• L’enfance

    A cinq ans, l’enfant sera inscrit à l’école communale où il suivra tous les cours.

    A onze ans, il sera capable d’obtenir son certificat d’études.

    Parallèlement, il aura suivi pendant trois ans l’enseignement religieux, le catéchisme qui lui permettra de faire sa communion solennelle :

    Garçons en culottes courtes, longues plus tard, au bras le brassard blanc avec franges, médaille sur la poitrine, filles en robe blanche avec dentelles, voiles, aumônière, médaille.

    L’année suivante ce sera la Confirmation, mêmes rites et habillement.

    Dans les deux cas, c’était l’occasion d’un repas mémorable dont on se souviendra toute sa vie, même si l’on change de voie.

    On grandit, c’est de part et d’autre l’émancipation, certains restaient dans le milieu familial (cultures) d’autres partaient, entraient en apprentissage dans un métier.

    Il fallait se mettre au travail, il en était de même pour la jeune fille, il lui fallait savoir tout faire.

    La vie s’accélère, on a 18 ans ou plus, les fréquentations, les sorties… etc… préparent une nouvelle société.

    Une anecdote d'enfance racontée par Pierre Roy :

    Pierre et le bonnet d'âne

    En 1917, une jeune institutrice stagiaire prenait pension chez ma grand-mère Tine. Elle parlait avec maman  et lui disait que les enfants étaient insupportables et qu’il lui était difficile de se faire obéir. Un jour elle suggéra à maman de lui confectionner un bonnet d’âne : un morceau de toile rouge, deux oreilles rembourrées, une tresse passée sous le menton le maintenant sur la tête. Les élèves étaient souvent menacés de le coiffer, la punition au coin était le lieu à dissiper les élèves.

    Un jour, je l’importunais, pensant que jamais je ne le porterais, puisque c’était maman qui l’avait fait…mon jugement était faux.

     Je fus appelé à son bureau, elle me coiffa de ce couvre-chef à ma grande honte.

    C’était onze heures, nous sortions et devions nous rendre au « caté » chez madame Mariotte.

    Je devais aller avec ce bonnet. Je rasais les murs de peur d’être vu et nargué.

    J’arrivai au pont de la Seine, la honte me rendant furieux, j’arrachai les oreilles, le bonnet, je jetai le tout dans la rivière, on n’en reparla plus.

    La leçon avait porté, l’institutrice retrouva une classe plus sérieuse à l’avenir.


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  • Les fiançailles

    Elles avaient lieu un à deux mois avant le mariage, les présentations faites aux parents au cours d’un déjeuner.

    Les intérêts, dans certains cas, étaient discutés secrètement. Parfois le curé était du repas.

    Le mariage promis, la date en était fixée. Chez les gros propriétaires, les arrangements familiaux étaient rédigés chez un notaire, même dans des cas plus modestes.

    La fille apportait un trousseau constitué de chemises de lin, camisoles, caracos, robes, tabliers, draps, serviettes, nappes brodées par la jeune fille etc…

    Tout ceci avait été conçu pendant les veillées, ou les tristes dimanches d’hiver, au coin du feu de cheminée, à la lumière de la lampe à pétrole.

    Il y avait aussi apports de diverses choses : vaisselle familiale etc….(nous possédons encore de cette vaisselle, draps, torchons, chemises qui ont un siècle).

    On retrouve encore les vestiges de ces trousseaux dans bien de vieilles familles du Châtillonnais, la mode n’était pas entrée dans les mœurs, la qualité des tissus était de très longue durée, jamais démodés.

    La noce

    La veille du mariage, les garçons se réunissaient pour enterrer la vie de garçon du futur marié. Cela se passait soit chez lui, soit au café. On y buvait quelques pots de bon vin ou de champagne avec des petits gâteaux, parfois on exagérait, certains se retrouvaient pompette.

    Le matin du mariage, la future mariée était préparée, habillée chez ses parents.

    Tout de blanc vêtue, plus richement suivant l’aisance de la famille, robe en satin, broderies etc…Recouverte d’un long voile avec traîne, la tête ornée d’un diadème représentant des fleurs d’oranger. Les petits enfants portaient cette traîne, suivaient les jeunes couples, puis le cortège.

    La mariée était conduite au bras de son père à la Mairie puis à l’église. En fin de cortège se trouvait le marié au bras de sa mère. Les jeunes étaient classés par affinité (ça faisait un peu agence matrimoniale !) .

    Garçon et fille d’honneur, choisis par les mariés, présidaient en maintes circonstances, formaient le cortège, épinglant au revers du veston ou d’une robe des invités, un petit ruban blanc.

    Souvent précédé du violoneux  (qui jouait plus ou moins juste) jusqu’à la Mairie.

    Le Maire, ceint de son écharpe unissait les jeunes époux,aux « oui » réciproques, une salve de coups de fusil se faisait entendre à l’extérieur (durant l’acte de mariage, la porte doit être ouverte).
    A la sortie, le cortège se reformait, se rendait à l’église où devait être célébré l’office.

    Souvenirs de Pierre Roy : Fiançailles et noces à Aisey sur Seine au XIXème siècle

    (Sortie de la messe de mariage : Yvonne Roy-Piétri au bras de son mari Alphonse Piétri)

    La photographie


    A la sortie, une nouvelle décharge de coups de fusil, en l’honneur du bienvenu de l’extérieur. Si les mariés étaient de la localité, il n’y en avait pas.

    Puis on se dirigeait vers un endroit prévu par le photographe qui devait fixer sur une plaque, pour la postérité, le souvenir mémorable des parents et amis. C’était tout un travail de placer et remuer ces gens dans le costume 1900, tous plus ou moins gauches et empotés.

    Souvenirs de Pierre Roy : Fiançailles et noces à Aisey sur Seine au XIXème siècle

    (Photo du mariage d'Yvonne Roy et d'Alphonse Piétri)

    Monsieur Mariglier dit Papiche, son appareil sur pieds, sous son voile noir, cadrait une dernière fois, armant sa boîte à images, la poire à la main. Attention ! le temps à chacun de trouver un sourire qui n’était pas toujours réussi, ni la position la plus avantageuse. Prêt !! Clic, c’était la première plaque, ne bougeons pas, une deuxième plaque…clic… cette deuxième prise était pour pallier en cas de défaillance, suivant l’éclairage naturel. Ensuite étaient pris le couples de mariés puis d’autres…Toute cette séance photo durait près d’une heure…

    Monsieur Mariglier, habile photographe, qui habitait à Fontaine en Duesmois, se déplaçait par tous les temps en bicyclette et avec son matériel. Après s’être bien diverti, parfois avec son « pompon », il regagnait son domicile

    Tout le monde se retrouvait au café pour prendre l’apéritif. C’était nécessaire afin de se tenir honorablement à table, vu la débauche du nombre de plats de bonne qualité qui allaient vous être offerts et faisaient déjà dilater les papilles gustatives, arrosés de vins de bon goût, de champagne, liqueurs et « gouttes » (marc, prunes, kirsch maison)…Plaisirs de la table...

     


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  • Le repas de noce après la cérémonie...

    J’ai eu à exécuter des repas de noce comptant de 40 à 100 et même 150 invités. Tout ce monde passait à table vers 13heures .

    La salle ? elle était souvent dans une grange, agencée avec des draps aux murs, décorée de fleurs, de branches, de guirlandes.

    La lumière était soit des lampes à pétrole à bec suspendues, plus tard l’électricité suivant les possibilités.

    Tables: des plateaux sur tréteaux, entourées de bancs de bois comme sièges, seule la table d’honneur avait des chaises.

    Cette « salle » était chauffée par des braséros à charbon de bois, il n’y faisait pas très chaud, aussi les invités d’un certain âge gardaient manteaux et pardessus.

    Les tables étaient garnies d’un chemin de table, les serviettes pliées en bonnet d’évêque méticuleusement posées sur les assiettes, couverts, trois verres pour les vins plus la flûte à champagne, bouteilles de vins rouge et blanc, carafe d’eau.

    Les bons vins étaient servis accompagnant les plats, une ou deux pièces montées moka, il ne restait plus guère de place sur les tables, les vases de fleurs n’y trouvaient pas toujours place.

    La présentation créait l’ambiance du bonheur nuptial, vaisselle, verres, couverts etc… étaient empruntés à des parents ou loués au magasin Michel Regnault à Châtillon.

    Chaque menu portait le nom du convive et déterminait sa place, on s’évertuait à lire et relire ce menu, discutant avec plaisir de ce qui allait être offert aux papilles gustatives de toutes ces bouches gourmandes.

    Le service commençait, exécuté par des jeunes filles ou femmes habiles de la région qui s’étaient spécialisées dans les réunions de bouche. Ingénieuses, adroites, dévouées, service parfois périlleux, la nuit ou sous la pluie, car la cuisine était souvent préparée dans un local indépendant (chambre à four), traverser la cour la nuit, sans lumière.
    A l’instant des desserts, un garçon se faufilait sous la table des mariés, muni d’un ruban bleu pâle, chatouillait les cuisses de la mariée, surprise elle poussait un grand cri ! Le coquin sortait de dessous la table et exhibait les rubans en s’exclamant « La jarretière de la mariée ! ». Et les invités de pousser un « Vive la mariée ! » et applaudissaient.

    Les rubans étaient coupés en petits morceaux, montés sur une épingle que l’on accrochait sur la poitrine, et en même temps deux couples faisaient une quête parmi l’assistance.

    Le produit était compté, les mariés annonçaient que cette somme serait versée à une bonne œuvre sociale.
    Après le repas du soir, une quête était faite au profit du personnel ayant participé au travail et au service de la noce.

    Après les desserts, le champagne, les convives se devaient de souffler un peu.

    Commençaient alors la diction de récits, monologues pétillants et spirituels par des personnes joviales, chansons sentimentales même sur une fausse note, applaudies plus ou moins, entrecoupées de farces et attrapes, d’un air de violon de Papiche, avec ses rengaines, monologues monocordes « les pommes aux biques,les chaines d’agnons, les poères a leu grand quoms, j’ai la rate qui s’dilate… »

    Cette ambiance avait le pouvoir d’apporter une bonne humeur qui facilitait la digestion, on ne souffrait pas de ces excès gastronomiques.


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  • Le bal et le repas du soir

    Vers 17 heures, la noce s’ébranlait, on allait danser au café au son d’un violon, plus tard d’un accordéon, un phonographe et maintenant un petit orchestre. Pour les noces importantes, un parquet était monté dans une grange, éclairée par des lampes à pétrole complices d’enlacements amoureux, on y dansait la gigue, la polka, la valse, le tango, le fox-trot.

    On allait prendre des rafraîchissements dans les cafés, puis vers 21heures, à peu près tout le monde au complet regagnait les tables aux agapes alléchantes. Le déjeuner de midi était bien passé !

    Le diner, varié, était tout aussi copieux.

    Après ce festin, vers minuit, à nouveau le bal était envahi par les danseurs et leurs cavalières, s’en donnant à cœur joie. A 2 heures du matin, la fatigue se faisait sentir, c’était la danse du tapis, ronde où chacun se tenait par la main, un danseur dans le cercle, muni d’un tapis, le posait devant une fille de son choix, la ronde s’arrêtait, embrassades, le garçon sortait, la fille prenant sa place, présentant le tapis au garçon de son choix, jusqu’à élimination.Même les personnes moins jeunes y prenaient part.

    Puis c’était la danse les yeux bandés, ronde dans laquelle une personne aux yeux bandés, tâtait, palpait, faisait rentrer dans le cercle la personne choisie, on s’embrassait en enlevant les foulards, ainsi de suite.

    Puis venait la danse du balai :un danseur muni d’un balai frappait le sol, vire volte des couples, échanges de partenaires, celui qui restait seul laissait danser une minute, visait une fille, frappait du balai, le laissant tomber se jetait dans les bras de sa convoitée. Cela durait jusqu’à 4h30-5H du matin.

    Durant ce temps, les mariés s’étaient éclipsés pendant que le bal battait son plein, les serveuses s’y joignaient , le travail terminé, apportant une ambiance complémentaire en faisant danser les timides, hommes d’un certain âge, ravis d’être dans les bras de gentilles filles.

    Une dernière ronde, chaque couple s’éliminait en s’embrassant, la quittant et prenait fin .

     


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  • Le réveil des jeunes mariés

    Les jeunes s’en allaient à travers le village pour réveiller les mariés, on en profitait pour faire le charivari.

    Il y avait un indicateur qui enfin parlait du lieu où se trouvait la couche nuptiale.

    Grand tapage à la porte, le temps de passer un pantalon, la mariée en grande chemise (plus tard en robe de chambre), la porte s’ouvrait, une joyeuse rigolade, véritable sauterie, un jeune portait une ou deux bouteilles de champagne, un pot de chambre ( neuf et propre !) dans lequel un cran de chocolat avait été fondu, on versait le champagne dans ce vase, les mariés devaient boire, puis à tous d’en boire une lampée.

    Souvenirs de Pierre Roy les mariages à Aisey sur Seine au XIXème siècle...

    Certaines filles faisaient la moue, dégoutées, mais en réalité, cette cavalcade se terminait dans la bonne humeur, puis chacun allait se coucher.

    Le lendemain, la noce se retrouvait au café vers 11H-12H, puis à 13h on recommençait un festin moins important pour les manquants de la veille, selon les activités et domiciles, puis l’après-midi c’était la dislocation.

    Les restes culinaires étaient portés à certaines gens de condition modeste, c’était les « aux gnilloux », je crois reconnaître dans ce patois « aux guenilleux », les pauvres.

     


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  • Armand et Pierre Roy, fameux cuisiniers, ont tenu l'Hôtel Roy (devenu depuis l'Hôtel du Roy), à Aisey sur Seine, pendant de nombreuses années.

    Pierre nous explique ici comment se passait la préparation d'un repas de noces.

    Le nombre de convives et le faste variaient suivant l’importance des familles.

    Les préparatifs 

    A l’autel du sacrifice passaient de 5 à 6 poules, poulets, canards, dindes, pintades, lapins, souvent mouton suivant les menus.

    Le cochon avait été tué quelques jours plus tôt.

    Les volailles, tuées, ébouillantées dans des lessiveuses, plumées.

    On arrivait à boucler les dépenses au minimum puisqu’on prenait beaucoup sur l’exploitation. La fourniture des vins était souvent obtenue par un troc constitué d’un veau, mouton ou porc.

    Le cuisinier, ou la cuisinière, avait la charge de préparer les pâtés, galantines, terrines, poissons, civets, gibiers et rôts divers et d’accommodements, des dizaines de tartes, biscuits , mokas, centaines de choux pour pièces montées.

    Ils travaillaient sur la cuisinière de la maison, une autre empruntée adjointe, quelques réchauds à charbon de bois, casseroles et marmites de tous genres, même la chaudière à faire cuire les pommes de terreaux bêtes et porcs était utilisée.

    En principe, il y avait un four dans chaque ferme ou proche (il y a un siècle on faisait son pain) dans le voisinage en état de fonctionner.

    C’était tout un art de le mettre en chauffe, progressivement avec des fagots, de la charbonnette. On commençait par allumer en avant puis au fur et à mesure que la flamme grandissait, on poussait le feu à droite et à gauche, poussant les braises et charbonnettes.

    Il fallait alimenter le four environ deux heures, jusqu’à ce que la voûte du four soit bien blanche uniformément, que la sole soit bien chaude.

    Ceci 24 heures à l’avance, car l’humidité avait envahi le four, qui n’était souvent plus utilisé depuis plusieurs années.

    Pour l’emploi il était plus facile de ne le chauffer que la veille, en une heure la température requise était obtenue, ces précautions étaient importantes, sinon se serait retrouvé devant un désastre à l’utilisation, la chute brutale de la température en enfournant. Bien mené, on arrivait à cuire dans de très bonnes conditions, gâteaux, pâtisseries et rôtis etc….

    Il fallait beaucoup de méthode et d’initiative, aussi bien dans les fournitures préliminaires, ne rien oublier d’acheter, surtout à la dernière minute, les épiceries locales ou l’épicier ambulant bien souvent modestement achalandés.


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