldats sous surveillance médicale.

     

    Beaucoup ont été relâchés en bonne santé - mais certains sont morts à Hamm.

     

    Ceux-ci ont été enterrés dans le cimetière de Hamm dans une zone séparée pour les soldats catholiques et les soldats protestants.

     

    Aucune distinction n'a été faite entre les soldats français et les soldats allemands.

     

    Ils se trouvent côte à côte dans l'ordre dans lequel ils sont morts et leurs tombes portent une simple pierre avec leur nom de famille.

     

    Des soldats français ont également été enterrés avec les honneurs militaires.

     

    Certains parents ont décoré les tombes après la guerre avec des dalles ou monuments funéraires élaborés.

     

    Une famille française était également à Hamm pour ériger un monument.

     

    Les tombes ont survécu intactes depuis 150 ans et sont maintenant sous la protection des monuments, à ma suggestion.

     

    Les tombes des soldats dans les deux parties du cimetière doivent maintenant être réparées après 150 ans. Les pierres doivent être nettoyées et soulevées et les écrits doivent être rendus plus visibles. J'espère que suffisamment d'argent pourra être collecté pour cela.

     

     Voici le plan d'une partie des tombes des soldats enterrés au cimetière de Hamm ,vous pourrez y lire le nom de soldats français :

     

    La "Surprise de Châtillon" vue du côté prussien !!

     Voici les photos de ces tombes :

    Des soldats français tombés pendant la guerre de 1870 sont enterrés en Allemagne, dans la ville de Hamm

    Des soldats français tombés pendant la guerre de 1870 sont enterrés en Allemagne, dans la ville de Hamm

    Soldat Garny :

    Des soldats français tombés pendant la guerre de 1870 sont enterrés en Allemagne, dans la ville de Hamm

    Doldat Grosgogeat :

    Des soldats français tombés pendant la guerre de 1870 sont enterrés en Allemagne, dans la ville de Hamm

    Soldat Buduin :

    Des soldats français tombés pendant la guerre de 1870 sont enterrés en Allemagne, dans la ville de Hamm

    Soldat Couty :

    Des soldats français tombés pendant la guerre de 1870 sont enterrés en Allemagne, dans la ville de Hamm

    Soldat Julie :

    Des soldats français tombés pendant la guerre de 1870 sont enterrés en Allemagne, dans la ville de Hamm

    Sodat Lenoir :

    Des soldats français tombés pendant la guerre de 1870 sont enterrés en Allemagne, dans la ville de Hamm

    Soldat Diou :

    Des soldats français tombés pendant la guerre de 1870 sont enterrés en Allemagne, dans la ville de Hamm

    Soldat Tirel :

    Des soldats français tombés pendant la guerre de 1870 sont enterrés en Allemagne, dans la ville de Hamm

    Soldat Melzassard :

    Des soldats français tombés pendant la guerre de 1870 sont enterrés en Allemagne, dans la ville de Hamm

    Soldat Lavery :

    Des soldats français tombés pendant la guerre de 1870 sont enterrés en Allemagne, dans la ville de Hamm

    Soldat Puenae :

    Des soldats français tombés pendant la guerre de 1870 sont enterrés en Allemagne, dans la ville de Hamm

    Soldat Guerin :

    Des soldats français tombés pendant la guerre de 1870 sont enterrés en Allemagne, dans la ville de Hamm

    Soldat Pincet :

    Des soldats français tombés pendant la guerre de 1870 sont enterrés en Allemagne, dans la ville de Hamm

    Soldat Javey :

    Des soldats français tombés pendant la guerre de 1870 sont enterrés en Allemagne, dans la ville de Hamm

    Soldat Philippe :

    Des soldats français tombés pendant la guerre de 1870 sont enterrés en Allemagne, dans la ville de Hamm

    Soldat Durand :

    Des soldats français tombés pendant la guerre de 1870 sont enterrés en Allemagne, dans la ville de Hamm

    Soldat Marcheron :

    Des soldats français tombés pendant la guerre de 1870 sont enterrés en Allemagne, dans la ville de Hamm

    Soldat Teulières

    Des soldats français tombés pendant la guerre de 1870 sont enterrés en Allemagne, dans la ville de Hamm

    Soldat Linard :

    Des soldats français tombés pendant la guerre de 1870 sont enterrés en Allemagne, dans la ville de Hamm

    Soldat Lorenzot :

    Des soldats français tombés pendant la guerre de 1870 sont enterrés en Allemagne, dans la ville de Hamm

     

     En 2010, Gunter Wiesendahl a fait des recherches approfondies sur les tombes et il a noté son enquête dans un essai que voici :

     

      (Hélas, ce texte est en allemand, je n'ai pu le traduire, si des germanistes peuvent le faire ce serait sympa d'en donner la traduction)

     

     

     Monsieur Wiesendahl me révèle aujourd'hui une très bonne nouvelle :

    Le pasteur de l'Église catholique m'a promis que les tombes des soldats dans la partie catholique de l'Ostenfriedhof à Hamm seront rénovées au printemps. L'argent est disponible. La plupart des Français y sont enterrés. Je dois encore intervenir un peu auprès de la paroisse protestante.

     


    1 commentaire
  •  J'ai reçu, au début de l'année 2020, un mail venant d'Allemagne qui m'a beaucoup intéressée et auquel j'ai immédiatement répondu.

    Voici la teneur de ce mail :

    Bonjour ChrisTal,

     

    En cherchant sur Internet des informations sur le raid de Châtillon 1870, j'ai par hasard trouvé votre blog du 9 juillet 2008.

     

    Je m'intéresse  à cet événement de la guerre franco-prussienne, car les soldats allemands qui ont combattu à Châtillon viennent de ma ville natale de Hamm, en Westphalie, et des environs.

     

     Je suis ingénieur en mécanique et je travaille sur une base volontaire depuis plus de 40 ans dans l'archéologie et la préservation des monuments de ma ville natale de Hamm. La recherche sur l'histoire de la ville est l'une de mes priorités.

     

    Des échanges intenses avec cet historien allemand ont suivi, car ce monsieur me demandait des photos des monuments allemands au cimetière Saint-Jean de Châtillon, et les renseignements côté français, de la fameuse "surprise de Châtillon".

    J'ai tout de suite envoyé ce mail à Dominique Masson qui est immédiatement entré dans nos échanges. Dominique Masson et moi lui avons  fait des photos, je lui ai envoyé les cahiers du Châtillonnais concernant la guerre de 1870 dans notre région, Dominique Masson lui a confié des documents tirés de ses archives personnelles.

    Günter Wiesendahl, c'est le nom de cet historien passionné, a ensuite rédigé un article dans le journal de la ville de Hamm, et voici ce qu'il m'a annoncé hier :

     

    Notre quotidien de Hamm, le "Westfälische Anzeiger", a publié aujourd'hui mon article sur "l'attaque de Châtillon".

    L'essai a dû être raccourci par moi en raison de l'espace limité. Certaines images n'ont pas pu être imprimées non plus.

     

    Je ne vous envoie donc pas seulement la page du journal, mais aussi l'intégralité de mon article sous forme de fichier PDF.

     

    Voici donc l'histoire de la "surprise de Châtillon" vue du côté prussien,

    racontée par Günter Wiesendahl. En comparant avec celle contée par Ricciotti Garibaldi, vous verrez qu'elle est bien différente, ce qui est bien normal !

     

     http://www.christaldesaintmarc.com/garibaldi-la-surprise-de-chatillon-un-notule-d-histoire-de-dominique-m-a204217938

     

    Le PDF de Günter Wiesendahl était en langue allemande, trop long et trop lourd pour être publié ici, j'ai donc essayé de le traduire à l'aide d'un traducteur "automatique", puis de le présenter d'une autre manière.

    J'ai été obligée de reconstruire les phrases traduites pour qu'elles soient compréhensibles, mais je suis sûre de ne pas les avoir trahies.

    Voici donc :

     Der Überfall von Châtillon-sur-Seine

    (L'attaque de Châtillon sur Seine)

     (Un épisode de la guerre franco-prussienne de 1870/71)

    ( Günter Wiesendahl, novembre 2020)

     Au petit matin du 19 novembre 1870, au milieu de la guerre franco-prussienne, les soldats d'occupation allemands dans la petite ville française de Châtillon-sur-Seine en Bourgogne furent réveillés par de violents coups de feu.  Une commande d'irréguliers français qui venait de deux directions pénétra dans la ville vers six heures et attaqua l'occupation allemande.

    Châtillon est situé au nord-ouest de Dijon sur la haute Seine et était une ville étape importante pour les troupes allemandes en raison de son emplacement sur une voie ferrée.

    "La surprise de Châtillon" ...vue du côté prussien !

     Cette attaque à Châtillon a été un coup de tonnerre pour les habitants de la ville de Hamm et de la région

     Etait sur place le bataillon de défense Unna, dont la plupart des soldats venaient de Hamm et des villages environnants.

     Le service militaire  chez les Prussiens commençait à l’âge de  20 ans, il comprenait trois ans de service actif et deux ans dans la réserve pour servir en cas de guerre.

    Ensuite, le service Landwehr allait jusqu’au  39e anniversaire de l'individu, toujours en service dans le Landsturm pour des menaces de guerre extrêmes, et même s’il le fallait jusqu'à l'âge de 50 ans.

     Les soldats de la Landwehr étaient souvent des pères de famille dont les défenses et les soins de la famille étaient un lourd fardeau. Leur tâche dans la guerre consistait à sécuriser l'arrière-pays ennemi capturé, en particulier les lignes d'approvisionnement.

    Le membre du parlement de l'état Louis Wilhelm Uhlendorff a passé trois jours après la Déclaration de guerre française le 22 juillet 1870 à Hamm.

     "la foule robuste des ruraux Wehrmänner ", a rejoint le 2e bataillon (Unna) du 3e régiment Westphalian Landwehr No.16

    Pendant  presque quatre mois, leur effort de guerre s'est passé sans contact avec l’ennemi.

     Le 12 septembre, ils étaient à Saargemund puis à Pont-à-Mousson, le 16 novembre ils sont partis de Chaumont en deux jours de marche pour Châtillon-sur-Seine.             

     Le bataillon a été affecté à trois compagnies (472 hommes),  il a rétréci, et a ensuite été remplacé par un escadron du 5e Réserve du régiment de hussards (93 hommes) renforcé.

     Le bataillon et état-major régimentaire de la Landwehr étaient sous la direction du major von Bockelmann , du colonel von Lettgau et du major von Alvensleben .

    L'état-major du régiment de hussards avait également emménagé dans ses quartiers à Châtillon.

    "La surprise de Châtillon" ...vue du côté prussien !

     Le quartier-maître qui avait été envoyé en avant, avait choisi des quartiers privés parce que l'hébergement de masse proposé ne semblait pas utile.
    C'est comme cela qu'ont été distribués des soldats dans les maisons privées de toute la ville, qui comptait environ 4 900 habitants.
    Les officiers des hussards ne se sentaient pas à l'aise avec ce type d'hébergement, aussi ils se sont organisés autrement :
    Ils ont réquisitionné  trois grandes granges et y ont logé leurs cavaliers avec les chevaux.
    Cependant, eux-mêmes ont emménagé dans des quartiers privés loin de leurs hussards.

     Les officiers du  bataillon Landwehr à Unna étaient logés à  l'hôtel Côte-d'Or dans la rue de Dijon
     
    Ce type de cantonnement n'aurait été possible qu'en paix, mais il fut un des aspects préalables à la catastrophe du 19 novembre 1870.
        
    La confiance dans la direction du régiment devint particulièrement claire dans le fait que, la veille, toute la force d'occupation se montrait "sans fusil" sur la place de la ville.

    Les armes sont donc donc restées sans surveillance dans des maisons privées pendant des heures.
    On se sentait parfaitement en sécurité et on s'imaginait que l'ennemi était loin.
     
    Les soldats de l'armée ont rapidement eu l'impression que les familles françaises n'étaient pas  très différentes des leurs en Allemagne. Ils étaient donc aveuglés de confiance.

    Alors, qui était l'ennemi à craindre?
     Le grand armement  des Français avait été brisé peu de temps après le déclenchement de la guerre, Paris était déjà assiégé.


     Contrairement aux attentes, de nouvelles armées avaient été créées à la hâte  ce  qui, cependant, n'a pas duré longtemps en raison d'une mauvaise organisation.


     Beaucoup plus dangereux pour les Allemands, en revanche, étaient les associations d'auto-défense qui s’occupaient
    des lignes terrestres exploitées et d'approvisionnement, et surveillaient les troupes d'occupation et les Allemands de passage.


    Les unités de troupes ont attaqué depuis une embuscade.

    L'un de leurs dirigeants les plus célèbres était Giuseppe Garibaldi (1807-1882), un combattant de la liberté qui sa vie durant fut combattant en Amérique du Sud et en Italie

     Avec un volontaire italien dans certaines compagnies de commandos, Giuseppe Garibaldi avait marqué contre les Allemands des succès sensibles.

    Il avait entendu parler de l'entrée, par ses espions, des troupes expérimentées de la Landwehr à Châtillon  et aussi du fait que les unités de combat allemandes n’étaient pas proches.

     Il a envoyé son fils Ricciotti et, avec lui , environ 400 combattants de la 4e brigade, composés de Fusiliers savoyards, de carabiniers d'Isère et du Doubs et de Francs-tireurs  d'Alsace d'Autun en marches nocturnes sur une distance d'environ 100 km en passant inaperçus à proximité immédiate de Châtillon.

    "La surprise de Châtillon" ...vue du côté prussien !

     Ricciotti a formé deux colonnes qui, le 19 novembre , à six heures  inaperçues dans la ville, ont pris deux directions différentes.

     Après que les quelques gardes aient été rendus inoffensifs, ils ont commencé immédiatement la recherche des maisons pour y trouver les soldats allemands.

    Ces derniers ont été surpris et capturés dans leur sommeil. Certains de ceux qui ont résisté ont été poignardés à mort avec des baïonnettes dans leur lit ou sont tombés sous la grêle des balles dans les rues.

    Un grand nombre de soldats ont été capturés et n'ont pas été blessés hors de la ville par les irréguliers.

    Des particuliers, résidents de Châtillon, ont pris part à l'action et ont tiré par les fenêtres dans les rues étroites depuis les maisons, sur les soldats allemands.

    D'autres ont caché des hommes dans les caves et sous les lits des chambres d'enfants ou leur ont permis de le faire

    Évadez-vous à travers les jardins et les cours arrière ! criaient-ils.

    Cela ne s'est certainement pas toujours produit avec une  pure et grande  convivialité, mais surtout par la peur justifiée d'actes de vengeance de la part de la Force d'occupation.

     Les hussards, cependant, ont été piégés avec leurs chevaux dans les trois granges devant des éléments individuels qui avaient été installés avant l'attaque.

    Leur service terminé ils sont allés dormir dans les granges. Les chevaux n’étaient  plus sellés.

     Depuis les maisons voisines les irréguliers avaient un champ de tir dégagé.

    Il n'y avait pas de commandant présent, les fusils n'avaient pas de munitions appropriées (!) e et les hussards n’avaient  seulement qu’un sabre tiré.

    Puis, lorsqu'un hussard fut abattu, les cavaliers, dans la plus grande grange, prirent leurs chevaux.

     Des sources françaises rapportent que  les officiers allemands de l'hôtel Côte-d'Or, ensemble le soir avant l'attaque,avaient mangé dans la salle à manger.    

     Par conséquent, le lendemain la première attaque fut  contre cet hôtel.

    Après une violente fusillade, les officiers sont partis en prison.

    Le Capitaine Bardeleben et L'adjudant von Rabbe ont été gravement blessés. Le major von Alvensleben a été encore plus touché.

    Il a quand même pris le temps de bien s'habiller dans ses quartiers privés et puis s’est enfui par la porte du jardin

    On ne savait pas s'il s'enfuirait hors de la ville et s’il voulait reconnecter les soldats.

    En tout cas il a offert, avec son casque argenté brillant, une cible bienvenue pour les irréguliers...

    Un coup de feu a mis fin à sa vie .

    "La surprise de Châtillon" ...vue du côté prussien !

    Le Kaiser, nouvellement couronné, a vu cela après la guerre et a interdit le transfert du corps du major von Alvensleben en Allemagne, quoi qu’il fut un officier tombé au combat.    

    Après environ trois heures, les irréguliers ont quitté Châtillon et ont emmené leurs victimes, mises en sécurité le plus rapidement possible. Cela se composait de 160 soldats, 5 officiers, un payeur et un jeune médecin.

    De plus, les bagages de la 4e compagnie et le chariot de sutler des hussards ont été perdus.

    Les quelques 70 chevaux de cavalerie étaient cependant la proie la plus importante pour les irréguliers, car après les batailles de cavalerie perdues au début de la guerre, les Français ne possédaient guère de chevaux d'équitation, mais ils en avaient un besoin urgent et nécessaire pour les services de messagerie et de repérage rapides.

    Le résultat le plus douloureux de l'attaque pour les troupes allemandes fut  la perte d'une partie des compagnies Landwehr composées de huit morts et huit soldats blessés et deux officiers blessés grièvement

     Les hussards enregistrèrent un mort et un blessé  : Reiter, plus le major von Alvensleben.

    Trois des autres blessés sont morts par la suite de leurs blessures graves. Les assaillants ont fait six morts et dix blessés de retour à Chatillon. Trois habitants de Châtillon ont été pris entre deux feux et ont été également tués.           

     Ricciotti Garibaldi a été célébré comme un gagnant partout sur le chemin du retour.et, d'autant plus, que son peuple a évalué le nombre d'Allemands morts à environ 120.

     Au début, puisque les officiers ne s’étaient pas rencontrés à Châtillon dans la matinée du 19 novembre, ils n'avaient pas encore un aperçu de la situation dans la ville.

    Pour la réoccuper ils utilisèrent un petit département scout qui était encore présent.

    La tente fut tirée depuis les maisons, mais pouvait toujours se déplacer au moyen de signaux de trompette pour attirer des camarades cachés à l'extérieur.  Mais seulement le nombre était limité à 300 personnes

     Les troupes allemandes, avec des convalescents, ont été renvoyées dans leurs unités en Allemagne.

    Puis la ville de Châtillon fut  réoccupée. Après avoir passé la nuit à l'extérieur avec le harcèlement des résidents restants,  l'équipage s'est retiré à 37 km de distance avec des "nourritures et boissons exquises"

    On ramena des otages de Chateauvillain.. Un faux rapport sur l'approche de grands groupes d'autodéfense  fit sensation parmi les Troupes.

    "La surprise de Châtillon" ...vue du côté prussien !

     Des soldats allemands (probablement du bataillon Unna Landwehr) devant le château incendié Marmont à Châtillon.Selon le propriétaire, le feu n'était pas garanti. La plaque chauffante a éclaté.. (Archive Dominique Masson)

    Le 22 novembre, à Châtillon le bataillon Landwehr Unna était de nouveau présent et renforcé par quatre compagnies du bataillon Landwehr Soest

     Les citoyens de Châtillon, dans la mesure où ils étaient  encore dans la ville, attendaient maintenant une grande cour criminelle.

    Cela a été fait par les soldats de bataillons existants de Braunschweig, s'appelant fièrement "la brigade noire" .

    Ceux-ci ont  obtenu la permission de piller la ville. Les maisons ont été abattues et d’autres  ont été incendiées.

    Il faut dire que ces excès et leurs cruautés ont conduit à un profond mépris de la part des Français pour les troupes allemandes.

                                                                                                                                                                                Le gros problème fut la compensation demandée par les commandants allemands : un paiement d'un million de francs.

    Le maire de la ville a échoué dans des négociations difficiles

    Le montant à payer immédiatement était de 61 503 francs.

    92.000 francs supplémentaires ont été demandés au moment des négociations de paix, dans les demandes générales de réparation des Allemands.

    Un soldat de la Landwehr, dans le "Westfälischer Anzeiger",   après le briefing des événements, indiqua sa « désapprobation la plus résolue ».

    « Le cœur tourne dans son corps quand on se promène dans les rues locales. Les résidents, en tout cas  la plupart d'entre eux, ont fui, et la ville autrement belle et certainement riche offre maintenant une image terrible. […] Cette dévastation est d’autant plus regrettable qu’au moins  la quatrième partie de tout notre équipage le 19 novembre, avec le sacrifice de leur propre une vie de citoyens locaux est sauvée. [...] C'est touchant d'entendre quelle peur les citoyens locaux ont eu de nos soldats cachés.  »      

    Le raid réussi à Châtillon a naturellement conduit les irréguliers à se battre à nouveau.

     Pour les troupes allemandes qui ont été entraînées pour les batailles en plein champ, les menaces constantes posées par les irréguliers ont été difficilement supportables.

     « L'ennemi a plongé. Il s'est ouvert de nulle part, a frappé et a pratiquement disparu à nouveau dans nulle part.

    Ça ne pouvait pas avoir été  fait sans l'aide des riverains, on en était sûr et on a exprimé toute notre colère sur eux, au nom d'eux ».

    "La surprise de Châtillon" ...vue du côté prussien !

    Un officier supérieur du quartier général allemand a écrit:

    « La petite guerre contre les Francs-tireurs laisse de plus en plus l'humanité et le christianisme sortir des rangs . Ces terribles incendies  continuent, des communautés villageoises entières sont complètement brûlées pour leur comportement hostile. »

     Le maire de Châtillon d'alors, M. Achille Maître a écrit ses réflexions à ce sujet dans son journal.

    Il a rejeté une telle attaque comme un danger pour la ville et inutile pour le pays .

     Il aurait aimé prendre des mesures pour conjurer le malheur mais  il ne pouvait pas le faire et donc il n'y avait que l'attente et « les mains de Dieu. »

    Il a également noté que les irréguliers étaient courageux mais aussi extrêmement maladroits

     À son avis, ce serait également une explication du faible nombre de morts et de blessés subis par les Allemands.             

    Dans leurs rapports sur la catastrophe, les commandants du bataillon ont exagéré les prétendues supériorités  ennemies  afin de détourner l'attention de leur inconduite flagrante.             

    Des sources françaises rapportent que le colonel von Lettgau (né en 1819) a été dégradé lorsque l'armée a été libérée.    

    Mais c'était le contraire  il était toujours aux commandes il  a d’ailleurs été honoré avec des médailles après la guerre et est mort en 1885 avec le grade de Général major à la retraite. Cela ne lui avait donc pas fait de mal.             

    Ceux qui ont souffert, bien sûr aussi,  ce sont les habitants de  la lointaine Westphalie.

    Celle-ci n’ a eu initialement, pendant cinq jours, aucune connaissance de l’attaque de ses soldats, en tout cas pas avant  le 24 novembre 1870.

    Le « Westphalien-Tableau de bord "  mentionna :

    « La Landwehr Bataillon Unna  et deux Escadrons 5. Reserve- Husa- régiment  ont été attaqués à Châtillon et ont perdu 120 hommes et 70 chevaux »

    L'excitation à Hamm était bien sûr sans limites. Que signifiait la perte de 120 hommes? Étaient-ils morts, blessés ou prisonniers ?

    Pas avant le 29 novembre, donc dix jours après le raid , le WA ne devint capable de fournir un Rapport, compilé à l’aide de lettres postales sur le terrain et d’autres journaux,imprimés.

    Mais les victimes étaient toujours portées disparues.

    Le 3 décembre, les citoyens de Hamm purent obtenir des informations plus détaillées dans une édition supplémentaire

     La société a de nouveau donné des détails et partagé les noms des morts et Des blessés.

     Une  lettre du sergent Carl Wencker qui a été fait prisonnier a mentionné les noms des soldats capturés par les irréguliers et a souligné que «les Français les traitent avec toute la courtoisie possible».

     De Hamm et les communautés qui font partie de la ville aujourd'hui sont morts au cours du Raid , les soldats Eduard Schröder (maître cordonnier), Christian Bussmann appelé Wiemer (brasseur chez Furmann), Wilhelm Schäfer (Pelkum) et Friedrich Vatheier (Tout).

    Les soldats Bennekämper, Taube et Ferdinand ont été blessés .

    Eickelmann ouvrier du chemin de fer de Westphalie, grièvement blessé, est mort le 25 Novembre à l'hôpital citoyen de Châtillon.

    En captivité, il y eut 33 soldats, hommes de la 1ère compagnie et deux hussards, plus une famille de sutlers de Hamm.

    Leur internement, dans plusieurs endroits différents, a duré jusqu'à la fin de la guerre.

    Les familles des morts et des prisonniers ont reçu le Soutien des comités d'aide fondés.

    Les veuves des morts ont remercié le Landwehrmann Eduard Schröder qui a fait   une publicité de journal pour collecter de l'argent Le boucher Hermann Juckenack a fait un don de porc.

    Dans la nuit du 23 mars 1871, près de 1100 soldats de la Landwehr du bataillon se sont réunis.

    L'Unna a pris le train pour Hamm et a été accueillie par les mots:

    « Avec un cœur anxieux nous avons suivi le bataillon Landwehr mais aujourd’hui avec beaucoup de joie et de fierté, nous le voyons rentrer victorieux ».   

    Les prisonniers de Châtillon retournèrent également à Hamm.  

    Entre-temps, les deux États avaient adopté des lois permettant l'acquisition de tombes de soldats planifiées par l’État.

    Mais comme les tombes individuelles s'étendaient souvent bien au-delà de la zone dans une paroisse ou même dans un cimetière, il devait y avoir cinq ans de décomposition des restes de tous ces différents morts.

    Quelques tombes individuelles furent exhumées et divisées en deux catégories, séparées par nationalité.

     Les tombes furent enterrées dans le cimetière communautaire respectif.

    La période de cinq ans  a expiré en 1876 et la réorganisation a commencé immédiatement dans toutes les régions de France et était souvent accompagnée de l'érection d'un monument.           

     Ce fut la même chose à Châtillon.

    "La surprise de Châtillon" ...vue du côté prussien !

    Pour séparer les tombes allemandes et françaises, le gouvernement  a acheté une grande zone de terrain.

    Avec l'exhumation, les pierres tombales temporaires ont également été enlevées  .

    Alors que les six guérilleros français avaient obtenu un obélisque richement décoré, la pierre commémorative des Allemands a été gardée un peu plus simple et couronnée d'un aigle prussien, aujourd'hui disparu.

     Les Français enterrés sont anonymes mais les noms des 54 Allemands sont répartis de part et d'autre de la base, gravés avec le grade et l'unité militaire. Les cinq soldats de Hammer Landwehrsont répertoriés avec eux.    

    "La surprise de Châtillon" ...vue du côté prussien !

    "La surprise de Châtillon" ...vue du côté prussien !

     Il existe, en tant que tombes uniques, deux autres tombes d'officiers,y compris la tombe du Major von Alvensleben.

    "La surprise de Châtillon" ...vue du côté prussien !

     Le quartier des deux obélisques dans le cimetière Saint-Jean de Châtillon sur Seine donne l'impression que les adversaires acharnés dans la mort se sont réconciliés .

    "La surprise de Châtillon" du 19 novembre 1870...vue du côté allemand, s'intitule "l'attaque de Châtillon" !

    Malheureusement, la réconciliation n'a pas duré longtemps.

    Les deux guerres mondiales ont attisé «l'hostilité héréditaire» entre les Allemands et les Français à nouveau de façon dramatique.

    Durant la Seconde Guerre mondiale  surtout, le centre de Châtillon a été détruit lors de deux raids aériens. 15 mai et le 15 juin 1940, l'armée de l'air allemande a bombardé la ville avant qu'elle ne soit occupée.

     Ce n'est qu'après de violents combats en septembre 1944 que la ville a été libérée.

    Espérons que l'amitié franco-allemande tant vantée et une Union européenne forte qui fonctionne depuis 75 ans, nous protégera pour toujours de nouvelles guerres.

     Remerciements:

     Une connexion a été établie via le blog internet de Christiane Talfumière à Châtillon, puis avec l’historien M. Dominique Masson.

    L'objectif est de préserver tout ce qui est historique, monumental, dans et autour de la ville. L'intérêt architectural et artistique doit être préservé et protégé.

    L’Association des Amis du Châtillonnais est très active et a, par exemple , récolté plus de 300 écrits historiques et les a édités.

    Trois brochures avec des informations détaillées sur l'événement  à Châtillon pendant la guerre de 1870/71 m’ont été envoyées par Christiane Talfumière. Ces documents et Leurs photos ont pu être utilisés pour ce texte.

    Une exposition sur les événements de guerre de 1870 était prévue à Châtillon sur Seine pour novembre 2020, mais elle a dû être reportée en raison de la crise sanitaire due au Covid 19 .

     Sources principales:

     Rapports dans "Westfälischer Anzeiger et Wochenblatt pour la ville et le quartier de Hamm".

     Rapports dans "Hellweger Anzeiger und Bote, liés à la circulaire officielle pour le District de Hamm ".

     De Georg Cardinal, Kgl. Prusse. Le colonel a pris sa retraite, la guerre à l'arrière

    Connexions des armées allemandes et du service de scène, partie 3, 1er volume, Berlin 1895. La 4e section commençant à la page 35 est intitulée: Sur la voie ferrée

    Ligne de scène avant leur restauration. L'entrée des troupes de scène au

    Route et voie ferrée Chaumont - Chatillon sur Seine. - L'attaque de Châtillon par un corps de patrouille français et les événements du 15 au 23 novembre, pages 35

    Les trois sources suivantes sous forme de brochure ont été obtenues auprès de l'Association des Amis duChâtillonnais ", mis à disposition notamment par Mme Christiane Talfumière:

     Diey, Michel, "Les Cahiers du Châtillonnais", 1870-1871, La Guerre oubliée dans le

    Chatillonnais ,, n ° 151, un total de 150 pages, plus un grand nombre d'annexes.

     Dormoy, P.A., Armée des Vosges, Souvenirs d'avant - Garde, Vol. II Châtillon, Paris 1887. Nouvellement publié dans la série "Les Cahiers du Châtillonnais" sous le titre: 19 novembre 1870: La Surprise de Châtillon, Association des Amis du Châtillonnais, Nr. 309, un total de 22 pages.

    Maître, M. Achille, Châtillon-sur-Seine, pendant la guerre de 1870-71, Souvenirs de M. Achille Maitre, Ancien Maire de Châtillon, Tours 1902.

    Cet article a été publié le 20 novembre 2020 dans le "Westfälische Heimatbl Blätter", un

    Supplément au "Westfälischer Anzeiger", publié en grande partie abrégé.

    1 Westfälischer Anzeiger, 23 juillet 1870

    2 Westfälischer Anzeiger, 20 septembre 1870. Rapport sur la mort du militaire Wilhelm Börger de Pelkum

    à Saargemünd. Le corps a été amené à Hamm par le beau-père de Börger.

    3 Westfälischer Anzeiger, 5 novembre 1870

    4 Westfälischer Anzeiger, 24 novembre 1870

    5 Contrairement aux premiers rapports, il n'y avait pas deux mais un seul escadron du 5e Reserve Hussar

    Regiments in Châtillon stationiert.

    6 Des béliers. L'arrivée du bataillon Unna et le déménagement dans les quartiers sont décrits ici à partir de la page 37.

    7 Les détails de l'attaque sont décrits dans plusieurs lettres postales qui ont été envoyées au 29 novembre 1870 à

    Westphalian Anzeiger ont été publiés. Dans le Hellweger Anzeiger et dans le Westfälische Zeitung

    il y avait des rapports similaires utilisant les lettres postales sur le terrain. Une question factuelle, très critique de Von Aries rend compte des événements

     Et pour les germanistes, voici l'article paru dans le journal de Hamm :

    Mais une question se pose :

    Que sont devenus les soldats français prisonniers emmenés par les Prussiens à Hamm ??

    Vous le saurez demain !

     


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    NOTULE D’HISTOIRE

    La Surprise de Châtillon-sur-Seine

    (19 novembre 1870)

    Il y a 150 ans, le 19 juillet 1870, commençait la guerre franco-prussienne, opposant la France à une coalition d’états allemands, dirigés par la Prusse.

    Cette guerre entraîna la chute de l’empereur Napoléon III,  l’empire étant remplacé par la République, le 4 septembre, proclamée par Gambetta.

    L’italien Joseph (Giuseppe) Garibaldi, va se mettre au service du gouvernement français, réfugié à Tours, qui lui confie le commandement de tous les corps-francs de la zone des Vosges et une brigade de gardes mobiles.

    Il va organiser son armée en quatre brigades, sous le commandement de ses deux fils, Ricciotti et Menotti, de Delpech, et du polonais Bossak-Hauké ; son ami Philippe Toussaint Bordone sera chef d’état-major.

    Cette guerre ne se terminera que le 28 janvier 1871.  

    Ricciotti a raconté dans ses souvenirs, parus en 1899, un épisode important de cette guerre dont il a été l’instigateur, l’attaque des prussiens à Châtillon, le 19 novembre 1870, l’une des rares victoires françaises de cette guerre.

     

    "Garibaldi, la surprise de Châtillon", un notule d'histoire de Dominique Masson

    Figure 1 : Les souvenirs de Ricciotti Garibaldi (1899)

    En voici l’extrait concernant l’attaque qui s’est déroulée à Châtillon:

    « L’ennemi ayant occupé Dijon, nous fûmes obligés d’effectuer un immense détour par Lons-le-Saulnier, Bourg-Macon, Chalons, et Chagny, soit 26 heures de chemin de fer.

    On avait bien télégraphié aux diverses gares principales pour avoir des vivres, mais en aucun endroit nous n’avons trouvé une miche de pain,-mésaventure égale était d’ailleurs arrivée aux restant de l’armée-, de sorte que nous arrivâmes à Autun esquintés et affamés.

    A Autun, le petit Séminaire-un immeuble très vaste-nous fut désigné comme quartier, et malgré la tension des rapports que l’on voulut créer, très facticement, entre nos chefs et l’élément clérical de cette très cléricale cité, nos relations avec les Révérends Pères du Petit Séminaire ne manquèrent jamais d’être très cordiales.

    Des faits que je raconterai le prouveront.

    Connaissant les habitudes de mon père, je m’empressai d‘organiser tous les services nécessaires à la bonne marche d’une colonne volante, laquelle devant être nécessairement presque toujours éloignée de sa base d’opérations, et obligée de se rendre autant que possible indépendante des ressources de l’armée à laquelle elle appartient.

    De sorte que lorsque, le 14 novembre, arriva l’ordre de marche, tout était prêt.

    "Garibaldi, la surprise de Châtillon", un notule d'histoire de Dominique Masson

    Figure 2 :L'Etat-Major de Garibaldi

    Dans la nuit du 13, je fus appelé au quartier général de l’armée et, là, je trouvai mon père qui examinait une grande carte de France.  

    Tu sais, me dit-il, que les armées prussiennes marchent sur Paris, et pour cela elles doivent forcément utiliser les diverses lignes de chemin de fer qui vont du Rhin vers la capitale.

    La destruction de ces lignes peut retarder leur marche et les inquiéter.

    Tu partiras avec tes hommes pour remplir cette mission.

    Il s’agissait de traverser la moitié de la France, en passant par des départements où déjà dominaient 400 000 prussiens.                                                                                  

    Regarde un peu toi-même, me dit mon père, si sur cette carte les tunnels des voies ferrées sont indiqués.

    Je regardai. Un tunnel était indiqué près de Bar-le-Duc, précisément sur la ligne Strasbourg-Paris. J’appelai son attention sur ce point.                                                                          

    Très bien, me dit-il. Pars dans cette direction et fais le mieux que tu pourras. Avant ton départ, je te remettrai des instructions écrites.                                                                               

    Ces instructions, qu'il me remit,disaient :                                                              

    En partant d’Autun, tu dois prendre la direction de Semur et de Montbard pour troubler les communications de l’ennemi, lequel occupe d’un côté Troyes et Auxerre, et, de l’autre, Dijon.

    Si tu peux arriver, par Montbard, Châtillon, Chaumont, Neufchâteau, sur la grande ligne de communication de l’ennemi-laquelle va de Strasbourg à Paris- l’opération deviendra beaucoup plus ardue et plus importante…

    Arrivé sur ces lignes de communication, il est urgent d’y détruire les voies ferrées et les télégraphes.

    Effectuer cette destruction sur la ligne de Strasbourg à Paris serait un véritable coup de main.              

    Pendant que nous parlions des difficultés éventuelles qui pouvaient se présenter, survint Bordone, auquel le général communiqua les instructions qu’il m’avait données.

    Bordone nous mit au courant des nouvelles arrivées à l’état-major sur le mouvement des détachements prussiens qui, de l’Est, marchaient vers l’Ouest, en passant par Châtillon-sur-Seine et Montbard.

    Il ajouta même qu’un officier français, lequel me fut ensuite présenté, conseillait des tentatives de surprise dans cette direction.

    Ainsi prit naissance le mouvement qui s’acheva par la surprise de Châtillon.

    Et cette surprise ne fut pas, comme prétendent certains écrivains français, préparée à Autun, mais elle fut décidée seulement quand nous arrivâmes à Coulmier-le-Sec, à la suite de nouvelles précises recueillies sur ce dernier point.

    D’ailleurs, elle ne pouvait être préparée, ni même conçue avant, les Prussiens n’ayant occupé Châtillon que le 17 novembre, c’est-à-dire un jour avant notre coup, et trois jours après noter départ d’Autun.

    Notre première étape nous conduisit à Lucenay.

    Le lendemain, nous continuâmes jusqu’à Saulieu, accompagnés d’une pluie qui nous trempa jusqu’aux os ; mais dans cette localité nous fûmes admirablement accueillis par une population des plus hospitalières.

    A Saulieu, nous restâmes toute la journée du 16 pour avoir des nouvelles.

    Le lendemain(17 novembre), de bonne heure, nous partîmes pour Semur, où nous arrivâmes à 5 heures du soir.

    Des nouvelles recueillies là, nous décidèrent à continuer la marche jusqu’à Montbard, que nous atteignîmes à la nuit, en bon ordre, quoique très fatigués, car nous avions fait en cette journée une étape de soixante kilomètres environ.

    Bien qu’à notre arrivée tout Montbard dormit, un moment après la ville entière s’illuminait et les habitants nous accueillirent avec cordialité, nous prodiguant tout ce dont nous avions besoin.

    Repartis le matin du 18, nous arrivions vers midi à Coulmier-le-Sec.

    Nous nous trouvions alors au milieu d’un département fortement occupé par les Prussiens ; une de leurs principales lignes de communication le traversait dans toute sa longueur, passant par Châtillon.

    Pour cette raison, de sérieuses précautions durent être prises.

    La compagnie des Vosges fut poussée jusqu’à Nesle ; les Dolois furent placés au Chemin d’Aisey et la compagnie du Doubs, sur la route d’Avallon.

    Coulmier-le-Sec fut entouré d’une série de postes solides et d’une chaîne de sentinelles, qui avaient reçu l’ordre très sévère de laisser entrer tout le monde, mais de ne laisser sortir personne.

    Cet ordre donna lieu à des scènes très curieuses : tantôt c’étaient des maris séparés de leurs femmes ; puis des femmes séparées de leurs maris, qui se présentaient au siège du commandement pour réclamer un laisser-passer.

    Mais la mesure devait être générale et je refusai à tous.

    De là des plaintes et des imprécations.

    Le préposé à la poste, un gros homme obèse plein de son importance, était arrivé à ce moment et, lorsqu’il apprit que lui aussi était prisonnier, il entra dans une violente colère qui faillit le faire éclater ; il mena un tapage furieux et acheva de me menacer-par vieille habitude-des foudres du Procureur impérial.

    Dans sa colère, le pauvre homme oubliait que l’empire n’existait plus.

    La municipalité même vint en forme officielle me faire des remontrances et me demander de rapporter l’ordre draconien et,comme dit Thiébault, les habitants de Coulmier en arrivèrent à désirer que les prussiens vinssent nous chasser.

    On comprendra que le maintien strict de cet ordre était indispensable : 4000 Prussiens étaient signalés à Laignes, sur notre gauche et 1000 autres avec de la cavalerie étaient sur notre front à Châtillon.

    Il fallait que l’ennemi ne pût avoir des nouvelles sur notre compte que le plus tard possible.

    Or, par le simple mouvement journalier d’une population, les nouvelles se répandent avec une rapidité étonnante.

    Plusieurs habitants de Châtillon, qui étaient venus à Coulmier, nous donnèrent des informations précieuses sur la garnison prussienne occupant cette localité, et c’est alors qu’un coup de main de ce côté fut décidé.

    Un meunier, qui me fut désigné comme digne de la plus absolue confiance, eut l’autorisation de sortir de nos lignes et fut chargé de prévenir le maire de Châtillon de ce que nous préparions.

    Il paraît que l’idée ne fut pas trop du goût du maire de Châtillon, M. Achille Maître, et voici ce que lui-même en a écrit, et qui est rapporté par M. Henri Genevois :    

    Je considérais cette attaque comme pleine de périls pour la cité et complétement inutile pour la patrie.

    Mais comme la ville et le château étaient remplis de Prussiens, il était impossible de sortir à cette heure (il était 8 heures du soir) et de prendre des mesures en vue de conjurer le danger qui nous menaçait.

    Il ne nous restait plus qu’à nous en remettre à la volonté de Dieu-et c’est ce que nous fîmes.

    Et M. Henri Genevois, dans son livre « Les coups de main pendant la guerre », ajoute ironiquement 

    Il faut croire que, ce jour-là, la Providence était mal disposée envers les armées prussiennes, puisque les ferventes prières du maire de Châtillon ne purent détourner de nos ennemis l’orage qui les menaçait.                                         

    Entre-temps, dans la soirée, nous était parvenue la nouvelle que huit mille rations avaient été exigées pour le lendemain à Châtillon.

    Le nouveau corps que cette réquisition annonçait devait probablement arriver l’après-midi.

    Il n’y avait donc plus de temps à perdre.

    "Garibaldi, la surprise de Châtillon", un notule d'histoire de Dominique Masson

    Figure 3 : Attaque devant l'hôtel de la Côte d'Or (archives Municipales de Châtillon sur Seine)

    A minuit, nos compagnies détachées entrèrent, et après avoir laissé les sacs sous une faible garde, à une heure, notre petite colonne se mit en route.

    La nuit était obscure et il pleuvait.

    Afin d’empêcher d’éventuelles fausses alertes et pour qu’aucun homme ne put s’égarer en route, la colonne marchait en ordre serré.

    Arrivés à un certain point, notre guide, un brave jeune homme du pays, nous montrant un coin plus noir dans la campagne obscure, un peu en dessous de la route où nous étions, nous dit : Voilà Châtillon.

    Quelques minutes après nous arrivions à un hameau dont le nom nous permit de nous orienter.

    Là, nous fîmes halte, et ayant réuni les officiers, je leur expliquai brièvement mon projet.

    Nous n’allions pas engager une bataille, leur dis-je, mais tenter un coup de main.

    Il fallait chercher de combattre le moins possible, mais faire rapidement les plus grandes prises possibles de prisonniers et de matériel.

    Michard et ses chasseurs  devaient attaquer le côté de la ville où se trouvait le principal hôtel (de la Côte d’Or) et tâcher de s’emparer des officiers qui y étaient logés.

    En même temps, avec le restant de la colonne, moi, je serais entré dans le village par la rue principale.

    Après l’affaire, le lieu de réunion devait être le hameau où nous nous trouvions à ce moment.

    La surprise des francs-tireurs fut grande lorsqu’ils apprirent que, dans quelques minutes, ils se trouveraient nez à nez avec l’ennemi.

    Paul Sigrist, dans « Un épisode de la Campagne de 1870 », rapporte ces paroles de Michard : 

    Seul, Ricciotti Garibaldi, commandant la 4me brigade, savait où nous allions.

    Nous tous, croyons être partis pour faire sauter le viaduc de Saverne.

    Mais quand j’eus fini mon petit discours par ces mots : Allons, en avant, Francs-Tireurs !, tous, joyeux, se mirent en mouvement.

    Michard, avec ses hommes dut rétrograder de quelques centaines de pas, afin de prendre une petite route traversant la Seine sur un pontin (la Seine n’a ici que quelques mètres) et conduisant droit à l’Hôtel de la Côte d’Or.

    Le restant de la colonne poursuivit sa marche par la route principale qui tournait à droite et descendait dans la ville.

    Arrivés à un certain point, nous fîmes de nouveau halte, et j’envoyai en avant six hommes sous les ordres d’un officier afin de surprendre, si c’était possible, les sentinelles.

    En attendant, je formai la colonne d’attaque sur l’ordre de marche, c’est-à-dire sur deux files, une à chaque bord latéral de la route.

    Les cavaliers devaient rester en queue.

    La colonne s’avancerait dans la ville et au commandement de : halte ! tous devaient s’attaquer aux portes et y chercher les Prussiens.

    En ce moment, retourne vers nous un des six hommes envoyés en avant pour supprimer les sentinelles.

    Il nous apprend qu’on n’a trouvé ni sentinelle, ni poste de garde.

    M. Dormoy dit, à ce propos, dans les « Souvenirs d’Avant-Garde » :

    Vraiment, il nous fut dit par la suite qu’il y avait bien deux sentinelles, mais leur surprise fut telle de se voir près des francs-tireurs, qu’elles s’échappèrent sans tirer.

    Je n’en pouvais croire mes oreilles et, un moment, je craignis qu’au lieu de faire une surprise à l’ennemi, celui-ci ne nous eut tendu un piège ou, au moins, qu’il ne fût parti.

    Cependant, notre service d’informations nous avait tenu au courant de tout ce qui concernait le corps prussien gîté là, et il était impossible que son départ se fut accompli sans que nous en fussions prévenus.

    Les renseignements que j’avais, tant sur l’ennemi que sur la topographie de la localité, étaient si complets, que nos hommes étaient surpris de la précision de détail avec laquelle tous les ordres étaient donnés.

    Mais, en guerre, comme disait mon père, avant tout il faut la chance.

    Et je dois reconnaître qu’en cette circonstance la chance nous favorisa amplement.

    La colonne s’avança lentement.

    Les sabots ferrés de mon cheval frappant sur la route caillouteuse étaient le seul bruit que l’on entendit.

    Quelque rare habitant trop matinal que nous rencontrions reçut à voix basse le conseil de se cacher et, effrayé, se prenait à fuir en murmurant : Mon Dieu ! Mon Dieu !

    Ce fut un de ces moments où naissent des émotions dont le souvenir reste vivace à travers les années. 

     Lorsque la colonne eût occupé la route principale dans presque toute sa longueur, je donnai l’ordre de faire halte.

    Et aussitôt on n’entendit plus que le bruit des crosses de fusil frappant furieusement contre le bois des portes.

    La scène qui s’ensuivit est difficile à décrire.

    Toutes les fenêtres s’ouvrirent comme par enchantement, chacune d’elles garnie d’une ou de plusieurs têtes et, pendant que les portes cédaient, dans les maisons, on entendait retentir les cris des femmes et les imprécations des hommes.

    Bientôt la scène changea d’aspect.

    Aux cris de surprise succédaient les hurlements des hommes qui s’égorgeaient et la fusillade commença à crépiter de tous les côtés.

    Naturellement, dans une telle action, aucune unité tactique ne pouvait se maintenir.

    A l’intérieur de chaque maison se produisait ou une courte lutte corps à corps, ou bien les Prussiens se rendaient sans résister, et ils étaient alors aussitôt conduits à l’arrière-garde.

    En moins d’une demi-heure, toutes les maisons de la grande rue étaient fouillées et on commença la même opération dans les rues adjacentes.

    Le plus grand nombre des Prussiens qui n’étaient pas logés dans la rue principale, avaient eu le temps de fuir vers la Mairie où ils savaient trouver leur commandant Luttgau. 

    Les écrivains prussiens prétendant que les habitants de Châtillon nous aidèrent.

    Par respect pour la vérité, je dois dire que cela est inexact.

    Au contraire, dans plusieurs cas, ils se montrèrent plus disposés à aider les Prussiens, en refusant de déclarer à nos hommes s’il s’en trouvait dans leur maison.

    Tel fut le cas d’un propriétaire, chevalier de la Légion d’honneur, qui nia avoir des Prussiens chez lui, ce qui était faux.

    La croix de la Légion d’honneur lui fut arrachée en présence des soldats, pour lui témoigner notre mépris.        

      Sur certains points, il s’agissait de véritables capitulations : les habitants auraient bien voulu livrer les Prussiens cachés dans leurs maisons, mais à la condition qu’ils fussent fusillés dans un autre endroit, afin de préserver leur intérieur de taches de sang.

    Une remarquable exception, qui mérite d’être rappelée, nous fut fournie par une jeune et jolie femme qui, sans souci de la fusillade, descendit dans la rue, se joignit à un de nos détachements et l’accompagnait aux maisons qu’elle savait renfermer des ennemis.

    Je me souviens d’avoir vu à une fenêtre s’avançant en saillie sur la rue, ouverte et très exposée aux balles qui sifflaient dans toutes les directions, un jeune prêtre au visage blanc comme la cire, les bras croisés sur la poitrine et les yeux tournés en haut, qui paraissait prier.

    Je trouvai pour le moins curieux le choix d’un tel endroit.                                 

    Voulant me mettre en contact avec les chasseurs de Michard, je m’avançai par une rue latérale.

    Mon cheval étant tombé, je marchais à pied, lorsqu’il m’arriva de faire, aussi, mon prisonnier prussien.

    C’était un superbe échantillon du genre, grand, haut, bien découplé, orné d’une barbe magnifique.

    Il déboucha d’une porte qui s’ouvrit à l’improviste à côté de moi.

    Dès qu’il me vit, frappé sans doute par les dorures de mon uniforme, il se mit vivement au port d’armes.

    J’appelai des francs-tireurs et le fis désarmer.

    "Garibaldi, la surprise de Châtillon", un notule d'histoire de Dominique Masson

    Figure 4 : Le Commandant Michard

    Comme il ne restait plus rien à faire dans cette partie de la ville occupée par nous, une reconnaissance fut tentée vers la mairie, mais à peine débouchons-nous sur la place qu’une furieuse décharge nous accueillit ; la Mairie était presque isolée et entourée d’une grille ; notre troupe se trouvait fort réduite en nombre, la plupart des nôtres étant encore ou dispersés ou occupés avec les prisonniers, de sorte que nous dûmes renoncer à prendre de force cet édifice où s’étaient concentrés les ennemis.

    Ayant dès lors la certitude que Michard avait également réussi dans son opération, et que Welker avait pris tous les chevaux que l’on avait pu trouver, je donnai l’ordre au clairon de sonner la retraite.

    Celui-ci, par une sorte de lapsus, sonna au contraire la diane.

    Cette sonnerie venait vraiment un peu tard.

    Mais cette erreur du clairon nous mit tous en bonne humeur.

    Peu avant d’atteindre le point de réunion que nous avions fixé, nous fûmes rejoints par Michard et ses chasseurs, eux aussi chargés de prisonniers et de trophées.   

    Notre prise fut de 164 soldats et 13 officiers prisonniers ; 72 chevaux ; 6 voitures de matériel, notamment la voiture de la poste ; tous les instruments d’un corps de musique et deux très laides cantinières.

    Celles-ci, effrayées des plaisanteries dont elles étaient le point de mire de la part des francs-tireurs-et que, d’ailleurs, elles ne comprenaient pas- se réfugièrent près de moi et, pendant la marche, comme j’étais à cheval, elles s’attachèrent pour ainsi dire chacune à une de mes bottes.

    Pendant que nous étions occupés d’un côté, Michard, de l’autre, avait parfaitement exécuté la mission qui lui avait été confiée.

    Je lui laisse la parole. Voici le récit qu’il a fait à M. Paul Sigrist, et qui est rapporté dans « Un épisode de la campagne de 1870 » :   

     Arrivé au point qui m’avait été indiqué, je fis prendre aux chasseurs des Alpes la direction de Châtillon…

    Laissant la compagnie sous les ordres de mon lieutenant Bailly, je m’avançai vers un petit pont qui traversait la Seine et j’envoyai d’abord en avant un homme avec ordre de voir s’il y avait des sentinelles ou un corps de garde.

    L’homme, retournant, me rapporta qu’il n’avait rien aperçu.

    Alors j’allai moi-même jusqu’au milieu du pont, et je vis un factionnaire sur  la route. 

    Je retournai vers ma compagnie ; je pris six hommes et, avec eux, je traversai le fleuve à gué…

    Je ne voyais point le poste, mais seulement le factionnaire.

    Le visant avec ma carabine (le plus grand nombre de nos officiers portaient la carabine), je fis feu ; le coup ne partit pas.

    La sentinelle, entendant le bruit, se retourne, me vise, tire et me manque.

    Aussitôt je sonne la charge (avec le petit sifflet que portaient les officiers) ; la sentinelle s’enfuit vers l’auberge de la Côte d’Or.

    Avec mes hommes, je me précipite à ses trousses, et l’on m’a dit après que ce pauvre diable resta cloué à la porte par cinq coups de baïonnette ; le seul souvenir du hurlement qu’il poussa en mourant faisait pâlir l’homme qui me racontait ce détail.

    Nous enfilâmes l’escalier et, tout aussitôt, commença le siège des chambres occupées par les officiers.    

    A ce récit, j’ajouterai que Michard tentait d’ouvrir une chambre où se trouvaient plusieurs officiers, lorsque la porte s’ouvre brusquement et un des officiers fait feu sur lui avec un revolver, mais lui brûle seulement la barbe.

    Michard saisit de sa main gauche le poignet qui tient le revolver ; de sa main droite, il prend l’homme par le cou et, se servant de lui comme d’un bouclier, il s’avance dans la chambre.

    Un autre officier cherche à tourner ce bouclier vivant afin de tirer sur Michard, lorsque celui-ci, par un mouvement très rapide, lâche le cou du Prussien et avec une balle de son revolver fracasse la main de son nouvel adversaire.

    Michard raconte que lorsque les Prussiens se virent pris, ils demandèrent à se rendre et à être désarmés par un officier. 

    Je les désarmai moi-même, dit-il.

    Il mit alors l’hôtel en état de défense et ses hommes s’éparpillant à la recherche de prisonniers, des combats survinrent dans les maisons voisines et dans la rue.

    Cueillons encore ce détail dans le récit de Michard :                                                   

    Plusieurs Prussiens, quand nous les prenions cachés sous les lits, dans les soupentes, dans les caves, aux cabinets, sous la paille, etc. nous disaient : « Bon français-moi bon catholique-moi avoir beaucoup d’enfants », et comptant sur leurs doigts, ils nous indiquaient le nombre de leurs enfants, qui était toujours considérable. 

    Plusieurs Prussiens qui, au bruit de la fusillade, s’élançaient vers l’hôtel où ils savaient que leurs officiers logeaient, étaient ou blessés ou tués par les francs-tireurs qui en occupaient les fenêtres.

    En attendant, Michard, avec une forte patrouille, s’avançait vers le centre de la cité, cherchant à prendre contact avec nous, mais en passant dans la direction de la route de Chaumont.                            

    Pendant sa marche, il rencontra un officier supérieur à cheval, qui fut tout aussitôt tué, au milieu de son état-major

    .On apprit que c’était là le comte Alvensleben, frère des deux généraux de ce nom, chefs du IIIe et du IVe corps allemands, -et celui-ci commandait l’escadron de hussards qui se trouvait tout près de nous.

    Divers objets personnels trouvés sur lui, tels que bijoux et papiers privés, reconnus pour appartenir à une personnalité éminente, furent envoyés par moi au prince Frédéric-Charles, qui commandait les troupes sur notre front, et voici la lettre que je lui envoyai :

    AU PRINCE FREDERIC-CHARLES,                                                                                                 Général en chef de l’armée prussienne,

    Prince,

    J’ai l’honneur de remettre entre vos mains divers objets et papiers trouvés sur la personne de deux officiers supérieurs appartenant à votre armée et valeureusement tombés sous les coups de mes francs-tireurs, le 19 novembre, à l’attaque de Châtillon. 

    Sachant combien elles peuvent être chères à une famille, et ignorant le nom des victimes, j’ai pensé qu’il vous serait facile de trouver une destination à ces précieuses reliques.

    Le commandant de la 4e brigade, Armée des Vosges                                                   

    Ricciotti Garibaldi

    Ais-je besoin de dire que je n’ai jamais reçu de réponse à cette lettre, bien que par une autre source je sache que les objets sont arrivés à la destination que je leur indiquais.

    La politesse n’était évidemment pas le fort du prince Frédéric-Charles.

    Mais, après cette parenthèse, revenons à l’opération accomplie si bien par Michard.

    Il continua son mouvement et voici qu’il se trouve face à face avec un détachement prussien.

    Ceux-ci manifestent le désir de se rendre en levant la crosse du fusil en l’air.

    Les nôtres s’avancent pour les désarmer, mais, brusquement, les Prussiens retournèrent leur arme et font feu.

    Nos francs-tireurs leur ont fait payer cher cette ruse.

    Les comptes ayant été réglés et bien réglés avec ce détachement, Michard retourne sur ses pas, réunit ses chasseurs et vient ensuite me rejoindre avec ses prisonniers et quatre voitures de matériel.

    Il est superflu de dire combien nos hommes étaient joyeux de se voir réunis après cette expédition.

    Il en résulta une fête improvisée d’un bel élan et qui avait ses côtés comiques.

    Les casques à paratonnerre coiffaient maintenant nos francs-tireurs qui paraissaient transformés en autant de prussiens.

    Et, en effet, la seule manière de porter un peu commodément ce très incommode couvre-chef était de s’en coiffer.

    Une société musicale fut improvisée, où manquait une seule chose : la connaissance de la musique.

    On chercha à suppléer à l’absence de mélodie par l’emploi des tambours, et vous pouvez imaginer le concert qui en résulta.

    Ils semblaient tous devenus des écoliers auxquels une fête imprévue est accordée.

    Le commandement ferma un œil sur le relâchement de la discipline, et il arriva que les prisonniers eux-mêmes furent gagnés par la joyeuse humeur de nos hommes.

    Pauvres diables, ces prisonniers !...

    Le plus grand nombre étaient réellement des pères de famille incorporés dans la landwehr, et bien contents ils furent que leur situation de prisonniers les mit à l’abri du danger d’être tués.  

                                                                                                          

    Nous retournâmes ensuite sur Coulmier, et alors se produisit un de ces faits qui lient à jamais un commandant à ses soldats.

    Pendant une halte un peu prolongée, j’étais descendu de cheval et je me tenais sur une pierre.

    A quelque distance, je voyais mes officiers qui, réunis, discutaient avec animation.Enfin, Habert, des Dolois, l’orateur de la brigade, comme j’ai dit, se détache du groupe et s’avance vers moi, suivi par tous les autres.

    Commandant, fait-il, d’un ton embarrassé, j’aurais quelque chose à vous dire.                             

    Dites, répondis-je

    .                                                                                                    Ce serait comme une confession à faire, ajouta Habert.                                                                

    Eh bien ! Faites-la.                                                                                                      

    Mais, reprit-il, c’est que ce n’est pas facile.                                                                 

    Auriez-vous saccagé quelque église, malmené quelque couvent de nonnes ? Demandai-je en riant.     

    En somme, voici de quoi il s’agit, dit Habert, qui avait pris son parti.

    Commandant, vous avez sans doute remarqué que, pendant notre marche d’Autun à Châtillon, les compagnies cherchaient toujours à être détachées ou envoyées en service spécial(en effet, j’avais fait cette remarque, mais j’attribuais ce désir à un excès de zèle).                                                                                               

    Et bien, reprit Habert, que vous l’ayez déjà compris, ou que vous veniez par la suite à en connaître les raisons, nous, vos officiers, avons décidé de vous faire une confession ; c’est que ce désir de se détacher de la ligne de marche provenait du peu de confiance que nous avions en vous.

    Mais après ce fait de Châtillon, il ne me reste qu’à vous déclarer, au nom de tous, que vous pourrez nous amener partout où vous voudrez, que nous vous suivrons même les yeux bandés et jusqu’à la mort ! 

    Emu jusqu’aux larmes, je remerciai ces hommes pour cet acte, qui, je le sentais, nous solidarisait désormais.

    "Garibaldi, la surprise de Châtillon", un notule d'histoire de Dominique Masson

    Figure 5 : Habert

    A notre arrivée à Coulmier, nous trouvâmes le général Bossak-Hauké, le vaillant hongrois qui commandait notre première brigade, lequel ayant eu vent de notre contact avec l’ennemi, avait poussé ses troupes en avant, pour le cas où nous aurions besoin de soutien.

    Les officiers prussiens, nos prisonniers, furent invités à notre table, et le général Bossak fit un beau et généreux discours digne d’un tel homme, -mais je crains que cette éloquence n’ait produit aucun effet sur nos Prussiens, pour lesquels les noms de justice et de liberté étaient obscurs, tout se résumant pour eux en leur empereur ; - et pour lesquels le mot humanité était absolument incompréhensible, s’il faut en juger par leur façon de traiter les francs-tireurs qui avaient le malheur de tomber entre leurs mains ou les villages soupçonnés de favoriser les troupes françaises.                           

    En effet, j’appris que les Prussiens, au lendemain de notre coup, menaçaient de commettre des barbaries à Châtillon et j’écrivis la lettre suivante :

    Au commandant des forces Prussiennes                                                                     

    A Châtillon-sur-Seine

    Monsieur,                                                                                                                            Je suis informé que vous menacez la ville de Châtillon de représailles, motivées, dites-vous, par l’attaque des francs-tireurs, le samedi 19 novembre.           

    Je ne sache pas qu’une victoire due seulement à la bravoure d’un corps régulier puisse autoriser de semblables mesures.                                                                                                                       

    Une fois pour toutes, faites la guerre en soldats qui s’élancent loyalement dans la lutte et non en vandales qui aspirent seulement à la rapine.                                                        

    Menace pour menace : si vous êtes assez infâme pour mettre à exécution votre odieux projet, je vous donne l’assurance que je n’épargnerai aucun des deux cents prisonniers qui, vous le savez, sont entre mes mains.

    Le commandant de la 4e brigade                                                                                Ricciotti Garibaldi

    Voici ce que disent les rapports existant dans les archives de la commune de Châtillon et qui sont cités par Genevois (« les coups de Main pendant la guerre, p. 78-83 ») :                                               

    Cette troupe (les Prussiens) ivre de vengeance, tire des coups de fusil aux fenêtres et aux portes, pénètre dans les maisons, brise ou vole les meubles, envoie au loin un convoi d’otages, les frappant à coup de bâton et crachant sur eux.

    Le 22, un détachement de la brigade Kratz Koschlau, par les ordres de ce général, se livre à un pillage régulier et méthodique qui dure deux heures.

    Plusieurs maisons sont brûlées ; une contribution de guerre de un million est ordonnée.

    La ville s’en tire en payant comptant 153.500 francs environ.

    La route Saint-Jean et le haut du quartier de Chaumont sont spécialement indiqués aux rigueurs des pillards, le général ennemi ayant été informé que les habitants de ces quartiers surtout avaient favorisé les garibaldiens.

    Mais un coup de théâtre se produit : le maire, qu’on se préparait à fusiller, fut gracié :

    les otages furent remis en liberté ; et dans une lettre caractéristique le général annonce une espèce de grâce spéciale.

    Cette mansuétude, assaisonnée d’insultes, était due probablement à une lettre que Ricciotti Garibaldi lui avait envoyée de Montbard.

    M. Henri Genevois fait allusion à la lettre que nous donnons plus haut.

    Nous remîmes la surveillance de nos prisonniers aux gardes nationaux de Montbard, qui s’étaient avancés jusqu’à Coulmier à notre aide, et c’est à ces troupes civiques, renforcées des gardes nationaux de Semur accourus aussi à Montbard, que fut confié le service de la place dans cette cité, où nous arrivions le 20 novembre.

    Ainsi, nos compagnies purent au moins avoir une nuit de repos.

    Notre réception à Montbard fut des plus cordiales de la part de tous, spécialement du maire, M. Hugot, depuis sénateur, une sympathique et éminente personnalité.

    Un essaim de jeunes filles vêtues de blanc nous reçut à notre arrivée, et bien que l’on fut en hiver, de toutes les fenêtres pleuvaient des fleurs qui finissaient par orner la carabine de nos francs-tireurs.

    J’ajouterai encore que, le soir, les autorités nous réunirent tous, avec le général Bossak et son état-major, en un très cordial vin d’honneur.

    Le lendemain matin (22 novembre), nous partions pour Semur.

    "Garibaldi, la surprise de Châtillon", un notule d'histoire de Dominique Masson

     Figure 6 : Ricciotti et sa femme

    Quel fut le résultat pratique de ce coup de main ?

    Les Prussiens se sentirent sérieusement atteints dans l’un de leurs services les plus importants : celui des étapes.

    Extrêmement méticuleux comme ils étaient pour le maintien dans un état d’ordre parfait de leur vaste système de communication entre les armées, en les touchant là, c’était les toucher au point le plus sensible de leur organisation militaire.

    Et c’est de ce motif que naissait leur haine profonde pour les francs-tireurs, et l’extrême rigueur avec laquelle ils supprimaient ou réprimaient le moindre concours, même supposé, apporté par la population civile à ces corps francs.  

    Outre la perte effective en hommes et en chevaux qu’ils subirent dans ce cas, un plus grand dommage résultat pour eux du réveil d’un sentiment d’émulation parmi tous les autres corps de ce genre qui battaient la campagne, occasionnant diverses attaques, surtout celles de Auxon-sur-Aube, de        Chambœuf, de Clos-Vougeot, etc.[i] .

    En voyant ainsi menacée leur plus importante ligne de communication dans le Sud, les Prussiens furent obligés d’exécuter un mouvement de troupes de presque 20.000 hommes, mouvement qui dura quinze jours.Voici ce que relate le rapport de l’état-major prussien (partie II, pages 1273et suivantes) :                                                                           

    Le 21, le général de Raatz arrivait avec sa brigade.

    Le 23, il est rejoint par quatre compagnies de la landwehr et un demi-escadron.

    Le général Bonin, gouverneur général de la Lorraine, envoie un détachement à Chaumont « pour protéger la ligne menacée.                                        

    C’est ce que dit expressément le rapport, qui ajoute :

    A la nouvelle des faits survenus autour de Châtillon, le général Werder avait aussi dirigé des troupes dans cette direction.

    Le grand quartier-général prussien fait avancer le VIIe corps d’armée ou, au moins, la partie de ce corps qui était en avant de Metz, pour couvrir la ligne d’étapes de la IIe armée et pour maintenir les communications entre la VIe armée et le XIVe corps.

    Une partie des troupes du général Zastrow se réunissent autour de Chaumont.     

    Ajoutons à ces extraits du rapport de l’état-major, que divers auteurs prussiens, cités par Dormoy, disent que la colonne envoyée par le général Werder était la brigade Goltz, qui vint nous chercher à Montbard, treize jours après notre départ.

    En raison de l’absence prolongée de cette brigade, Werder, inquiet, envoie éventuellement à son secours la brigade Degenfell.                                     

    Et tout cela pour l’attaque de 416 francs-tireurs !

    Notre brigade, pour ce fait, fut portée à l’ordre du jour de l’armée. En voici le texte :   

    Les francs-tireurs des Vosges, les chasseurs de l’Isère, les chasseurs des Alpes de Savoie, le bataillon du Doubs et les chasseurs du Havre qui, sous la direction de Ricciotti Garibaldi, ont pris part à l’affaire de Châtillon, ont bien mérité de la République.                                                  

    Au nombre de quatre cents, ils ont attaqué environ mille hommes, les ont vaincus, leur ont fait cent soixante sept prisonniers, parmi lesquels treize officiers ; leur ont pris quatre vingt deux chevaux scellés, quatre voitures d’armes et demunitions et la voiture de la poste.        

    Les nôtres ont eu six morts et douze blessés,-beaucoup plus en eurent les ennemis.

    Et le général m’adressait la lettre suivante :

    REPUBLIQUE FRANCAISE

    Liberté, Egalité, Fraternité

    Commandement Général de l’Armée des Vosges                                                        

    Arnay-le-Duc, 21 novembre 1870

    Mon cher Ricciotti,

    Je t’envoie un baiser affectueux et un applaudissement pour ta conduite de preux.                   

    Salue pour moi tous les officiers et soldats qui ont pris part à la brillante entreprise et tu leur diras qu’ils ont bien mérité de la République.                                                                   

    Retire-toi à Saulieu, ou à Autun si cela te convient.

    Tu auras les 400 hommes de plus que tu demandes.

    Je recommande mes prisonniers à la générosité française

    A toi                                                                                                                        J. Garibaldi

    Et le gouvernement de la Défense Nationale complimentait la 4e brigade par des honneurs spéciaux et faisait annoncer le fait de Châtillon aux autorités civiles et militaires de France par la dépêche-circulaire suivante :   

    Tours, 20 Novembre 1870

    A Châtillon-sur-Seine, sept ou huit cents ennemis, surpris par Ricciotti Garibaldi, ont été mis hors combat ou faits prisonniers[ii] ».

     

    [i] Six jours après l’affaire de Châtillon, à Auxon-sur-Aube, 270 francs-tireurs du Doubs, commandés par Ollivier Ordinaire, du corps garibaldien, attaquaient, à quatre heures du matin, un détachement prussien de 3 à 400 hommes, des troupes d’étapes, en tuaient ou blessaient une cinquantaine et ramenaient 9 prisonniers et plusieurs voitures. A Chamboeuf, le 22 novembre, deux compagnies de francs-tireurs, Lyonnais et Vauclusiens, en tout 325 hommes, sous les ordres du commandant Lhoste, surprirent des compagnies du régiment des grenadiers de la garde badoise ; leur firent subir la perte d’une cinquantaine d’hommes et de leur lieutenant-colonel, emporté à Dijon où il mourut de sa blessure. Près de Clos-Vougeot, des francs-tireurs avaient rencontré une forte reconnaissance de cavalerie et lui avaient tué une trentaine de cavaliers.

    [ii] Le 8 décembre 1870, Ricciotti Garibaldi fut fait chevalier de la légion d’honneur par le gouvernement français (mais son père aurait refusé la décoration au nom de son fils).

    [1] Six jours après l’affaire de Châtillon, à Auxon-sur-Aube, 270 francs-tireurs du Doubs, commandés par Ollivier Ordinaire, du corps garibaldien, attaquaient, à quatre heures du matin, un détachement prussien de 3 à 400 hommes, des troupes d’étapes, en tuaient ou blessaient une cinquantaine et ramenaient 9 prisonniers et plusieurs voitures. A Chamboeuf, le 22 novembre, deux compagnies de francs-tireurs, Lyonnais et Vauclusiens, en tout 325 hommes, sous les ordres du commandant Lhoste, surprirent des compagnies du régiment des grenadiers de la garde badoise ; leur firent subir la perte d’une cinquantaine d’hommes et de leur lieutenant-colonel, emporté à Dijon où il mourut de sa blessure. Près de Clos-Vougeot, des francs-tireurs avaient rencontré une forte reconnaissance de cavalerie et lui avaient tué une trentaine de cavaliers.

    [1] Le 8 décembre 1870, Ricciotti Garibaldi fut fait chevalier de la légion d’honneur par le gouvernement français (mais son père aurait refusé la décoration au nom de son fils).


    1 commentaire

  • Passant dernièrement sur le chemin qui mène au camping,mon attention fut attirée par un monument adossé au mur du cimetière Saint Vorles…

    Je crus tout d’abord que c’était une tombe…

    Non…je lus sur la croix que c’était un monument élevé en mémoire d’un homme fusillé par les Prussiens en 1870.

    Cet homme s’appelait Léon Vigneron.

    Qui était-il ? pourquoi fut-il fusillé ?

    A qui pouvais je poser la question ? à Michel Diey bien sûr,la mémoire du Châtillonnais !


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